Qualité de l'air : prévoir demain pour agir aujourd'hui
Depuis la canicule de 2003 où les concentrations d'ozone avaient explosé, ce qui avait eu de lourdes conséquences sanitaires, le gouvernement s'intéresse de près à la surveillance de la qualité de l'air. Mis en place après la canicule, le programme Prév'Air est un outil qui permet de faire des prévisions précises de l'air que nous allons respirer à J +2, et donc d'alerter les populations sur un éventuel pic de pollution. Mais désormais, les scientifiques vont plus loin puisqu'ils s'intéressent à la qualité de l'air que nous respirerons en 2050.
Les polluants avancent masqués et pour les détecter, il faut se rendre dans une station spécialisée. En France, il existe près de 700 stations de mesure qui enregistrent toutes les dix secondes une dizaine de polluants différents. Des données que les scientifiques observent à la loupe. Des formules mathématiques complexes qui leur permettent de prévoir la qualité de l'air d'après-demain comme l'explique Frédérik Meleux, ingénieur en modélisation atmosphérique de l'Institut National de l'EnviRonnement Industriel et des RisqueS (INERIS) : "Il faut prendre en compte les conditions météorologiques et les émissions, donc le trafic automobile, les rejets industriels, les activités agricoles et tout ce qui est apporté des pays environnants puisqu'on va aussi subir la pollution à longue distance".
Cette surveillance est efficace. Depuis dix ans que le programme national Prev'Air a été mis en place, les prévisions sont plutôt fiables. Des prévisions à J +2 dont les politiques ne se passent plus. Mais pour Augustin Colette, ingénieur en modélisation atmosphérique, la qualité de l'air d'après-demain c'est déjà dépassé. Lui s'intéresse aux polluants que nous respirerons en 2050. Augustin Colette doit maîtriser des milliers de chiffres et des codes, des formules mathématiques qui sont en quelque sorte des paramètres d'ajustement. Ils sont tellement nombreux que pour résoudre son équation climatique, il a dû faire appel à un super calculateur, celui du centre d'énergie atomique, l'un des plus gros ordinateurs du monde qui a eu besoin de six mois pour faire le calcul.
Selon les prévisions d'Augustin Colette, deux futurs possibles sont envisagés aujourd'hui en termes de politique climatique : "soit on reste sur une absence de politique ambitieuse et donc on va continuer à augmenter la consommation d'énergie, à reposer sur des énergies fossiles… soit on consomme moins d'énergie et il y aura moins d'émission de gaz à effet de serre, la part des énergies fossiles sera plus réduite. Les effets seront alors bénéfiques sur le climat". Ces projections représentent deux futurs possibles et il convient de décider dès aujourd'hui de mettre en place des politiques climatiques pour atteindre les objectifs fixés.
Ces scientifiques doivent donc aussi exceller dans l'art du compromis pour convaincre les politiques. "Les politiques vont appréhender ces données, vont étudier leur faisabilité en termes économique, financier, en termes d'évolution sociétale. Ils vont fixer eux-mêmes des objectifs et nous scientifiques, allons essayer d'évaluer l'impact de ces compromis politiques. Et petit à petit, on converge vers une sorte de compromis entre les émissions que l'on est obligé d'émettre du fait de nos activités de tous les jours et l'exposition des populations et des ecosystèmes", souligne Laurence Rouil, responsable du pôle modélisation environnementale à l'INERIS.
Pour les ingénieurs de l'INERIS, aucun doute : agir aujourd'hui sur la qualité de l'air au niveau européen, c'est aussi agir sur la qualité de l'air mondial en 2050, même si beaucoup de pays ne suivent pas notre exemple.
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