Vaccins : mode d'emploi
ROR, grippe, hépatite B, tuberculose, fièvre jaune... Se protéger de toutes ces maladies est possible grâce à la vaccination. Par quel mécanisme un vaccin est efficace contre les virus ? Qui doit être vacciné ? À quel moment et contre quelle maladie ? Comment fonctionne un centre de vaccination ?
- Qu'est-ce que la vaccination ?
- Comment fonctionnent les vaccins ?
- Vaccins : objectif immunité !
- Les vaccins recommandés chez l'adulte
- Santé en voyage : le rush des vaccins
- Vaccination des personnes âgées : l'immunosénescence
- De la vaccination préventive à la vaccination thérapeutique
- Vaccin ROR : histoire et polémiques
- Vaccins et aluminium : la grande inquiétude
- Vaccin contre l'hépatite B : la fin d'une polémique
Qu'est-ce que la vaccination ?
Variole, diphtérie, polio ou encore tuberculose… ces maladies ont fait des ravages par le passé mais elles ont pu être freinées, voire éradiquées pour certaines, par un seul et même acte médical : la vaccination. Pourtant, les Français se méfient de plus en plus des vaccins et remettent en question leur utilité. À tel point que la couverture vaccinale a baissé avec déjà des conséquences. Afin d'y remédier, le nombre de vaccins obligatoires a été augmenté. Il est passé de trois à onze depuis le 1er janvier 2018.
Le principe de la vaccination s'inspire de notre système de défense. Dès notre naissance, notre organisme subit des attaques de bactéries et de virus. Les cellules de défense les combattent et apprennent à les reconnaître. C'est ce que l'on appelle l'immunisation naturelle. La mémorisation par les cellules immunitaires permet à l'organisme de se défendre plus rapidement en cas de nouvelle attaque. C'est sur cette capacité à mémoriser l'ennemi que la vaccination repose.
Comment fonctionnent les vaccins ?
Les vaccins contiennent soit un germe inactivé (qui ne contient pas d'agent infectieux vivant mais simplement une partie ou sa toxine), soit un germe vivant atténué (qui a été modifié pour perdre son pouvoir infectieux). Même si le vaccin ne nous rend pas malade, l'objectif est de déclencher l'action de notre système de défense, notamment l'action des cellules lymphocytes. Elles mémorisent l'ennemi et produisent des armes particulières appelées des anticorps. Lorsque l'organisme sera confronté au germe, il produire rapidement des anticorps spécifiques et protecteurs et ne sera pas malade.
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Vaccins : objectif immunité !
La vaccination pendant l'enfance est primordiale. Elle évite de nombreuses maladies infectieuses chez l'enfant et l'adulte. Les vaccins obligatoires depuis 2018 concerne les maladies suivantes : coqueluche, diphtérie, tétanos, poliomyélite, hépatite B, infections à Haemophilus influenza de type B et pneumocoque, rougeole, oreillons, rubéole, méningocoque C, et suivent un calendrier vaccinal bien précis. En Guyane, le vaccin contre la fèvre jaune est aussi obligatoire à partir d'un an.
Chez l'adulte, on différencie les vaccins de rappel pour renforcer les vaccins déjà reçus dans l'enfance, et les vaccins pratiqués dans certaines circonstances.
Les vaccins recommandés chez l'adulte
Pour le DTP, vaccin contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite, le rappel est à 25, 45 et 65 ans puis tous les 10 ans. Le vaccin contre la grippe est recommandé tous les ans, pour les personnes à risque et les femmes enceintes.
Les femmes non vaccinées ayant le projet d'une grossesse peuvent se faire vacciner contre la coqueluche, la varicelle. Les plus de 65 ans peuvent se faire vacciner tous les ans contre la grippe, contre le zona entre 65 et 74 ans.
Concernant l'hépatite B, le vaccin est recommandé chez les adolescents non vaccinés et chez les adultes appartenant à un groupe à risque (toxicomanes, partenaires sexuels multiples, patients transfusés régulièrement, voyageurs ou résidents en pays à risque, professions de santé...). Le vaccin contre l'hépatite A est recommandé pour les personnes atteintes de mucoviscidose, de maladies du foie et les hommes ayant des relations sexuelles avec les hommes. Le vaccin contre le HPV est recommandé aux hommes ayant des relations avec les hommes jusqu'à 26 ans.
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Certains vaccins sont recommandées contre la tuberculose, la varicelle, le zona, les papillomavirus ou encore le vaccin contre la grippe, surtout recommandé chez les personnes âgées de plus de 65 ans et chez les malades chroniques (insuffisants cardiaques, respiratoires...). Il doit être réalisé tous les ans au début de l'automne.
