Du bon usage des médicaments anti-douleurs
Maladie, blessure, accident... les causes de douleurs sont multiples. Et si la plupart du temps une simple prise de médicament antalgique est efficace, parfois la quête d'un traitement anti-douleur est un véritable casse-tête. Entre les différents médicaments et les nombreux effets secondaires indésirables, certains patients mettent des années à trouver une formule qui leur permette de vivre mieux.
Le mécanisme de la douleur
Les différents médicaments antalgiques sont classés en fonction de l'intensité de la douleur. Quand on a mal à un endroit du corps, par exemple lorsqu'on reçoit un coup de marteau sur les doigts, le choc induit une inflammation locale et des substances telles que des prostaglandines E2 sont libérées. Elles vont sensibiliser les nocicepteurs : les capteurs spécialisés dans la douleur. Une fois activés, ces récepteurs envoient un message le long des nerfs jusqu'à la moelle épinière, puis jusqu'au cerveau où l'on perçoit la sensation douloureuse.
Cette douleur est un signal censé nous protéger, mais une fois son rôle accomplit mieux vaut arrêter cette sensation désagréable. Les différents médicaments antalgiques vont justement agir en interrompant la transmission de ce message, de sa naissance à sa perception au niveau cérébral.
Quand la douleur est légère, des médicaments tels que le paracétamol, l'aspirine et les anti-inflammatoires non stéroïdiens, vont agir localement en inhibant la fabrication des prostaglandines. Du coup, les nocicepteurs sont moins activés et la sensation de douleur diminue. D'autres médicaments agissent plutôt sur les fibres nerveuses en inhibant la conduction de l'influx nerveux. Cette fois, c'est le message qui n'est pas transmis au cerveau. Résultat, la douleur ne peut être ressentie. C'est le cas des anesthésiques locaux tels que la lidocaïne utilisée plutôt en chirurgie.
Quand la douleur est intense, on peut avoir recours aux opiacés (codéine, tramadol) mais aussi aux morphiniques. Ces médicaments agissent dans le cerveau, ils se fixent sur des récepteurs et inhibent la transmission de l'influx nerveux. Résultat, le centre de la douleur ne peut analyser le message, on ne perçoit pas la douleur. Tous ces médicaments ont des effets secondaires plus ou moins importants. Certains sont en libre service, tandis que d'autres nécessitent une prescription médicale.
À la recherche du bon traitement
Près de trois millions de personnes souffriraient de douleurs neuropathiques, qui peuvent être liées à des lésions au niveau de la moelle épinière. Pour ces patients, trouver le bon traitement peut relever du parcours du combattant.
Injections de kétamine : la douleur anesthésiée
Quand les traitements sont inefficaces face aux douleurs chroniques, certains patients peuvent recevoir des injections de puissants analgésiques, comme la kétamine. Une démarche qui nécessite une hospitalisation.
Des ateliers pour bien utiliser les antidouleurs
Les patients atteints de maladies chroniques comme la spondylarthrite ankylosante, qui génère de fortes douleurs articulaires, prennent beaucoup d'anti-inflammatoires pour se soulager et ce sur le long terme. Mais il est parfois compliqué de trouver le bon dosage et de gérer les effets secondaires.
Les centres anti-douleur leur proposent d'assister à des ateliers d'éducation thérapeutique pour apprendre à bien utiliser ces médicaments.
Durée des prescriptions, posologie, effet antalgique des anti-inflammatoires... les ateliers thérapeutiques sont l'occasion rêvée pour les patients de poser un maximum de questions. L'attention est aussi portée sur les anti-inflammatoires courants utilisés en automédication qui peuvent avoir des effets délétères. Parmi les effets secondaires, on cite souvent les troubles digestifs.
Grâce à ces ateliers, les patients acquièrent une bonne connaissance du maniement des anti-douleurs.
Paracétamol : attention à l'overdose
Le paracétamol est souvent considéré comme un médicament très anodin. Mais pris en grande quantité, il peut gravement endommager le foie et dans certains cas, mettre la vie en danger. Il faut alors agir très vite.
Traitements anti-douleur : l'espoir de la recherche
Efficacité limitée dans le temps, effets secondaires trop lourds... Pour les patients qui souffrent de douleurs chroniques, les traitements anti-douleur montrent souvent leurs limites. D'où la nécessité de faire avancer la recherche. Explications avec le Pr. Bernard Roques, directeur scientifique de la société Pharmaleads.
- Quels sont aujourd'hui les traitements anti-douleur les plus efficaces ?
Pr. Bernard Roques : "La morphine reste l'analgésique de référence pour les douleurs aiguës (cancers, fractures, brûlures sévères…). Mais elle possède de nombreux effets secondaires, comme des problèmes de respiration, de constipation, de somnolence et de tolérance. Elle est donc difficilement utilisable chez les personnes âgées et les enfants. Par ailleurs elle s'avère peu active sur les douleurs neuropathiques, qui peuvent être post-opératoires ou liées par exemple à un herpès généralisé, au diabète, ou aux traitements par les antitumoraux."
- C'est justement à ces douleurs neuropathiques que vous avez souhaité vous attaquer…
Pr. Bernard Roques : "Absolument. Nous avons effectué d'importantes recherches depuis dix ans. Les molécules sur lesquelles nous travaillons s'appuient sur l'existence de morphines internes, les fameuses endorphines, qui existent à tous les niveaux où naît la douleur, que ce soit la peau, le muscle, les articulations ou encore les organes."
- Quelles sont les fonctions de ces morphines internes ?
Pr. Bernard Roques : "Elles ont les mêmes cibles que la morphine externe et donc a priori la même efficacité. À ceci près qu'elles se dégradent extrêmement rapidement. Notre travail consiste donc à les protéger, de sorte que leur efficacité puisse durer dans le temps."
- Mais quel est l'avantage d'utiliser ces molécules, par rapport à la morphine ?
Pr. Bernard Roques : "La morphine qui est prescrite aux patients stimule toutes les cibles potentielles de la douleur, même celles qui ne sont pas impliquées. D'où les importants effets secondaires. Ce n'est pas du tout le cas des morphines internes qui agissent plus spécifiquement sur le circuit de la douleur. La molécule que nous développons, et que nous avons nommée PL37, doit bloquer très efficacement les douleurs à leur source, c'est-à-dire là où elles naissent, à la périphérie où sont situées les fibres sensibles à tous les types de douleur."
- Un nouveau médicament issu de vos recherches pourrait-il voir le jour ?
Pr. Bernard Roques : "Cette molécule, que nous voulons rendre active par voie orale, nous l'avons déjà testée sur des patients sains. Elle a été parfaitement tolérée, même à des doses très élevées, y compris en traitement chronique. L'administration orale de PL37 par rapport à un placebo a montré une efficacité indéniable sur tous les signes de douleur. La prochaine étape sera donc de la tester sur des malades. Bien entendu, nous espérons que d'ici quelques années, cette classe de molécules complètement originale puisse enfin apporter une solution aux problèmes non résolus des douleurs neuropathiques." En 2024, la molécule est toujours à l'étude.
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