Bisexualité : une identité sexuelle à part

À partir de quel moment une personne se définit-elle comme bisexuel(le) ? La réponse est beaucoup moins simple qu’il n’y paraît, comme le démontre une nouvelle étude de l’Ined, basée sur des données collectées en 2015 auprès de 27 268 adultes de toutes orientations sexuelles.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Bisexualité : une identité sexuelle à part

Pour certaines personnes, le simple fait de ressentir de l’attirance pour des hommes et pour des femmes les amène à se définir comme "bi", quand bien même ils n’auraient pas eu de relations sexuelles avec des hommes et des femmes. Seuls 2,2% des femmes et 1,6% des hommes interrogés ont déjà eu des relations avec partenaires des deux sexes, alors que respectivement 3,4% et 2,0% se considèrent "bi".

Toutefois, on peut être attiré, voire même avoir des relations sexuelles avec des hommes et des femmes, sans s’identifier comme bisexuel. Parmi les personnes attirées par les deux sexes, 65 % des femmes et de 45 % des hommes se définissent comme hétérosexuels. Parmi celles qui ont eu des partenaires des deux sexes, la moitié des femmes et un tiers des hommes se déclarent "hétéro".

Selon les chercheurs, ces données montrent que les définitions classiques de la bisexualité ne rendent pas compte "des différences de valeur que les individus donnent à leurs expériences sexuelles".

Se définir bisexuel : des différences "genrées" très marquées

Pour expliquer la part importante de femmes aux pratiques bisexuelles attachées à une identité "hétéro", les chercheurs émettent l’hypothèse que "se dire bisexuel implique une affirmation de ses désirs [qui est] peut-être plus facilement admise pour les hommes". Mais d’autres différences profondes entre bisexuelles et bisexuels apparaissent dans l’étude.

Parmi les répondantes à l’enquête de 2015, près de la moitié des femmes se déclarant bisexuelles avaient moins de 30 ans. Selon les auteurs, ce fait pourrait traduire "un accroissement de l’autonomie sexuelle féminine" dans les nouvelles générations, mais aussi le poids de l’idée reçue de la bisexualité comme "une sexualité transitoire" sur les représentations qu’ont les femmes de leur identité.

Le profil des hommes bisexuels apparaît très différent : "plus de la moitié d’entre eux ont plus de 50 ans", constatent les chercheurs. "On peut faire l’hypothèse que dans certaines générations masculines et dans certains milieux sociaux, l’identification bisexuelle pouvait être plus facile que l’identification homosexuelle."

Voir également : Bisexualité, l'attirance envers les deux sexes

Ouvrir sa sexualité aux personnes de même sexe

Fait surprenant : 11% des hommes et 24% des femmes se déclarant bisexuel(le)s n’ont pas expérimenté de relations sexuelles avec les deux sexes. Les chercheurs constatent en outre que 12 % des hommes se déclarant bisexuels "se disent attirés uniquement par le sexe opposé". "Se dire bisexuel ne signifie donc pas nécessairement une attirance indifférenciée pour les deux sexes". Du point de vue des relations sexuelles, les personnes se définissant comme bisexuelles interagissent majoritairement avec des personnes de l’autre sexe.

Se définir comme bisexuels traduirait moins, pour une part importante des personnes interrogées, "une indifférence au genre des partenaires sexuels ou conjugaux" qu’un désir d’élargir "aux personnes de même sexe" une sexualité "dont les personnes de l’autre sexe sont le centre".

"Se dire bisexuel peut […] être considéré comme une manière spécifique de faire une place à certaines attirances et à certaines pratiques sexuelles dans la définition de soi", résument les auteurs. "Cette identification peut varier au cours de la vie, mais elle peut être maintenue par des individus qui n’ont plus de rapports sexuels qu’avec un seul sexe et même s’affirmer avec l’avancée en âge".

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