Santé en voyage : le rush des vaccins
A l'âge adulte, certains vaccins sont recommandés pour des personnes à risque ou dans des circonstances particulières :
- vaccin contre le pneumocoque pour les sujets souffrant de maladie chronique
- en cas de risque professionnel (vaccin contre la rage chez les personnels vétérinaires...)
- en cas de voyage dans des pays à risque : il s'agit le plus souvent des vaccins contre la fièvre jaune, l'hépatite A, l'hépatite B et la typhoïde.
Avant un voyage, il convient de se renseigner, pour chaque pays, auprès de son médecin ou d'un centre spécialisé. La vaccination contre la fièvre jaune est réalisée dans des centres agréés qui délivrent un certificat de vaccination.
Vaccination des personnes âgées : l'immunosénescence
Chaque année, le calendrier vaccinal rappelle les recommandations vaccinales à la population en fonction de leur mode de vie, de leur profession mais surtout de leur âge. En effet, au-delà de 65 ans il est parfois nécessaire de renouveler plus souvent certains vaccins à cause du phénomène "d'immunosénescence", c'est-à-dire du vieillissement du système immunitaire.
Le déclin des cellules immunitaires avec l'âge est appelé immunosénescence. Chez l'homme le système immunitaire se compose notamment de deux types de cellules de défense : des lymphocytes naïfs produits dans la moelle osseuse et le thymus capables d'initier une réponse immunitaire contre un agent infectieux, et des lymphocytes mémoire déjà confrontés à un agent infectieux auparavant et prêts à le combattre à nouveau. On trouve les lymphocytes mémoire au niveau de la rate ou encore des ganglions lymphatiques.
En vieillissant, notre système immunitaire évolue. Alors que les lymphocytes naïfs sont présents en grand nombre chez l'enfant, chez le sujet âgé leur nombre diminue avec la disparition du thymus. Quant aux lymphocytes mémoire, moins performants, ils augmentent modifiant ainsi la réponse immunitaire. Conséquence : la vaccination s'avère moins efficace dans le temps et doit être renouvelée plus souvent au delà de 65 ans.
Une équipe de chercheurs tente de rendre les vaccins plus performants en ciblant les adjuvants. "Le rôle d'un adjuvant dans un vaccin est d'optimiser, d'augmenter la réponse immunitaire contre les antigènes présents dans ce vaccin et atteindre des niveaux protecteurs induits par le vaccin", explique Victor Appay, directeur de recherche Inserm.
Pour l'instant, les adjuvants testés ne se sont pas encore avérés performants. Ce projet nécessite au moins quatre années d'expérimentations en laboratoire.
De la vaccination préventive à la vaccination thérapeutique
Quand on pense aux vaccins, c'est leur aspect "préventif" qui vient tout de suite à l'esprit. Mais il existe un autre type de vaccins dits curatifs, dont le but est de traiter une pathologie déjà installée.
Le professeur Lemoine et son équipe travaillent sur un vaccin qui agit sur certaines manifestations du papillomavirus, un virus surtout connu pour provoquer des cancers du col de l'utérus mais qui induit aussi des tumeurs de la gorge, de la bouche et du cou.
Pour combattre ces tumeurs, l'équipe de chercheurs développe un vaccin thérapeutique. "Les vaccins sont dits thérapeutiques et non préventifs car ils vont se diriger contre la cellule tumorale. Les vaccins qui existent à l'heure actuelle qui sont des vaccins préventifs contre le papillomavirus ont une action vis-à-vis du virus en lui-même et donc ne peuvent être administrés qu'avant une infection. Une fois que l'infection a eu lieu, le vaccin ne peut plus fonctionner c'est la raison pour laquelle en règle générale, pour un cancer du col de l'utérus on vaccine les jeunes filles avant le premier rapport sexuel", explique Géraldine Lescaille, enseignant-chercheur au centre d'immunologie et des maladies infectieuses.
Chez la souris déjà infectée par le papillomavirus et présentant une réaction tumorale, on injecte le vaccin thérapeutique dans la peau à distance de la tumeur. Le vaccin injecté à la souris contient un antigène spécifique de la tumeur appelé E7. Cet antigène est ensuite capté par des cellules qui le présentent aux lymphocytes des cellules de défense. Suite à ce contact, les lymphocytes détectent la cellule tumorale qui porte aussi l'antigène E7. Le vaccin agit, les lymphocytes combattent la cellule tumorale. Résultat : la tumeur de la souris décroît.
