MSF : 40 ans de médecine humanitaire
Médecins sans frontières (MSF) fête aujourd'hui ses 40 ans. Devenue l'une des plus grandes organisations humanitaires médicales au monde, elle assure néanmoins vouloir rester fidèle à l'esprit de révolte et d'indépendance qui a présidé à sa création.
Interview de Rony Brauman, ancien président de MSF, invité du "Magazine de la santé", le 7 octobre 2011.
L'organisation a beaucoup changé au cours des 40 dernières années, reconnaît la présidente de MSF-France, Marie-Pierre Allié, mais "notre autonomie financière, grâce à nos millions de donateurs, nous permet de rester indépendant des pouvoirs", explique-t-elle.
A l'origine d'une aventure humanitaire
Le 21 décembre 1971, un groupe de médecins et de journalistes, horrifiés par la guerre du Biafra (1967-70), se lancent dans le volontariat médical organisé, pour secourir des victimes de conflits, de catastrophes naturelles et d'épidémies, en toute neutralité. Médecins sans frontières (MSF) est né.
En 1976, MSF assure sa première mission de guerre au Liban et professionnalise ses actions de secours, sur le plan médical, chirurgical, logistique.
Bernard Kouchner restera certainement le plus connu du public car le plus médiatique des treize fondateurs. Mais en 1979, l'opération "Un bateau pour le Vietnam" avec à son bord médecins et journalistes, provoque une violente polémique à l'origine d'une scission avec la direction de MSF qui estime l'intervention trop racoleuse. Bernard Kouchner quitte alors définitivement MSF et crée avec une quinzaine d'autres médecins l'organisation Médecins du monde en 1980.
Prix Nobel
Entre 1978 et 1982, on est passé de 3 à 11 millions de réfugiés dans le monde. Il a fallu organiser l'assistance, la fourniture en eau, en vivres, les soins médicaux, dans plusieurs pays à la fois, explique Rony Brauman, président de MSF de 1982 à 1994.
Parallèlement, les French Doctors s'illustrent par leurs coups de gueule contre les manipulations et dérives de l'humanitaire : dénonciation du détournement de l'aide en Ethiopie, du génocide au Rwanda, des bombardements de civils en Tchétchénie, appel à l'arrêt des fonds pour le tsunami en Thaïlance... L'association, reçoit le prix Nobel de la Paix 1999.
En France, MSF se bat pour la Couverture Maladie Universelle (CMU). Celle-ci concerne plus de 6 millions de personnes en situation précaire. La CMU entre en application en janvier 2000.
40 ans après, le défi reste le même
Depuis 40 ans, le défi reste le même : négocier un espace de travail pour aider les populations en gardant ses distances avec le pouvoir politique et les armées.
"L'argument de protection des populations civiles est fréquemment invoqué pour justifier l'entrée en guerre, comme pour la Libye", argumente Marie-Pierre Allié. "Il s'agit d'être clairement distincts des opérations militaires pour pouvoir soigner toutes les parties, renchérit le Dr Brauman", ancien président de MSF.
Aujourd'hui, l'association s'inquiète de la crise économique qui menace le financement du Fonds mondial (de lutte contre le sida), et donc les populations les plus fragiles, souligne la présidente de MSF-France, or le combat n'est pas fini.
L'ONG doit aussi s'adapter aux nouveaux défis : catastrophes écologiques, urbanisation massive, vieillissement... "Nous allons devoir répondre à l'avenir à une hausse des risques environnementaux, comme l'accident nucléaire de Fukushima ou la récente vague d'intoxications au plomb au Nigeria", fait valoir Marie-Pierre Allié.
Source : AFP
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