Viande de boeuf contaminée aux hormones : quels sont les risques pour la santé ?

Des résidus d'une hormone cancérogène et interdite en Europe ont été détectés dans de la viande bovine en provenance du Brésil, selon un rapport de la Commission européenne.

Mathis Thomas avec AFP
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Alimentation équilibrée : ce qu'il faut savoir pour manger sainement
Alimentation équilibrée : ce qu'il faut savoir pour manger sainement  —  Allo Docteurs - Newen Digital

De la viande de boeuf brésilienne contaminée aux hormones s'est-elle retrouvée dans nos assiettes ? L'association foodwatch a mis en lumière un audit publié par la Commission européenne en octobre dernier, qui révèle que le Brésil est incapable de garantir que le boeuf exporté massivement en Europe ne contient pas une hormone cancérogène : l'oestradiol 17-bêta.

"L'oestradiol est une hormone de croissance féminine utilisée dans l'industrie agro-alimentaire pour faire prendre de la masse en peu de temps aux génisses", nous explique le Docteur Jean-Michel Borys, endocrinologue et médecin nutritionniste. "Cette hormone naturelle permet aux vaches américaines de prendre 50 à 60 kg de plus que les bêtes du même âge élevées en France. D'où la colère actuelle des agriculteurs français suite à l'accord de libre-échange entre l'Union européenne et les pays du Mercosur."

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Quels dangers pour la santé des consommateurs ?

L'oestradiol se retrouve notamment dans les pilules contraceptives vendues en France. Est-ce donc sans danger d'en retrouver des résidus dans la viande importée des pays américains ? "L'oestradiol est cancérigène lorsqu'elle est ingérée à forte dose", note le Dr Borys. "Mais les pays américains et l'Union européenne se battent depuis plusieurs décennies pour distribuer ou bloquer la vente de viande d'animaux stimulés aux hormones. Les États-Unis ou le Canada par exemple, plaident qu'il n'y a pas d'étude d'ampleur pour prouver définitivement les dangers sur la santé humaine de l'oestradiol et d'autres hormones utilisées dans l'industrie agro-alimentaire.

Seule une étude scientifique de faible ampleur menée aux États-Unis et publiée en 2007 dans la revue Human Reproduction, révélait un lien entre une forte consommation de boeufs traités aux hormones par des femmes et des troubles de la fertilité chez leurs fils, des dizaines d'années plus tard.

En l'absence de recherches d'ampleur sur le sujet, l'endocrinologue conseille d'appliquer le principe de précaution, en particulier pour les catégories de population les plus fragiles. "L'oestradiol peut notamment altérer le développement pubertaire des enfants", précise le Dr Borys. "Cette hormone est également déconseillée aux personnes souffrant de certains cancers, comme le cancer de la prostate, ainsi qu'aux femmes enceintes, pour éviter tout risque dans le développement du foetus, en particulier de ses organes sexuels."

Une hormone interdite dans l'Union européenne

Selon l'audit de la Commission européenne mené au printemps, "les procédures actuelles mises en place pour garantir que le bétail dont la viande est destinée au marché de l'UE n'a jamais été traité avec de l'oestradiol 17-bêta à des fins zootechniques ou thérapeutiques, sont inefficientes". En particulier, "l'autorité compétente (brésilienne) ne peut pas garantir la fiabilité des déclarations sous serment des opérateurs" sur ce sujet, ajoute le "rapport final", révélé par Le Parisien. Cet audit visait à "évaluer les contrôles sur les résidus de substances pharmacologiquement actives, pesticides et contaminantes dans les animaux et produits d'origine animale" au Brésil. 

Sa publication intervient alors que la conclusion, peut-être très prochaine, d'un accord de libre-échange entre l'UE et les cinq pays du Mercosur (dont le Brésil) suscite une vive opposition notamment des agriculteurs, qui craignent la concurrence de certains produits venus d'Amérique latine, en particulier la viande bovine. Selon une source à la Commission européenne, des représentants de la direction Santé de l'UE sont allés au Brésil et "ont trouvé certaines défaillances dans le système de contrôle des autorités brésiliennes notamment en ce qui concernait les génisses".

Pour Karine Jacquemart, directrice de l'ONG foodwatch, "ce rapport d’audit montre qu’on a potentiellement consommé de la viande brésilienne de bœuf aux hormones entrée frauduleusement en Europe depuis des années. Les standards brésiliens exposent les consommateurs européens à un risque pour la santé. C’est un triple scandale : risque sanitaire, fraudes alimentaires et risques liés à l’accord UE-Mercosur". L'UE interdit l'utilisation d'hormones dont l'oestradiol, destinées à stimuler la croissance des animaux d'élevage, pour ses États membres comme pour les importations en provenance de pays tiers.