Les souris sont ensuite surveillées sur le long terme et les chercheurs comparent les différences de réaction entre le groupe témoins et le groupe de souris vaccinées. Ils ont notamment pu observer que la survie était supérieure à 60% chez les souris vaccinées alors que les souris non vaccinées mouraient plus tôt.
Ce modèle de vaccin thérapeutique est donc encourageant mais nécessite encore de nombreux travaux avant d'envisager un essai clinique chez l'homme. Il resterait associé aux traitements classiques comme la chimiothérapie ou la radiothérapie mais permettrait d'améliorer leur efficacité.
Vaccin ROR : histoire et polémiques
Dans le calendrier vaccinal, se trouve un vaccin combiné : le ROR qui protège de la rougeole, des oreillons et de la rubéole. Un vaccin qui a révolutionné la prévention des maladies infantiles mais qui a été l'objet de polémiques.
Le vaccin contre la rougeole est apparu en France en 1963. Par la suite, il sera associé aux vaccins contre la rubéole et les oreillons. Il est connu alors sous le nom de ROR. À partir de 1986, il fait partie du calendrier vaccinal. On répertorie alors 331.000 cas de rougeole par an. En 2004, la couverture vaccinale s'est améliorée, on ne recense plus que 4.448 cas.
Mais en 1998, le vaccin ROR fait l'objet d'une vive polémique en Grande-Bretagne. Le médecin britannique Andrew Wakefield publie une étude dans The Lancet, montrant un lien possible entre le vaccin ROR et l'autisme. Résultat, les parents prennent peur et ne font plus vacciner leurs enfants. En 2010, un journaliste démontre que les données à l'origine de cet article sont falsifiées. Le Lancet le retire alors de ses publications. "Concernant le rapport entre ROR et autisme, il a été démontré qu'il s'agissait d'une escroquerie. C'était totalement faux. Et cette étude avait été publiée dans le Lancet, et le Lancet a bien évidemment publié un démenti mais il était trop tard. Le mal est fait", explique le Dr Liliane Grangeot-Keros, secrétaire générale adjoint de l'Académie nationale de pharmacie.
Selon le Pr Emmanuel Grimprel, pédiatre-infectiologue, "une rumeur ou une simple publication peut faire du mal à une population entière parce que pendant toutes ces années, où la rougeole est réapparue en Angleterre, les complications aussi. Des décès, des complications neurologiques de rougeole sont réapparus malheureusement dans ce pays car on ne vaccinait quasiment plus pendant cette période qui a été relativement longue".
Aujourd'hui, les vaccinations en Angleterre sont revenues à la normale. La France, elle, sera peu touchée par cette polémique. Pour autant, la couverture vaccinale n'est pas totale, et une épidémie de rougeole est toujours possible. En France, la dernière en date a lieu entre 2008 et 2012. Bilan : plus de 24.000 personnes touchées, 1.000 pneumopathies graves, 32 complications neurologiques, 10 décès.
"Cette épidémie s'est ensuite calmée", confie le Dr Grimprel, "mais on sait qu'a priori elle risque de revenir dans quelques années. Demain, dans un an, dans cinq ans… on ne sait pas. Mais si nous n'avons pas réglé le problème de la protection de notre population vis-à-vis de la rougeole, avec un virus aussi contagieux, il n'y a pas de raison qu'il n'y ait pas d'autres épidémies dans le futur", prévient ce pédiatre-infectiologue. À l'avenir, l'objectif est de s'assurer que les enfants reçoivent les deux doses de vaccin recommandées et que tous les adultes non protégés soient vaccinés.
Vaccins et aluminium : la grande inquiétude
Depuis quelques années, l'aluminium présent comme adjuvant dans les vaccins inquiète. Il serait effectivement à l'origine de la myofasciite à macrophages, une maladie rare qui se caractérise notamment par des douleurs musculaires intenses et une grande fatigue chronique.
L'adjuvant à base de sels d'aluminium est utilisé depuis les années 1920 pour renforcer la réponse immunitaire. Il est présent dans 36 vaccins aujourd'hui. Problème : il serait bio persistant, c'est-à-dire présent pendant plusieurs années dans le corps. Pour le Pr Romain Gherardi, directeur de recherche Inserm, il y a un risque : "Chez certains patients, c'est 12-14 ans de persistance. C'est donc forcément indésirable. Le problème, c'est qu'on s'en est aperçu très longtemps après la mise sur le marché de ce produit. Si on devait introduire ce produit sur le marché aujourd'hui, il est certain qu'il ne serait pas accepté sur ce simple fait. Mais comme on l'utilisait déjà antérieurement, on est dans la phase inconfortable de comprendre aujourd'hui quelque chose qu'on n'avait pas compris au départ et qui pose un problème".
