Retard de croissance intra utérin : l’expression des gènes du foetus serait impliquée
Une expression déséquilibrée de certains gènes du fœtus pourrait être à l’origine de deux syndromes de retard de croissance, des pathologies aux conséquences graves pour l’enfant à naître.
Un pas de plus dans la compréhension des retards de croissance intra utérins (RCIU). Cette pathologie, caractérisée par un petit poids de naissance et une importante morbidité néonatale, a fait l’objet d’une recherche dirigée par Irène Netchine, professeure de physiologie à Sorbonne Université et pédiatre à l’hôpital Armand-Trousseau AP-HP. Cette étude, publiée le 20 février 2019 dans la revue Science Advances, s’est focalisée sur deux syndromes à l’origine d’un RCIU : le syndrome de Temple et le syndrome de Silver Russell. Ces maladies aux conséquences graves pour le fœtus pourraient être régies par l’expression de certains gènes.
ADN maternel contre ADN paternel
En premier lieu, rappelons que chez tout individu, la moitié de l’ADN provient de la mère et l’autre moitié du père. Une personne possède donc deux copies de chaque gène : une copie maternelle et une copie paternelle, qui s’expriment généralement de façon équivalente. Mais ce n’est pas toujours le cas et parfois, une des deux copies s’exprime plus que l'autre (on dit que les gènes sont alors "soumis à empreinte parentale").
De tels déséquilibres peuvent être lourds de conséquence lorsqu'ils concernent des gènes impliqués dans la croissance du foetus. "Les gènes exprimés par la copie maternelle ont en effet tendance à restreindre la croissance du fœtus pour préserver ses propres réserves, alors que les gènes exprimés par la copie paternelle favorisent quant à eux la croissance fœtale pour assurer une descendance en bonne santé et transmettre ses gènes à la génération suivante" détaillent l’AP-HP et l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) dans un communiqué.
Manipuler l’expression des gènes pour traiter les RCIU ?
Pour les deux syndromes étudiés, les chercheurs ont réussi à identifier précisément les dysfonctionnements de l'activité de deux chromosomes fœtaux impliqués dans les syndromes de Temple et de Silver Russell. Mais leurs travaux pourraient aller plus loin: "Ces syndromes constituent des modèles intéressants pour comprendre de manière plus générale les pathologies de croissance fœtale" nous explique ainsi la professeure Irène Netchine.
"A plus long terme, on pourrait même imaginer des projets de recherche pour réprimer l’expression d’un gène d’ADN maternel ou à améliorer celle de l’ADN paternel." ajoute la professeure. La finalité serait, en quelque sorte, d'obtenir une certaine parité dans l'expression des gènes. "Mais pour le moment, ces scénarios relèvent encore de la science-fiction !" tempère cependant la scientifique.
En attendant, l'implication des gènes fœtaux et de leur expression contribue à redéfinir les origines possibles du RCIU, qui reste inexpliqué dans 30% des cas. Jusqu'à présent, les principaux facteurs identifiés concernent l'exposition de la mère à des toxiques comme le tabac, son hypertension artérielle ou une pathologie du placenta. Cette nouvelle étude montre qu'il peut être lié à des facteurs non-maternels.