Coma : le rythme cardiaque, nouvel indicateur de l'état de conscience ?
Le coeur pourrait être le porte-parole du cerveau pour distinguer un état de conscience minimal d'un état végétatif.
"Jusqu'à présent, pour évaluer le fonctionnement du cerveau, c'est lui qu'on examinait, résume Jacobo Sitt, chercheur à l'Inserm au sein de l'Institut du Cerveau et de la Moelle (ICM). Mais puisque le cerveau commande, notamment, le coeur, nous nous sommes intéressés à cette interaction." L'équipe qui comprend le Pr Lionel Naccache de l'Hôpital de la Pitié Salpêtrière (AP- HP) a ainsi mis au jour une nouvelle possibilité d'évaluer l'état de conscience de patients "éveillés" mais dans l'incapacité de s'exprimer et d'interagir explicitement. Ils ont publié les résultats de leur étude dans la revue Annals of Neurology.
"Le coeur peut dire si le cerveau perçoit le monde extérieur"
"Nous avons changé de perspective", explique Jacobo Sitt. "Nous avons cherché à savoir si le coeur peut "dire" si le cerveau perçoit le monde extérieur". Pour y parvenir, ils ont fait écouter des sons très réguliers à 127 patients âgés de 17 à 80 ans. Puis, ils ont introduit un changement, et ce changement a entraîné une accélération du rythme cardiaque uniquement chez les patients en état de conscience minimale. Avec au même moment, une modification de l’électroencéphalogramme (EEG) qui enregistrait le cerveau.
Pour les chercheurs, cette double réaction, inexistante en cas d'état végétatif, permet donc d'établir ce diagnostic crucial pour la prise en charge des patients et leur pronostic. Car "l'état de conscience multiplie par deux les chances de survie et détermine des décisions médicales majeures", poursuit le chercheur. "Mais aujourd'hui, il n'est possible de l'identifier par une IRM fonctionnelle (qui permet de visualiser l’activité du cerveau ndlr) que pour 25% des patients. Les autres sont trop fragiles pour être déplacés ou trop agités pour que l’imagerie soit lisible."
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Des nouveaux outils pour améliorer des diagnostics délicats
Ces obstacles disparaissent pour l’électrocardiogramme (ECG) qui peut être très facilement réalisé en posant de simples capteurs sur la peau. Le principe étant le même pour l’électroencéphalogramme, ces deux examens pourraient à l'avenir aider les médecins dans un grand nombre de situations. D’autant plus que l’étude a même montré l’existence d'une réaction du cerveau à l’accélération du cœur qu’il a "déclenchée" en entendant le bruit surprenant. “Il y a donc non seulement une conscience du monde extérieur mais aussi d’événements internes", explicite le Jacobo Sitt.
Ces nouveaux outils diagnostics disponibles partout pourraient apporter une information essentielle au coeur de situations extrêmes pour les médecins et les proches. Et ils permettront par exemple aux équipes soignantes de mieux identifier les patients pour lesquels la vigilance doit être renforcée lors des soins éventuellement douloureux. Une vigilance qui s'appuiera peut-être à l'avenir sur d'autres signes comme la respiration ou la dilatation des pupilles : les chercheurs poursuivent leur quête d'indices sur l'état de conscience du cerveau.