Traitements du cancer de la prostate : des ultrasons à la photothérapie
Avec plus de 50.000 nouveaux cas par an en France, le cancer de la prostate arrive en tête des cancers masculins chez les hommes. C'est un cancer qui apparaît la plupart du temps entre 60 et 90 ans et dont les traitements sont d'autant plus efficaces que la maladie est diagnostiquée précocement. D'où l'importance d'un dépistage dès 50 ans. Quels sont les traitements proposés ? Quelles sont les conséquences sur la vie quotidienne des malades ?
- Qu'est-ce que le cancer de la prostate ?
- Les ultrasons : un traitement plus doux
- La curiethérapie : des grains radioactifs
- Prostatectomie : l'ablation de la prostate
- La photothérapie en phase d'essai
- Radiothérapie par cyberknife : cibler la tumeur au millimètre près
- Le traitement des cancers de prostate métastatiques
Qu'est-ce que le cancer de la prostate ?
C'est le premier cancer chez les hommes de plus de 50 ans et la deuxième cause de décès, avec 8.100 décès annuels (source : Vidal). À partir de 50 ans, son dépistage est vivement conseillé car plus la maladie est décelée tôt, plus sa prise en charge sera efficace.
La prostate est une glande située sous la vessie, en avant du rectum. Elle entoure l'urètre, le canal qui permet d'éliminer l'urine de la vessie. Autour de ce canal, un groupe de fibres musculaires forment le sphincter urinaire, qui contrôle le passage de l'urine en se contractant ou en se relâchant.
La prostate est entourée d'une capsule. Elle est constituée de différentes cellules. Certaines sont glandulaires, elles sécrètent les liquides pour l'éjaculation, d'autres sont musculaires, elles règlent le jet d'urine et l'éjaculation. Des cellules fibreuses maintiennent également la structure de la glande. Dans environ 95% des cas, le cancer débute dans les cellules glandulaires. On parle alors d'adénocarcinome.
La majorité des tumeurs malignes de la prostate (environ 75%) surviennent dans la zone périphérique. D'où l'intérêt de l'examen du toucher rectal. Le principe est simple : le praticien introduit le doigt par l'anus pour palper la face antérieure du rectum. Cet examen est indispensable pour apprécier la taille et surtout la consistance de la prostate. Il se fait aussi annuellement pour la surveillance d'une récidive, après un premier cancer.
Le dosage du PSA est également demandé et une biopsie, examen permettant d'affirmer s'il s'agit d'un cancer ou pas, est effectuée si le PSA est supérieur à 4 ng/ml. Chez les sujets jeunes et les hommes à risque, cette valeur est abaissée à 3.
Les ultrasons : un traitement plus doux
Il est possible de traiter la prostate par une méthode plus douce que la chirurgie : les ultrasons. Cette méthode appelée "ablatherm" ou High Intensity Focused Ultrasons, consiste en des ultrasons de haute intensité et focalisés sur la tumeur.
Les médecins ont également d'autres armes à leur disposition, tels que l'hormonothérapie qui bloque le développement du cancer en réduisant le taux d'hormones masculines, ou la radiothérapie.
Des traitements prometteurs
Certaines molécules sont porteuses d'espoir dans le traitement de formes avancées, comme l'olaparib. L'immunothérapie est également testée afin de doper les défenses immunitaires du patient, durant la chimiothérapie.
La curiethérapie : des grains radioactifs
En matière de traitement de la prostate, l'ablation n'est pas la seule solution. Dans certains cas, une radiothérapie particulière, la curiethérapie est proposée, en une seule intervention.
La curiethérapie est utilisée pour les petites tumeurs. On place des implants radioactifs dans la prostate, sous forme de grains d'iode radioactif, qui agissent ainsi directement sur la tumeur. Ils sont laissés à demeure où leur activité dure un an environ. Ils ne posent ensuite aucun problème pour la santé du patient ou pour les contrôles ultérieures d'IRM.
Les résultats de la curiethérapie de la prostate sont très encourageants puisque 95% des hommes sont guéris à long terme, avec une bonne conservation des performances sexuelles et quasiment aucune incontinence. Une étude de l'institut Curie, parmi d'autres, confirme les excellents résultats aussi bien sur la survie que sur la tolérance.
Prostatectomie : l'ablation de la prostate
L'ablation totale de la prostate est recommandée quand les biopsies confirment la présence d'une tumeur cancéreuse. On parle alors de prostatectomie. L'accès à la prostate est difficile et il ne faut pas blesser les tissus avoisinants. Certains urologues utilisent un robot chirurgical pour un meilleur contrôle des gestes opératoires.
L'opération laisse souvent des séquelles. Sur le plan sexuel, l'éjaculation ne se fait plus. Au cours de la prostatectomie, les nerfs de l'érection peuvent aussi être endommagés. Il en résulte un trouble de l'érection chez 60 à 90% des patients. Mais l'érection peut parfois être récupérée. Cela dépend de l'âge et de l'atteinte des nerfs érecteurs. Lorsque ce n'est pas le cas, il existe des traitements pour remédier à la dysfonction érectile.
Autre conséquence négative de l'opération : son retentissement sur l'appareil urinaire. Les sphincters qui permettent l'évacuation de l'urine sont très proches de la prostate. Et quand on enlève la prostate, ils sont souvent abîmés. Des fuites urinaires apparaissent alors, surtout à l'effort.
