Trop peu d'autopsies ralentit le progrès médical

De quoi est réellement mort le patient ? Le diagnostic posé était-il le bon ? Ce sont les questions auxquelles tentent de répondre les autopsies dites "médico-scientifiques" - à distinguer des autopsie judiciaires (médico-légales) ou des dons de tissus. Mais cette pratique "d’une utilité incontestable pour la santé publique et l’épidémiologie" est en déclin en France, alerte l'Académie nationale de médecine.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le
Trop peu d'autopsies ralentit le progrès médical

Rigoureusement encadrées d'un point de vue éthique, les autopsies médico-scientifiques permettent d'identifier les erreurs diagnostiques, et ainsi de faire progresser la recherche et la pratique médicale, rappelle l'Académie de médecine. Mais en France, celles-ci sont de moins en moins pratiquées, et les spécialistes sont de moins en moins nombreux. La pratique ne fait d'ailleurs pas l'objet d'un cursus spécifique.

Les causes du déclin

En 2013, seules 588 autopsies médico-scientifiques d'adultes et 433 d'enfants ont été recensées en France métropolitaine.

Les causes identifiées par l’Académie, au travers de plusieurs enquêtes, sont multiples. Parmi elles : une réglementation "parfois mal adaptée", certains "tabous sociologiques" et religieux, mais également la croyance (tant de la part des médecins que des familles) "en l'infaillibilité des techniques modernes de diagnostic" déployées du vivant du patient.

A ceci s'ajoute également, de la part des médecins, la crainte de poursuites judiciaires - alors même que certains diagnostics sont très difficiles à poser.

L'Académie observe enfin que ces autopsies sont coûteuses. Elles nécessitent en effet de recourir à des techniques modernes(1), afin de garantir leur utilité. Des normes d'hygiène et de sécurité très strictes s'appliquent également.

Quelles solutions ?

Pour freiner le déclin de la pratique, l'Académie appelle principalement à une meilleure sensibilisation des professionnels et du public sur ses enjeux.

"[Il faut] éduquer tant les médecins que l'ensemble des personnels hospitaliers, soignants et administratifs, et aussi le grand public", insiste l’Académie de médecine, "en donnant un message simple : l’autopsie est utile à la connaissance exacte des causes de décès, et les découvertes qu'elle permet ne sont pas, par essence, prévisibles. Cet acte généreux profitera aux prochains malades."

L’Académie demande également que la désignation d'une personne de confiance par les patients hospitalisés soit réellement mise en œuvre - ce tiers étant souvent mieux à même d'exprimer la volonté de la personne décédée que des membres de sa famille n'ayant jamais abordé la question de la fin de vie.

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(1) Par exemple l’imagerie par tomodensitométrie (TDM), la résonnance magnétique (IRM) et/ou l’angio-scannographie post-mortem.

Source : Les autopsies médico-scientifiques sont indispensables au progrès médical - rapport de l'Académie de Médecine rendu public le 7 avril 2015

La France, "lanterne rouge de l’autopsie médico-scientifique" en Europe

En Autriche, la proportion de patients décédés dans les hôpitaux universitaires qui sont autopsiés est passée de 35% en 1990 à 17% en 2009. En Suisse il est plus bas (chute à 7% en 2005 dans un hôpital universitaire de Genève). En Angleterre, l’autopsie porte sur seulement 10% des patients décédés (2% en Allemagne). Ces chiffres restent cependant "très supérieurs à ceux qui sont observés en France" déplore l’Académie. "En Belgique, la tendance est inverse : au seul hôpital Erasme de Bruxelles, 219 autopsies médico-scientifiques ont été effectuées en 2011, 193 en 2012, contre 60 en 1998".