Arnaud Beltrame, dans la tête d'un héros
Le lieutenant-colonel de 44 ans est décédé après s'être substitué à un otage au cours de l'attaque terroriste du Super U de Trèbes (Aude). Peut-on expliquer son acte de bravoure qui a fait le tour du monde ?
En donnant sa vie en échange de celle d'un otage retenu par le tueur djihadiste de l'Aude, Arnaud Beltrame est devenu le symbole de la résistance au terrorisme. Que se passe-t-il dans le cerveau d'un homme prêt à un tel acte de courage ?
Le colonel Laurent Martinez, médecin coordinateur du service médico-psychologique du Service de Santé des Armées a répondu à nos questions.
- Arnaud Beltrame a-t-il été préparé, conditionné pour faire face à ce genre de situations ?
Colonel Laurent Martinez : "Ce lieutenant-colonel est un militaire et à partir de là, il partage des valeurs communes et l'acmé de ces valeurs, c'est le sacrifice ultime. Il est partagé par bon nombre de militaires, de forces de l'ordre, de policiers, de sapeur-pompiers. Même si on ne s'y prépare pas vraiment, implicitement la question de la mort est toujours présente chez chacun des militaires."
- En cas d'attaque, nous avons tous le même reflexe de fuir ou de se protéger. Sait-on ce qui se passe dans la tête des gens qui prennent le chemin inverse ?
Colonel Laurent Martinez : "On sait qu’une des structures cérébrales, qui s’appelle l’amygdale, est plus spécialement développée chez les personnes qui ont un sens extrêmement fort de l’altruisme. C’est quelque chose qui est connu, des études l’ont montré. Et c’est vrai que par la préparation militaire, cette structure cérébrale va se développer et conduit très certainement à pouvoir aider l’autre, pouvoir se sacrifier au profit de l’autre plutôt que de fuir ou d’être sidéré. On est dans un stress qui est adapté. Et je pense qu’Arnaud Beltrame avait déjà réfléchi en tant que militaire et en tant qu’homme à l’idée de donner sa vie pour les autres."
- Le décès d'Arnaud Beltrame laisse une famille endeuillée. Les circonstances de sa mort peuvent-elles aider ses proches ?
Colonel Laurent Martinez : "Ce qui peut les aider c’est que le fait que l’on partage tous cette situation-là. On s’est tous dit : « qu’est-ce que j’aurais fait à sa place ? » et on peut s’identifier à ce lieutenant-colonel à travers cet idéal qu’il a mis en acte. La famille va être soutenue d’abord par les militaires, ses camarades, la gendarmerie nationale et puis tout un chacun parce que nous avons tous cette empathie."