La photothérapie en phase d'essai
Jusqu'à présent il existait trois types de traitements curatifs pour les cancers localisés. La chirurgie avec ablation complète de la prostate, la radiothérapie et la curiethérapie, des traitements relativement invasifs aux effets secondaires parfois difficiles sur la sexualité ou la miction.
En dehors de ces trois traitements, de nouvelles méthodes thérapeutiques qualifiées de "mini-invasives" sont en cours d'évaluation. Elles ont pour objectif de diminuer les effets secondaires et la durée d'hospitalisation.
La photothérapie dynamique est la plus prometteuse, elle concerne les cancers localisés, de petit volume et peu agressifs. Elle consiste à détruire la zone cible, en associant une molécule qui réagit à la lumière, la lumière à une une longueur d'onde spécifique, à de l'oxygène. La molécule absorbe la lumière, transfère l'énergie à l'oxygène et crée des radicaux libres. Au terme d'une cascade de réactions, les vaisseaux vont se détruire et la tumeur ne sera plus irriguée en sang, ce qui conduit à la mort des cellules cancéreuses.
EN 2019, une étude vait montré que la tolérance était excellente, avec des effets secondaires le plus souvent transitoires. Elle est également efficace pour les cancers localisés de bas grade.
Radiothérapie par cyberknife : cibler la tumeur au millimètre près
La radiothérapie est l'un des traitements du cancer de la prostate. Elle permet de détruire progressivement les tumeurs en les irradiant. Mais il existe une technique particulière, le "CyberKnife", sorte de radiothérapie ultra-ciblée. Elle préserve au maximum les organes proches de la prostate et notamment la fonction érectile.
Quelques jours avant le traitement par radiothérapie, de petits capteurs sont implantés dans la prostate du patient. À la manière d'un GPS, ils permettent au robot de se repérer et enregistrent en continu les micromouvements des organes les plus proches de la zone prostatique. "La prostate se situe à côté d'organes mobiles : la vessie qui se remplit d'urine et le rectum rempli de gaz et de selles. Si pendant la radiothérapie, on a un contrôle en temps réel du mouvement de la prostate par rapport aux organes avoisinants, on pourra être très précis dans le ciblage et épargner les toxicités, diminuer la dose sur ce qui est avoisinant. De cette manière, on a un traitement efficace et mieux toléré", explique le Dr Alain Toledano, cancérologue radiothérapeute.
Ainsi, le robot a toujours sa cible en vue et délivre des doses de rayons calibrées en fonction de la taille, de l'épaisseur de la tumeur et de la fragilité des organes proches. Objectif : limiter les effets secondaires comme les irritations urinaires et digestives. Une séance dure entre 25 et 45 minutes. La machine s'interrompt dès lors que la tumeur a été suffisamment irradiée.
Alternative aux traitements plus invasifs, cette technique préserve aussi la qualité de vie des malades comme le confirme le Dr Alain Toledano, cancérologue radiothérapeute : "On s'affranchit des problèmes de continence puisqu'on n'a pas à intervenir. Et en règle générale, on préserve au mieux la fonction érectile lorsque celle-ci avant le traitement était bonne parce qu'on abîme un peu moins tout l'environnement péri-prostatique".
Les protocoles de radiothérapie ciblée se font sur quatre à six séances, et leur bonne tolérance permet aussi de ré-irradier les patients. On estime leur taux de succès à 95%.
L'arcthérapie, une radiothérapie de haute précision
L'arcthérapie volumétrique est également une radiothérapie extrêmement précise, grâce à une machine équipée d'un bras, qui tourne autour du patient. Elle nécessite avant le traitement, l'implantation de 3 grains d'or dans la prostate, afin de pouvoir bien la repérer et gagner en précision. Les tissus sains sont ainsi préservés.
Le traitement des cancers de prostate métastatiques
10% des cancers de la prostate développent d'emblée des métastases. Durant 70 ans, les seuls traitements possibles étaient l'hormonothérapie classique et la chimiothérapie. Désormais, un nouveau médicament est associé à cette thérapie : l'abiratérone.
"Le traitement par abiratérone est associé à l'hormonothérapie conventionnelle. Ce traitement permet d'empêcher la fabrication des hormones masculines parce que les cellules cancéreuses adorent la testostérone et se multiplient quand on leur donne de la testostérone", explique le Pr Karim Fizazi, chef du département de médecine à l'Institut Gustave Roussy.
Les résultats obtenus avec ce médicament sont particulièrement encourageants. Selon le Pr Fizazi, les patients constatent "une amélioration sur leurs douleurs, sur leur état de fatigue…". Toutefois, il faut attendre plusieurs mois, voire plusieurs années, pour constater une amélioration nette à l'imagerie. Le seul effet secondaire de l'abiratérone est le risque d'hypertension artérielle. Ce qui nécessite une surveillance voire un traitement supplémentaire.
L'autorisation de mise sur le marché de l'abiratérone a eu lieu en 2018, à raison d'un comprimé par jour à jeun. Selon une étude réalisée sur 1.200 patients dans le monde, l'association de l'abiratérone aux traitements conventionnels diminue le risque de décès de 40%.