Seniors : une sexualité encore difficile à assumer
"Ce n'est pas vrai que la libido s'arrête à la ménopause, j'ai 73 ans et avec mon mari, cela continue à faire partie de notre vie !" Vous êtes nombreux et surtout nombreuses, à faire part de votre expérience... mais à condition de rester anonyme, tant les tabous persistent autour de la sexualité des seniors.
Une sexualité en mouvement
"J'ai 93 ans et j'ai toujours des besoins physiques… que je satisfais moi-même alors que je n'aurais pas osé avant". "J'ai 82 ans, je suis veuve et les rapports me manquent terriblement mais quand j'ai essayé d'en parler à mes enfants, ils ont trouvé ça déplacé." La libido des seniors est bien présente, mais encore trop taboue pour oser en parler.
Notre équipe a rencontré Jean, qui accorde une place primordiale à un entretien intelligent de ses capacités physiques. Ancien kinésithérapeute et coach sportif, il anime d'ailleurs encore des stages bien qu'il ait largement dépassé l'âge officiel de la retraite.
Un désir sexuel encore bien présent
Elle s'appelle Thérèse Clerc. À 84 ans, cette militante féministe parle très librement de sa sexualité.
L'amour en maison de retraite
En 1652, Blaise Pascal écrivait : "L'amour n'a point d'âge, il est toujours naissant". Près de quatre siècles plus tard, ce constat n'est toujours pas démenti. Entre 2005 et 2009, alors que le nombre de mariages a baissé de 10%, les unions entre personnes de plus de 60 ans ont, elles, augmenté de 17%. Sur les sites de rencontre en ligne, le pourcentage d'abonnés du troisième âge ne cesse d'augmenter.
Les seniors vivent plus longtemps et en meilleure santé. Et dans cette nouvelle vie, l'amour prend toute sa place. La sexualité aussi. À 75 ans, 69% des hommes et 43% des femmes ont une vie sexuelle. Une bonne nouvelle pour leur santé car l'activité sexuelle augmente la longévité et préserve de certaines maladies. Pourtant, en 2013, les amours de personnes restent un véritable tabou.
En maison de retraite, les seniors se retrouvent souvent seuls, alors que le besoin d'amour est d'autant plus fort chez les personnes âgées. Comment gérer alors l'intimité du grand âge en institution ? Dans trois établissements à Guipavas, en Bretagne, une formation de grande ampleur sur le sujet a été lancée.
Pour lever le tabou de l'intimité des personnes âgées en institution, le personnel de ces trois établissements bénéficie d'une formation de grande ampleur sur la question. Objectif : sensibiliser le personnel au droit à l'intimité et à la sexualité des personnes âgées dépendantes. L'amour, le désir, la libido à plus de 70 ans… Des chapitres absents de la formation initiale de ces soignants. Un regard qui doit changer pour une meilleure prise en charge.
IST : les seniors ne sont pas épargnés
Les seniors ont des comportements sexuels à risque. C'est ce qu'a montré une récente étude de la Société française de dermatologie. Un héritage probable des mouvements hippies et de la liberté sexuelle qui en a découlé. Avec pour conséquence une flambée des IST, les infections sexuellement transmises comme les blennorragies, la syphilis... mais aussi des infections plus graves dues à des virus comme ceux des hépatites ou du sida, le VIH.
Avoir des rapports sexuels sans protection augmente les risques d'exposition aux IST. Les seniors n'échappent donc pas à la règle. Pourtant ils se protègent moins que la moyenne.
On pense souvent que la jeunesse a le monopole de l'insouciance, du désir et du sexe. Mais les seniors ne font pas que valser, ils ont une vie sexuelle et ils le clament. Mais ils avouent aussi ne pas toujours être très sérieux.
Selon une étude française réalisée dans des centres de dépistage anonyme parisiens, les plus de 65 ans utiliseraient moins fréquemment le préservatif lors d'un rapport occasionnel que les autres classes d'âge. 70% des femmes et 23% des hommes déclarent ne pas utiliser de préservatif.
Mais pour quelles raisons les seniors sont-ils moins prudents ? Selon le Dr Laurent Fonquernie, du service des maladies infectieuses et tropicales de l'hôpital Saint-Antoine : "Les seniors ont parfois le sentiment de ne pas être concernés et ne pas être exposés à risque car ils sont les héritiers d'une génération venue des années 60 où le sujet n'était pas abordé. Ils ne se sentent pas vraiment concernés par le préservatif ou par un risque sexuel potentiel et les femmes ne sont plus exposées à la grossesse donc ils n'utilisent plus le préservatif comme moyen de prévention et de contraception". Pourtant, le risque est bien réel.
Le sujet des risques sexuels avec des patients de plus de 50 ans est peu, voire pas abordé, en France. Aux Etats-Unis, en revanche, les campagnes de prévention misent sur l'humour pour convaincre les seniors de porter des préservatifs. En France, les campagnes de prévention s'adressent principalement aux jeunes mais peu aux seniors.
Pourtant tout le monde a le droit à une vie sexuelle épanouissante, il est donc urgent de proposer aux seniors de manière plus systématique des préservatifs et des dépistages.
Syndrome génito-urinaire : osez en parler
Plusieurs années après la ménopause, la muqueuse utérine devient plus fine et se déshydrate. Elle peut devenir douloureuse au moindre frottement, notamment lors des rapports sexuels. 30% des femmes seraient concernées. Un chiffre sous-estimé car les femmes n'osent pas en parler.
Pour tenter de sortir du cercle vicieux de la douleur, en plus des traitements classiques (gel, crème, ovules…) qui permettent de réhydrater la muqueuse vaginale, un traitement complémentaire peut être proposé aux patientes : des injections d'acide hyaluronique.
L'acide hyaluronique est une molécule naturellement présente dans la peau et les muqueuses. Sa capacité à retenir l'eau peut donc améliorer l'hydratation du vagin. L'effet de l'acide hyaluronique n'est pas immédiat. La patiente doit revoir son médecin six à huit semaines après l'injection afin d'évaluer l'action du traitement.