Adultes handicapés : le gouvernement retire une mesure contestée
Le gouvernement renonce au nouveau mode de calcul de l'Allocation Adulte Handicapé (AAH), tel qu'il était prévu dans le projet de budget 2016. L'idée était de calculer cette allocation selon de nouveaux critères, en retirant, notamment, les revenus des comptes épargne - pour les allocataires ayant de l'argent de côté. Le point avec Patrice Tripoteau, directeur général adjoint de l'Association des Paralysés de France (APF).
Le nouveau mode de calcul de l'AAH envisagé par le gouvernement avait provoqué un tollé chez les familles et les associations de défense des personnes handicapées, ainsi que chez certains parlementaires. L'Association des Paralysés de France (APF) avait d’ailleurs lancé une pétition contre ce projet de loi de finances, pétition intitulée "Stop à l’indécence", qui a recueilli plus de 46.000 signatures.
- Comment accueillez-vous ce recul du gouvernement ?
Patrice Tripoteau : "C'est un soulagement. Les personnes en situation de handicap étaient dans une vraie inquiétude depuis plusieurs semaines. Certaines commençaient même à retirer leurs économies, de crainte d'être pénalisées sur leur AAH."
- Le montant de l'AAH est actuellement de 807,65 euros par mois au maximum. Si le nouveau mode de calcul envisagé par le gouvernement avait été maintenu, quelle aurait été son incidence sur ce montant ?
Patrice Tripoteau : "C'était une conséquence à deux niveaux. Un million de personnes sont bénéficiaires de l'AAH. Si l'on avait commencé à prendre en compte l'intérêt des revenus de leur épargne, elles risquaient de perdre quelques euros. Mais ça ne s'arrêtait pas là. Les bénéficiaires de l'AAH à taux plein (200.000 personnes) auraient été encore plus pénalisés : en perdant un peu de leur allocation, ils auraient perdu en plus des droits connexes - comme des majorations dont ils pouvaient bénéficier. Et là, ce sont entre 1.200 et 2.000 euros qu'ils pouvaient perdre chaque année."
- Si le gouvernement a retiré ce projet concernant l'AAH, le sujet n'est pour autant pas clos, puisqu'une mission parlementaire va se pencher sur les minima sociaux et cela risque de rouvrir le débat… Est-ce que cela vous inquiète ?
Patrice Tripoteau : "Oui, bien sûr, nous sommes inquiets. Derrière cette mesure, l'idée du gouvernement était une harmonisation des minima sociaux - on peut considérer par exemple que les bénéficiaires de l'AAH ont quelques avantages par rapport aux bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA). Et le but, comme toujours, est d'harmoniser vers le bas.
"Nous dénonçons cette approche : l'AAH n’est pas un minima social comme un autre. Il est destiné à des personnes en situation de handicap - soit de naissance, soit suite à un accident. Ce sont, pour beaucoup, des personnes lourdement handicapées, qui ont du mal à accéder à un emploi. On ne veut pas opposer les populations, mais là on est sur une problématique de handicap, à laquelle s'ajoute une problématique de précarité. C'est ce qu'il convient d'appeler une double peine."