Ejaculation précoce : des prédispositions biologiques ?
Souvent considérée comme un trouble d'ordre exclusivement psychologique, l'éjaculation précoce pourrait, dans certains cas, être d'origine physiologique. C'est ce que pense le Dr Pierre Desvaux, andrologue et sexologue. Entretien.
- La plupart des médecins s'accordent à dire que l'éjaculation précoce se joue avant tout dans la tête. Pas vous ?
Dr Pierre Desvaux : "Disons que ceux qui, comme moi, pensent qu'il existe des prédispositions biologiques à ne pas négliger, se font encore rares. Mais il y en a. Le problème, c'est que la plupart des théories sur la question datent des années 1960 et 70. Or en 50 ans, des choses ont changé et il serait grand temps de faire quelques mises à jour."
- Cela signifie-t-il que tous les hommes ne sont pas biologiquement égaux face à l'éjaculation précoce ?
Dr Pierre Desvaux : "Absolument. Si environ 30 % des jeunes hommes souffrent de ce trouble, on estime aujourd'hui que près de 10 % présenteraient une vulnérabilité génétique à ce niveau-là. Je ne compte plus le nombre de patients qui me disent : Docteur, j'ai tout fait pour essayer de me détendre, de me relaxer, mais ça ne marche pas, j'ai toujours été éjaculateur précoce. Comment peut-on encore croire que tout n'est qu'affaire de mental ?"
- Quelle place occupe alors la dimension psychologique dans votre approche ?
Dr Pierre Desvaux : "Bien entendu je ne la minimise pas. Elle est très importante, et même chez ceux qui sont prédisposés biologiquement, il est clair que le problème devient secondairement psychologique, a fortiori dans une société où le sexe a pris une place considérable, et où la recherche de performance est devenue une obsession et une source d'angoisse pour beaucoup d'hommes."
- Est-il possible de distinguer les éjaculateurs précoces selon qu'ils sont, ou non, prédisposés ?
Dr Pierre Desvaux : "Je le pense. Nous avons généralement deux types de patients. D'une part, ceux qui éjaculent au bout d'une, deux, voire trois minutes après le début du coït. Ceux-là ont déjà un bon début de contrôle et d'importants progrès peuvent être envisagés dans des délais raisonnables. Et d'un autre côté, il y a ceux qui ne parviennent même pas à tenir jusqu'à la pénétration, ou qui dans le meilleur des cas, vont résister à deux ou trois va-et-vient. Chez ces patients, il me semble qu'on peut deviner une fragilité biologique qui rendra la guérison plus compliquée, plus longue."
- Les solutions préconisées diffèrent-elles entre ces deux types de patients ?
Dr Pierre Desvaux : "Pour les premiers, le recours à des exercices sexocorporels pourra donner des résultats assez rapides. Pour les autres, il faudra parfois passer par la prescription de médicaments, comme des pommades anesthésiantes ou des antidépresseurs, qui ralentiront considérablement le processus, et leur permettront de retrouver peu à peu une entente sexuelle avec leur partenaire. Par la suite, ils devront se libérer peu à peu des traitements pour faire fructifier leurs progrès avec l'apprentissage de techniques et de gestuelles particulières."
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