Le médecin de Vincent Lambert réagit à la décision du Conseil d'Etat
Le Conseil d'Etat a ordonné la conduite une nouvelle expertise médicale sur le cas de Vincent Lambert, assurant qu'il se prononcerait "avant l'été". Nous avons recueilli la réaction du Dr Eric Kariger, chef du service de soins palliatifs (CHU de Reims) et médecin de Vincent Lambert.
- Le Conseil d'Etat a annoncé qu'il statuerait sur la fin de vie de Vincent Lambert "avant l'été". Ce délai peut sembler très long… Les juges ont-il pu repousser leur décision dans l'espoir que Vincent s'éteigne de lui-même, leur permettant de se défausser d'un jugement ?
Dr Eric Kariger : "Je crois qu'il ne faut voir aucune malice dans cette décision. Bien sûr, dans un délai de deux mois, tout peut arriver. Mais le contexte est très particulier.
"Le cas de Vincent Lambert est une situation exceptionnelle, tant de par la violence de ce qui se joue au niveau familial que de par sa médiatisation. La décision rajoute deux mois à une histoire extrêmement douloureuse, mais c'est une durée finalement assez courte, au regard des cinq ans qui se sont déjà écoulés.
"Le Conseil d'Etat va nommer trois experts médicaux en neurosciences, qui procéderont à tous les examens nécessaires, et seront des sommités incontestables. Peut-être iront-ils dans le sens des conclusions que nous avons formulées, peut-être disposeront-ils d'éléments nouveaux qui nous auraient échappé. Je me plierai, bien sûr, à l'avis de ces trois experts, quelles que soient leurs conclusions et leur décision, et je souhaite que les membres de la famille de Vincent, eux aussi, les acceptent."
- A titre personnel, comment vivez-vous cette décision ?
Dr Eric Kariger : "Je la vis avec sérénité. J'ai le plus profond respect pour la décision qui vient d'être rendue par le Conseil d'Etat, et par le travail extrêmement sérieux qui a été réalisé par les juges. D'ailleurs, le Conseil a formulé des conclusions très tranchées, et très franches, reconnaissant que nous avions mené la procédure dans le respect de la loi, que la loi Léonetti pouvait bien s'appliquer "à des patients, qui comme M. Vincent Lambert, ne sont pas en fin de vie", et "que l'alimentation et l'hydratation artificielle constitu[aie]nt, au sens de cette loi, un traitement qui [pouvait] être interrompu en cas d'obstination". Cela démontre que ce que l'on nomme désormais "l'affaire Vincent Lambert" a été l'occasion d'un bond dans la maturité sociétale sur ces questions de fin de vie."
"J'espère que la famille de Vincent respectera la décision que le Conseil rendra dans deux mois, à la lumière des trois avis supplémentaires qu'ils ont sollicités, et qu'après cela, cette famille pourra se reconstruire. Si ces deux mois peuvent permettre de résoudre cette situation, ce ne seront pas deux mois de perdus."
VOIR AUSSI :
- Vincent Lambert : le Conseil d'Etat pour une nouvelle expertise médicale, article mis à jour le 14 février 2014.
- Vincent Lambert : qu'est-ce qu'un état de conscience minimal ?, article du 13 février 2014.
- Fin de vie : le médecin de Vincent Lambert s'exprime, article du 13 février 2014.
- Fin de vie : arrêt des soins et prise en charge médicale, article du 13 février 2013.
- L'affaire Lambert relance le débat sur la fin de vie, article du 12 février 2014.
- Fin de vie : qui décide ?, dossier du 12 février 2014.
- Le sort de Vincent Lambert renvoyé devant une formation collégiale, article du 6 février 2014.
- L'épouse de Vincent Lambert fait appel devant le Conseil d'Etat, article du 28 janvier 2014.
- Vincent Lambert : le tribunal demande la poursuite des soins, article du 16 janvier 2014.
- Vincent Lambert : une décision ''inquiétante'' pour le Dr Devalois, article du 16 janvier 2014.
- Le cas de Vincent Lambert ''du ressort de la loi'' selon le député Leonetti, article du 15 janvier 2014.
- Fin de vie : nouvelle bataille autour du cas de Vincent Lambert, article du 14 janvier 2014.
Les trois médecins qui conduiront cette expertise médicale devront "se prononcer sur le caractère irréversible" des lésions cérébrales de Vincent Lambert et sur le pronostic clinique.
Ils devront déterminer "si ce patient est en mesure de communiquer, de quelque manière que ce soit, avec son entourage" et devront apprécier si les réactions éventuellement décelées "peuvent être interprétées comme un rejet de soins, une souffrance" ou, au contraire, comme "un souhait que ce traitement soit prolongé", a expliqué le Conseil d'Etat.
Ils "rendront leur rapport dans un délai de deux mois à compter de leur désignation".
(Source : AFP)