Obésité : le rôle clé du microbiote intestinal
Et si la qualité de notre microbiote intestinal était en partie responsable de l'obésité ? Selon une étude de l'Inserm parue dans la revue Cell Reports, il est possible de prédire la façon dont l'organisme va répondre à une alimentation déséquilibrée en analysant le microbiote, et donc d'évaluer le risque de devenir obèse. Les explications avec le Dr Boris Hansel, endocrinologue.
- Cette piste du microbiote et de son étude pour prédire l'obésité est-elle prometteuse ?
Dr Boris Hansel, endocrinologue nutritionniste : "Cela fait maintenant plusieurs années que l'on évoque le rôle du microbiote dans la genèse de l'obésité. Le microbiote est l'ensemble des bactéries qui colonisent notre organisme. Dans l'intestin, il y en a des milliards. Cela représente environ un à deux kilos de notre poids. On s'est rendu compte, depuis un peu plus de cent ans, qu'il y avait ce microbiote dans notre organisme et notamment dans l'intestin, et qu'il est associé à un certain nombre de pathologies, notamment à l'obésité. Il s'agit d'une voie de recherches très intéressante qui se développe. On tente de savoir quel est le lien entre la composition de notre tube digestif en bactéries et la survenue d'un excès de poids car il semble qu'il y ait une forte relation."
- Comment le microbiote agit-il sur la digestion ?
Dr Boris Hansel : "Ces bactéries fabriquent un certain nombre de substances chimiques que l'on découvre jour après jour. Elles jouent également un rôle dans la fermentation d'aliments qui ne sont pas digérables, ça fabrique certains types d'acides gras... Donc le microbiote a un rôle sur la digestion. Par ailleurs, les produits chimiques fabriqués par ce microbiote et les effets de ces bactéries sur l'alimentation entraînent des effets au niveau de l'organisme entier. Il ne faut pas voir les bactéries comme simplement enfermées dans le tube digestif parce que tout ce qu'elles font a un impact au niveau du cerveau, au niveau du foie, au niveau du pancréas, au niveau des muscles… Il y a donc un effet systémique.
"On regarde les relations entre certaines bactéries présentes dans l'intestin et certaines maladies. On a des recherches sur les relations entre certaines bactéries et l'autisme, entre certaines bactéries et les maladies inflammatoires, entre certaines bactéries et l'obésité… Et il faut aussi tenir compte des relations entre certains produits chimiques créés grâce à l'effet des bactéries sur certains composés alimentaires. Ce n'est pas seulement la bactérie associée à la maladie, il faut aussi mettre en relation avec les maladies, les produits chimiques qui viennent de l'impact de la bactérie."
- Cette découverte ouvre-t-elle la porte à de nouveaux traitements ?
Dr Boris Hansel : "Concernant l'obésité, on a des exemples chez l'animal, où avec des transplantations fécales, on obtient des effets intéressants car les souris peuvent ne plus être obèses. Et inversement, si on transplante un microbiote de souris obèse, on va provoquer de l'obésité. Chez l'animal, cette transplantation fécale semble être efficace. Toutefois, comme dans toute nouvelle découverte, ce n'est jamais une réussite à 100%. Même dans ces expérimentations, il y a des résultats qui sont parfois décevants. Aujourd'hui, pour l'obésité, on ne sait pas faire la même chose chez l'homme. Car quand on change les bactéries d'un humain, on change ce qu'on a envie de changer mais on change aussi beaucoup choses qu'il aurait fallu laisser en place. C'est donc une piste intéressante mais on ne sait pas encore manier les milliards de bactéries qui sont dans notre intestin."