Cette persistance d'aluminium dans le corps pourrait expliquer les symptômes des patients souffrant de myofasciite à macrophages. Une maladie rare qui entraîne fatigue, douleurs et troubles cognitifs. Dans une unité de l'Inserm, on a en effet découvert que l'aluminium injecté à des souris pouvait migrer dans les ganglions lymphatiques, le foie, la rate mais aussi dans le cerveau.
Pour l'instant, cette étude n'est valable que sur les souris. Chez l'humain, la présence d'aluminium n'a jamais été démontrée dans le cerveau mais seulement au point d'injection. Par ailleurs, pour l'Académie de médecine, aucun lien de cause à effet n'a été directement établi entre l'aluminium et la maladie.
L'Académie de pharmacie s'est emparée à son tour de cette question. Pour sa secrétaire générale adjointe, ces études soulèvent de nombreuses questions : "On ne rapporte pas véritablement ce syndrome chez les enfants (…) c'est surtout chez les adultes d'un certain âge, souvent les femmes. Avant d'établir un lien entre le vaccin avec adjuvant et les symptômes ressentis, il y a encore beaucoup de travail à faire".
Pour l'instant, il n'y a pas de consensus scientifique sur la toxicité des sels d'aluminium utilisés comme adjuvant. Actuellement, de nombreuses études sont en cours, les résultats seront connus d'ici 2016.
Vaccin contre l'hépatite B : la fin d'une polémique
Après 17 ans de polémique, la justice a tranché. Elle a prononcé en mars 2016 un non-lieu dans l'enquête sur le vaccin contre l'hépatite B mis en cause dans l'apparition de certaines maladies neurologiques.
Le virus de l'hépatite B est extrêmement contagieux. L'hépatite B est une des maladies infectieuses la plus fréquente au monde. Elle touche environ 350 millions de personnes, principalement en Afrique et en Asie mais aussi en Europe. "En France, on considère qu'il y a environ 300.000 personnes atteintes d'hépatite B, ce qui est considérable. On peut dire que 50 à 60.000 personnes ont un risque de complications mortelles, insuffisance hépatique ou cancer", explique le Pr Patrick Marcellin, hépatologue.
Et c'est près de 1.500 personnes qui meurent chaque année des suites de ces complications. Pourtant la maladie peut être évitée grâce à la vaccination. Grâce à une campagne de vaccination lancée en 1994, en à peine quatre ans, vingt millions de personnes sont vaccinées, principalement des enfants et des adolescents. Quelques-uns vont déclarer dans les mois suivants une maladie neurologique. La polémique est alors lancée.
En 1998, une enquête judiciaire est ouverte juste après la mort d'une fillette de 11 ans. Trois anciens responsables des laboratoires commercialisant le vaccin sont alors mis en examen. Au fil des années, les études scientifiques se succèdent. En mars 2016, après 17 ans de procédure, la justice conclut à l'absence de causalité certaine entre la vaccination et l'apparition de ces maladies. "Ce jugement et l'ensemble de la littérature internationale nous disent que les personnes vaccinées n'ont pas plus de risque de développer ces maladies que les personnes non vaccinées. Il n'y a pas de relation entre l'administration du vaccin et la survenue de la maladie, qui serait survenue de toute façon chez ces personnes", note le Pr Robert Cohen, pédiatre.
Ces 17 ans de polémique ont sérieusement terni l'image du vaccin. Aujourd'hui, seuls 30 à 40% des 11-20 ans sont vaccinés contre l'hépatite B et en dix ans, le nombre de personnes contaminées a presque doublé. Alors pour enrayer de nouvelles contaminations, mieux vaut se faire vacciner et pour cela, il n'y a pas d'âge comme le confirme le Pr Marcellin : "Il n'est jamais trop tard parce que le vaccin est toujours efficace. L'efficacité quand on a 50 ans est de l'ordre de 90%. Alors que quand on a 5 ans, elle est de l'ordre de 100%. Mais la vaccination est toujours très efficace. C'est une des vaccinations les plus efficaces en terme de protection".
Aujourd'hui, la confiance dans le vaccin reprend peu à peu. Près de 95% des nouveau-nés sont vaccinés dans leur premier mois de vie et un tiers des médecins généralistes propose un rattrapage systématique aux adolescents non vaccinés.