Site industriel de Lacq : quel impact sur la santé ?
Dans le bassin de Lacq (Pyrénées-Atlantiques), les habitants sont inquiets depuis qu'une association locale de protection de l'environnement a découvert une étude épidémiologique qui démontrait une surmortalité dans leur région. Les habitants vivent en effet à proximité d'un vaste complexe industriel spécialisé dans la pétrochimie. Est-ce la cause de cette surmortalité ? Explications.
"Le complexe de Lacq est le troisième complexe chimique de France. Et aujourd'hui encore, il y a plus de vingt usines SEVESO donc des établissements particulièrement dangereux et qui produisent de la chimie fine, de la chimie du soufre, des médicaments, des pesticides, de nombreux produits…", annonce Michel Rodes, secrétaire de l'association Sepanso.
Tout commence à la fin des années 1940. À cette époque, Lacq, petite commune des Pyrénées-Atlantiques n'est pas encore un complexe industriel spécialisé dans la chimie. Mais elle est à la pointe de l'industrie fossile. Une mine d'or pour la société nationale des pétroles d'Aquitaine, la SNPA. En forant, l'entreprise découvre une gigantesque poche de gaz naturel. Pendant des années, elle alimente les cuisinières de tous les Français. Le complexe industriel de Lacq se diversifie et tourne à plein régime, bien loin des préoccupations écologiques.
En 2014, la Sepanso, association locale de protection de la nature, découvre une étude réalisée par l'Institut de santé publique de la faculté de médecine de Bordeaux. Un rapport publié en 2002 dont elle n'avait jamais eu connaissance. Il compare la mortalité autour du bassin de Lacq à celle de la région Aquitaine entre 1968 et 1998. Les conclusions restent prudentes : "Cette méthodologie ne permet en aucun cas de dire que les émissions industrielles sont responsables de la surmortalité observée dans la zone exposée". Mais certains chiffres n'en demeurent pas moins préoccupants : "Lorsqu'on s'intéresse aux personnes âgées de moins de 65 ans, on observe une surmortalité dans la zone exposée de 14% par rapport à la zone témoin la plus éloignée soit environ 136 décès supplémentaires".
"Cette étude date de 2002 et elle porte sur les années 68 à 98. Que s'est-il passé depuis 17 ans ? Telle est la question. Est-ce que la courbe de surmortalité qui grimpait de 56% dans les dix dernières années a continué à monter ? Est-ce que de 136 morts, on est passés au double ?", s'interroge Michel Rodes. L'association dénonce surtout le manque de réaction des pouvoirs publics depuis 2002. Ce que conteste l'Agence régionale de santé directement visée : "Ce n'est pas que nous sommes restés sans rien faire, nous avons choisi une autre option qui était celle de l'évaluation des risques sanitaires qui a permis des avancées. Ce n'est pas rien de faire l'inventaire exhaustif de l'ensemble des polluants du bassin. Cet inventaire a permis de conclure qu'il y avait environ 140 molécules identifiées, analysées… Sur ces 140 molécules, je crois qu'il y en avait quatre qu'il fallait suivre de façon très pointue, d'avoir beaucoup de vigilance sur ces quatre molécules", se défend Maritxu Blanzaco, directrice de la délégation départementale de l'Agence régionale de santé (64).
Aujourd'hui, l'incidence de ces substances sur l'environnement n'est pas officiellement établie. Mais certains riverains craignent que les activités du site industriel reconverti dans la chimie nuisent à leur santé. À l'image des anciens agents de l'usine comme Michel Gachon plus directement exposés : "Je ne suis pas médecin, je ne suis pas chercheur, je ne peux dire que ce que j'ai pu constater mais je pense qu'il y a eu un impact direct sur la santé de certains agents. Aujourd'hui on compte parmi les nôtres, des amis malades qui ont travaillé sur le même secteur et qui développent les mêmes pathologies à savoir pour la plupart des cancers".
Pour savoir si oui ou non, la pollution industrielle est responsable de la surmortalité des riverains du bassin de Lacq, l'association demande qu'une nouvelle étude épidémiologique soit menée, ce qu'avait préconisé avant elle l'Institut national de veille sanitaire et la Cour des Comptes.