Musique au bloc opératoire : faut-il couper le son ?
Si la diffusion de musique au bloc opératoire semble contribuer à la concentration des chirurgiens, elle peut également être une source de tensions pour les équipes médicales selon une récente étude britannique.
Mettre de la musique en fond sonore est devenu une pratique courante lors des interventions chirurgicales au point que 53 à 72% des opérations se dérouleraient désormais au son des mélodies préférées des praticiens.
Réduction du stress, meilleure concentration, les travaux vantant les bénéfices de la musique au bloc ne manquent pas. Dernière exemple en date, une étude publiée dans l'Aesthetic Surgery Journal montrant que les médecins qui opèrent en musique ont un geste plus rapide et précis que leurs confrères non mélomanes. Cependant les chirurgiens devraient y penser à deux fois avant de monter le volume au bloc selon des travaux publiés le 04 aout dans le Journal of Advanced Nursing.
Des chercheurs du département de chirurgie de l’Imperial College de Londres ont ainsi filmé 20 opérations dans différents hôpitaux anglais dont 16 se sont déroulées en musique.En plaçant plusieurs caméras à des points stratégiques autour de la table d’opération, ils ont pu observer la communication verbale et non verbale du personnel présent au bloc.
L’analyse des 35 heures d’enregistrement issues de l’expérience montre que la musique a beau être un langage universel, elle aurait plutôt tendance à nuire à la communication du personnel.Dans une ambiance musicale, la nécessité de répéter ses demandes faute d’être entendu était ainsi 5 fois plus fréquente. « Ces répétitions qui prolongent chacune l’intervention chirurgicale de quelques secondes, soit 4,68 secondes en moyenne, s’accumulent et augmentent les tensions au sein de l’équipe dues à la frustration d’une communication inefficace. Or, tout événement venant perturber la communication des équipes soignantes est source de danger pour le patient » concluent les auteurs.
Eviter la dance et les mélodies à la mode
Selon ses résultats, il semble que les musiques dance et drum and bass soient les plus susceptibles d’être écoutées à un niveau sonore perturbant, le personnel ayant également tendance à pousser le volume sur des chansons à succès.
Enfin si tous les gouts musicaux sont dans la nature, l’étude précise qu’en termes de choix au bloc, les chirurgiens seniors ont plus souvent le dernier mot que le personnel infirmier.
« Diffuser de la musique peut avoir son utilité au bloc opératoire pour couvrir le bruit parfois perturbant des machines ou du matériel chirurgical et ainsi aider les soignant à se concentrer », concède Sharon-Marie Weldon, première auteure de l’étude, dans un article du site anglais BBC News. « Cela étant dit, il serait souhaitable que les choix musicaux fassent davantage l’objet de discussions ou de négociations au sein des équipes, notamment sur la nature et le volume sonore des morceaux » conclue la chercheuse.