Alzheimer : comment inclure les patients dans la ville ?
Favoriser l'insertion des patients au sein de la ville et de ses habitants, c'est l'objectif de l'association France Alzheimer à l'occasion de la journée mondiale. Véronique Linarès, directrice de la communication, a répondu à nos questions.
La vie sociale des personnes touchées par la maladie d'Alzheimer et de leurs proches aidants est extrêmement fragilisée du fait de la maladie en, raison des forts préjugés qui l’entourent. Les personnes se voient encore largement réduites à leur statut de malade, à la parole disqualifiée, aux compétences oubliées alors qu'elles gardent de nombreuses capacités comme penser, réfléchir, ressentir, bouger, aimer !
Encore en France, il y a une idée enracinée qui veut que les personnes âgées ou celles atteintes de maladies neurodégénératives (NDLR : comme la maladie d'Alzheimer, de Parkinson, ou la sclérose en plaques) sont inutiles et non productives. Il en découle une grande peur d'être stigmatisées chez ces personnes et cette peur pousse à l’isolement !
France Alzheimer a donc réfléchi aux solutions pour qu'une personne malade puisse vivre heureuse dans son quartier, dans sa ville. Beaucoup n'osent plus faire les gestes du quotidien car elles sont plus lentes pour trouver le compte exact, pour poster une lettre, pour retirer de l'argent, dans ce monde qui va vite et où tout est automatisé et technique.
Une charte "Ville aidante Alzheimer"
Nous avons tissé un partenariat avec la gendarmerie et les sapeurs-pompiers pour les sensibiliser à la maladie d'Alzheimer pour faire face à des situations d'errance sur la voie publique chez les patients, qui sont alors dans un état de panique ou de désorientation importante. Les acteurs de terrain ont besoin d’être formés pour identifier les signes, savoir comment réagir et quels sont les comportements à bannir pour ne pas générer du stress, de la panique ou de l'agressivité. Nous allons donc organiser une formation.
Nous avons aussi effectué une démarche auprès des maires de France pour signer une charte "Ville aidante Alzheimer" à l'entrée des villes : les maires reconnaissent ainsi le statut de citoyens aux personnes atteintes de cette maladie, ils sont conscients de la vulnérabilité et de l'isolement de leurs administrés.
Les mairies avec les associations départementales France Alzheimer vont faciliter la connaissance de la maladie avec certaines démarches : sensibilisation, formation gratuite sur la maladie pour les aidants, reconnaissance des symptômes, création d'actions de nature inclusive (groupes de paroles dans un lieu public, séjours vacances, organisation de transports pour aller à une exposition ou faire du sport dans le but de donner aussi du répit aux aidants, inscription dans des clubs sportifs où les professeurs de ping-pong n'alertent les participants sur la maladie que si celle-ci est fortement installée) Il y a plein d'initiatives comme cela et déjà plus de 80 villes signataires !
Cette dynamique inclusive est originale car nous réunissons de nombreux acteurs sociaux, économiques, politiques voire même de la sphère privée et c’est à ce titre que tout cela est possible. Les personnes malades doivent pouvoir vivre sereinement parmi les personnes en bonne santé...
Enfin, parce que le handicap cognitif est invisible et comme il n’est évidemment pas question de stigmatiser des personnes, nous avons pensé qu’un symbole fédérateur porté par tous et toutes, bien portants ou non, concernés directement ou non, serait un bon moyen de distiller de la bienveillance dans notre cité. Ce symbole, nous le dévoilons le 21 septembre et incitons chacun à le porter, en solidarité avec toutes les personnes qui sont confrontées à alzheimer ou une maladie apparentée. Portons-le tous, c'est un symbole rassembleur, fédérateur, un signe universel de bienveillance, une marque d’attention !
Quelle sera la prochaine étape ?
La prochaine étape consistera à former et sensibiliser les commerçants de proximité pour que les personnes malades puissent évoluer dans un espace public solidaire et bienveillant. Le coiffeur, le chauffeur de bus, les commerçants ne peuvent pas savoir repérer ni comment faire, sans formation ou explications...
C'est la société qui doit s'adapter aux patients et pas l'inverse.... Cela prendra du temps car une société inclusive ne se fait pas en quelques mois mais elle est cruciale pour préserver l'autonomie des patients. Quand tous les acteurs de proximité seront formés, les malades pourront enfin rester le plus longtemps chez eux et vivre dans un espace public réenchanté et rassurant...