Quand Alzheimer épargne la mémoire
L'hippocampe est une zone du cerveau nécessaire à la formation des nouveaux souvenirs. Dans certains cas, les lésions qui définissent la maladie d'Alzheimer épargnent cette structure - et donc la mémoire des malades. Le dernier congrès de l'Académie américaine de neurologie, qui s'est achevé le 1er mai 2014 à Philadelphie, a offert l'occasion à plusieurs équipes de chercheurs de mettre en avant ces formes atypiques de la pathologie, qui concerneraient environ un patient traité sur dix.
La maladie d'Alzheimer (MA), causée par le développement de lésions spécifiques dans le cerveau, se caractérise sur le plan clinique par des troubles cognitifs et du comportement qui interférent peu à peu avec les activités quotidiennes du patient, entraînant un état de dépendance.
Les troubles cognitifs les plus fréquents sont des troubles de la mémoire épisodique, du langage, de la motricité et de la perception de l'espace. Toutefois, la mémoire du patient reste intacte dans plus de 10% des cas avérés de maladie.
Différents marqueurs biologiques associés à la formation des lésions cérébrales permettent toutefois de confirmer que l'apparition des autres symptômes est bien associée à une MA.
Lorsque les lésions touchent prioritairement l'arrière du cortex cérébral, celui-ci s'atrophie, et certaines fonctions visuelles sont peu à peu lésées. On parle alors d'atrophie corticale postérieure (ACP), ou de syndrome de Benson – du nom du médecin qui a le premier décrit cette pathologie en 1988. Les premiers symptômes de l'ACP sont des difficultés à lire, des difficultés à percevoir la profondeur ou une vision floue. Cette forme de la maladie d'Alzheimer touche prioritairement des patients jeunes.
Une deuxième forme atypique de maladie touche les lobes temporaux du cerveau – structures qui jouent un rôle essentiel dans le traitement du langage. Ces lésions entraînent des difficultés à répéter les phrases et à trouver ses mots (on parle de "logopénie"). Ces troubles du langage (aphasie) s'étendent peu à peu. Cette forme est connue sous le nom d'aphasie progressive de type logopénique.
Une troisième forme atypique de MA est caractérisée par une atteinte des lobes frontaux, où se régulent le comportement et le jugement. La maladie se manifeste par une importante désinhibition sociale, des accès de colère et/ou une profonde apathie. Cette "variante frontale de la maladie d'Alzheimer", touche principalement des patients âgés.
"Ce qui est tragique, c'est que ces patients sont souvent mal [ou tardivement] diagnostiqués", expliquait au dernier congrès de l'Académie américaine de neurologie la chercheuse Melissa Murray. "[Or], de nouvelles preuves suggèrent des médicaments actuellement sur le marché pourraient mieux fonctionner chez [ces patients] que ceux atteints de la forme commune de la maladie."
Pour l'heure, il n'existe aucun traitement à la maladie d'Alzheimer. Certains protocoles de soins permettent néanmoins de ralentir la progression des symptômes.
Sources :
- Posterior Cortical Atrophy: Review of the Recent Literature. F-X. Borruat. Neuro-Ophthalmology, octobre 2013. doi:10.1007/s11910-013-0406-8.
- Frontal presentation of Alzheimer's disease. L.C de Souza et coll. Dement Neuropsychol, mars 2013.
- Vers une nouvelle définition de la maladie d'Alzheimer. B. Dubois, Bull. Acad. Natle Méd., 2012, 197, n°1, 143-156