Les sargasses, des algues toxiques, envahissent les Antilles
Les sargasses, des algues brunes envahissantes et toxiques, prolifèrent en Martinique et en Guadeloupe. Leurs effets sur la santé ne sont pas à négliger.
Depuis 2011, la Martinique et la Guadeloupe font face à des échouages massifs de sargasses pélagiques. Sèches, ces algues sont sans danger. Néanmoins, en décomposition, elles libèrent de l’hydrogène sulfuré (H2S), un gaz incolore et toxique qui pénètre les voies respiratoires. "Lorsque l’on ne sent plus les odeurs, ça peut être létal : on peut développer un œdème pulmonaire", explique Philippe Potin, directeur de recherche au CNRS au sein du Laboratoire de Biologie Intégrative des Modèles marins. En effet, la perception olfactive s’atténue à mesure qu’augmente la concentration de gaz présente dans les algues. C’est ce qu’on appelle l’effet de sidération olfactive.
Des risques d’intoxications aiguës et chroniques
L’exposition à ces algues en décomposition peut entraîner d'autres troubles :
- Des intoxications aiguës (dans le cas d’une exposition de courte durée) : troubles respiratoires, irritations oculaires, conjonctivites, vertiges, céphalées, œdème aigu du poumon, pertes de connaissance
- Des intoxications chroniques (dans le cas d’une exposition prolongée) : bronchites irritatives, irritations cutanées
- Des pertes de connaissance
- Une possibilité d’accident mortel très rapide en cas de fortes inhalations
Les personnes asthmatiques, les femmes enceintes et les jeunes enfants sont particulièrement à risque.
Selon l’Anses, les algues retiennent les métaux lourds comme l’arsenic et le cadmium. L’agence recommande donc "de proscrire l’utilisation éventuelle de ces algues pour l’alimentation humaine ou animale, dans l’attente de la réalisation d’études plus approfondies sur la contamination des algues par les métaux lourds". Comme le précise Philippe Potin par ailleurs, "la valorisation de ces algues en engrais n’est pas possible, car cela excèderait les seuils autorisés en métaux lourds dans les engrais".
Des crédits d’État de 3 millions d’euros pour la Martinique
A ce jour, la préfecture de Martinique a annoncé une rallonge des crédits d’État de 3 millions d’euros. Ces fonds lui permettront d’acquérir des machines de ramassage et des équipements de protection. Le préfet de Martinique Franck Robine a par ailleurs nommé un responsable chargé de la rédaction d’un plan national de lutte contre les sargasses. Enfin, des moyens humains supplémentaires vont être déployés pour aider le Service militaire adapté (RSMA).
En Guadeloupe, l'enveloppe destinée à la lutte contre les sargasses atteint 1,5 million d'euros. Sur place, les autorités réfléchissent à "un plan de financement pour l'acquisition d'un système d'aspiration des algues avant qu'elle ne s'échouent sur les plages" a expliqué à l'AFP le sous-préfet de Guadeloupe Jean-Michel Jumez. L’île de Saint-Martin pourrait, en outre, être elle aussi inquiétée. D’après des images satellites, elle ferait face à un échouage massif imminent.
Pour lutter contre ce fléau, l’Agence pour le développement et la maîtrise de l'énergie (Ademe) lance un appel à projet doté d'un million d'euros. Des fonds censés favoriser l'émergence de solutions locales.