Interdiction du glyphosate : "le principe de précaution devrait s'appliquer"
Plus d'1,3 million d'Européens ont signé la pétition de Greenpeace pour l'interdiction du glyphosate. Cet herbicide, principe actif du RoundUp de Monsanto, a été classé comme "cancérogène probable" par l'OMS.
Mercredi 25 octobre, l’Union européenne se prononcera sur le renouvellement de l'autorisation du glyphosate. Initialement, la Commission voulait proposer un prolongement pour dix ans. Finalement, la durée de l'autorisation se situera entre cinq et sept ans. Depuis plusieurs mois, le glyphosate est l'objet d'âpres discussions au niveau européen. D'un côté, les industries de la chimie militent pour prolonger l'autorisation du glyphosate. De l'autre, les associations environnementales, Greenpeace en tête, multiplient les appels pour bannir la substance d'Europe. Nouvelle étape ce matin : le Parlement européen vient de voter une interdiction progressive. Entretien avec Suzanne Dalle, chargée de campagne Agriculture chez Greenpeace.
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- Etes-vous rassurée par l’interdiction progressive du glyphosate votée ce matin ?
S. Dalle : "C’est de bon augure. Mais, le Parlement avait déjà demandé que l’autorisation ne dépasse pas les 7 ans. La Commission n’avait pas respecté cette demande car elle était partie sur une proposition de renouvellement pour 10 ans. Il va vraiment falloir attendre de voir ce qui se passe demain. Là, on est dans une véritable saga. Ça fait des années que ça dure. On sait très bien que, derrière, les lobbies jouent un rôle énorme."
- Quels sont les risques pour la santé du glyphosate ?
S. Dalle : "L’Organisation Mondiale de la Santé a montré que le glyphosate est « probablement cancérigène » pour l’homme. On a des éléments tangibles pour les animaux. Pour l’homme, on est capable de le classer comme « probablement cancérigène ». A partir de ce moment-là, c’est le principe de précaution qui devrait s’appliquer. On n’a pas à être des cobayes. Il y a de vrais risques pour la santé, d’autant plus que ce produit est très utilisé et qu’on le retrouve partout dans le monde. On y est exposé par ce qu’on mange, l’eau qu’on boit, l’air qu’on respire…"
- Pourquoi la communauté scientifique n’arrive-t-elle pas à se mettre d’accord sur les risques pour la santé de ce produit ?
S. Dalle : "Ça soulève la question de la procédure d’évaluation des risques à l’échelle européenne. On demande que cette procédure d’évaluation soit révisée. C’est aussi une des demandes portées par la pétition qui a été signée par plus d’un million de citoyens. Aujourd’hui, quand la Commission européenne fait cette évaluation des risques, elle prend en compte principalement les études qui sont faites par les industriels. Cela nous pose problème que cela soit Monsanto qui donne les études à la Commission pour dire si oui ou non son produit est dangereux. Ce n’est absolument pas normal. A l’inverse, l’OMS s’est basée sur des études publiques qui ne venaient pas des industriels."
- Le vote sur le glyphosate a été repoussé plusieurs fois. Est-ce selon vous le signe d’une intervention des lobbies de l’industrie chimique ?
S. Dalle : "Le vote est repoussé car la Commission européenne ne veut pas avoir la responsabilité d’autoriser ou d’interdire le glyphosate. Elle est donc obligée d’obtenir une majorité qualifiée mais elle n’arrive pas à l’obtenir. La Commission restait sur une proposition de renouvellement pour 10 ans à cause de lobbies qui sont ultra présents. On a parlé des Monsanto Papers. Maintenant, on a énormément d’éléments pour montrer que, depuis des années, Monsanto fabrique des éléments scientifiques sur le glyphosate."
- Les industriels de la chimie ont lancé un site sur les perturbateurs endocriniens. Ils promettent une information équilibrée. Avez-vous vu ce site ? Qu'en pensez-vous ?
S. Dalle : "C’est clairement une bataille d’informations. Je pense qu’on ne se bat pas à armes égales. Ils revendiquent la transparence. Très bien, c’est aussi ce qu’on demande dans la pétition. Ils pourraient très bien rendre publiques toutes les études qu’ils font. Ce n’est pas le cas aujourd’hui. Il faut vraiment faire la transparence, pas simplement un site et quelques éléments de langage."