Les kinés à l'hôpital se font rares
A l'hôpital, dans de nombreux services, les kinésithérapeutes ont un rôle crucial. Pourtant les kinés hospitaliers sont en sous-effectif. La profession a alerté la ministre de la santé, Marisol Touraine, de cette situation critique. Pourquoi y a-t-il une pénurie de kinésithérapeutes hospitaliers ? Quelles sont les pistes pour enrayer ce manque d'effectifs ?
Comme chaque matin, la journée commence au pas de course pour Romain Artico, 28 ans, masseur-kinésithérapeute à l'hôpital Paul-Brousse à Villejuif.. Pas de temps à perdre, il faut faire le tour des chambres pour établir le planning du jour. Son premier patient s'appelle James. Il a 80 ans. Lorsqu'il est arrivé dans ce service de gériatrie, après une chute, il y a quatre mois, il ne pouvait pas tenir debout tout seul.
Le temps nécessaire de la rééducation
Syndrome post-chute, fracture du col du fémur, AVC… Romain Artico rééduque des patients souvent lourdement handicapés. Pour les traiter au mieux, il lui faut beaucoup de patience, mais surtout du temps.
"Ici, on a 37 lits et je suis le seul kinésithérapeute du service. Au moins vingt personnes ont besoin de kinésithéraphie, dont des patients qui en ont besoin de manière intensive car ils ont eu un AVC. Je vais leur donner la priorité car c'est mon rôle. Par conséquent, il y a des patients qui ont des besoins en entretien qu'on va moins voir", explique-t-il.
Le libéral séduit 80% des étudiants
A l'hôpital Paul-Brousse, comme dans la plupart des hôpitaux, on manque de kinésithérapeutes. Une pénurie qui s'explique d'abord par le faible salaire des kinés hospitaliers qui s'élève à 1.350 euros net par mois, après quatre ans de formation. Sans surprise, 80% des étudiants choisissent de s’installer en libéral après l’école.
C'est le cas d'Axel Kremmer, 28 ans. Après une expérience à l'hôpital, il a créé son cabinet qui a tout juste un an. Plus de liberté, moins de lourdeur administrative pour acheter du matériel par exemple, Axel apprécie aussi la perspective d'un salaire très attractif. "On avait fait un business plan, on avait démarché les banques et les différents locaux, à trois ans, avec le nombre d'assistants requis, on est à 6.000 euros net", précise-t-il. Néanmoins, la charge de travail n'est pas la même, ses semaines sont bien remplies, et il lui arrive souvent de travailler plus de 40 heures par semaine.
Les solutions face à la pénurie
Pour pallier le manque de kinés hospitaliers, certains établissements ont recours à des masseurs-kinésithérapeutes étrangers. Mais on assiste aussi à des recrutements de personnes qui ne sont pas kinésithérapeutes. "Cela nous préoccupe parce qu'on ne peut pas imaginer que pour des troubles du langage on demande à un professeur de mener la rééducation alors que ce n'est pas un orthophoniste. C’'st la même chose", explique Pascale Mathieu, présidente du Conseil national de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes.
Pour enrayer le manque d’effectifs, la profession cherche des moyens pour attirer les jeunes. "Il serait intéressant de développer une activité et de permettre au kiné hospitalier, une fois qu'il a fini, de faire des actes libéraux dans les locaux des différents sites. Cela permettrait de fidéliser les kinés parce que la rémunération serait plus intéressante", selon Christian Fausser, chargé de mission de coordination de la rééducation.
Une solution qui pourrait être idéale pour Romain Artico, par exemple. Lorsqu'il aura fini son doctorat, il aimerait travailler plus de 35 heures par semaine, mais il reste très attaché au service public et au travail en équipe.