Manque de personnel : les Ehpad en souffrance
Les maisons de retraite manquent de personnel et de moyens. Les personnes âgées sont les premières victimes de cette pénurie.
Pierrette a 94 ans. Elle vit depuis dix ans dans une maison de retraite. Chaque matin, une aide-soignante l'aide dans les gestes du quotidien. "Je me lève difficilement de mon fauteuil. Elle m’aide beaucoup. Si elle a le temps, elle m’accompagne au petit restaurant. Mais malheureusement, elle est très prise".
Ce matin, dans cet Ehpad, il n’y a que deux aides-soignantes pour s’occuper d’une trentaine de résidents. Ils ont en moyenne 87 ans et sont de plus en plus dépendants. Osanna explique : "généralement, on est trois. On arrive à gérer quand même. (…) Mais, s’il y avait des postes en moins, ce serait compliqué. Les résidents seraient contraints de nous suivre alors que ça devrait être le contraire. C’est à nous de nous adapter à eux".
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Des conditions de travail difficiles
Cadence infernale, manque de moyens, profession peu qualifiée, mal rémunérée… Aujourd’hui, les aides-soignants ne se taisent plus. Aux Opalines, dans le Jura, ils se sont mis en grève pendant presque quatre mois. À Paimboeuf, en Loire-Atlantique, ce sont les résidents qui ont dénoncé leurs conditions de vie, proches de la maltraitance. Certains n’ont pris qu’une seule douche en trois ans.
Carole Gauvrit appartient à la Fédération nationale des associations d’aides-soignants. Selon elle, "le soignant souffre de cette situation. La plupart disent qu’ils n’en peuvent plus d’avoir l’impression de maltraiter en devant tout faire vite. C’est de la maltraitance institutionnelle".
Une maltraitance liée au manque de personnel
Aujourd’hui, on compte environ cinq professionnels pour dix résidents dans les Ehpad français. Ils sont huit pour dix en Allemagne et en Belgique, et même douze pour dix en Suède et au Danemark. Depuis une vingtaine d'années, les plans solidarité grand âge s'accumulent. Pourtant, la France peine à rattraper son retard.
Selon Pascal Champvert, président de l’Association des Directeurs aux services des Personnes Agées, "on est dans une société qui dévalorise les gens vieux. Quand les gens sont très vieux et ont besoin d’aide, ils sont encore plus dévalorisés. Malheureusement, leurs besoins, leurs attentes ne sont pas reconnus comme une priorité du pays. Les avancées qui ont été faites en terme de financement ne permettent pas de rattraper le retard et surtout ne permettent pas de suivre l’augmentation du nombre de personnes âgées".
Une mission parlementaire sur le sujet vient de rendre public ses conclusions. Les députés recommandent de préserver les contrats aidés en Ehpad. Ils réfléchissent aussi à la revalorisation du métier d’aide-soignant.