Fusillade de Strasbourg : l'importance du "déchocage psychologique"
Une cellule médico-psychologique a été mise en place pour aider les victimes et les témoins à surmonter le choc de la fusillade du marché de Noël.
Après la fusillade meurtrière de Strasbourg, dont le dernier bilan est de 3 morts et 13 blessés, de nombreux habitants sont traumatisés. Dès hier soir, une cellule médico-psychologique a été mise en place. Les explications du Dr Gaëlle Abgrall, psychiatre et responsable de la cellule d’urgence médico-psychologique du SAMU de Paris.
- A quoi sert une cellule médico-psychologique ?
Dr Gaëlle Abgrall, psychiatre : « C’est pour mettre en place les premiers soins médico-psychologiques auprès des victimes, des familles, des proches de façon à faire ce qu’on appelle un déchocage psychologique. Il y a une cellule par département qui est elle-même chapeautée par une cellule zonale, qui elle-même est à nouveau chapeautée par une cellule nationale. On est très organisé au niveau de ces cellules. »
- Comme se passe concrètement le déchoquage psychologique ?
Dr Gaëlle Abgrall, psychiatre : « On ne fait pas parler une victime parce que ce n’est pas un interrogatoire mais on les laisse s’exprimer et surtout on les laisse exprimer leurs émotions. S’ils sont mutiques, c’est des situations d’extrême urgence où on peut être amener à les faire hospitaliser. La prise en charge immédiate va permettre de prévenir les troubles psycho-traumatiques au long terme. Donc c’est vraiment fondamental que l’ensemble des impliqués, puisque c’est comme ça qu’on les appelle, qui ont assisté à cet événement puissent connaître la possibilité de ces soins médico-psychologiques. Il y a une possibilité de soin directement sur place mais aussi par ce qu’on appelle un pôle d’urgence médico-psychologique par téléphone. C’est une ligne qui est basée au Samu de Paris et donc on peut les prendre directement en ligne pour faire un entretien de déchocage psychologique. Le numéro est le 01 44 49 24 30. Jusqu’à présent, il y a plus de 200 personnes qui ont été vues directement et nous, là, on est à une cinquantaine d’appels. »
- Est-ce que tout le monde peut venir vous voir, y compris des gens qui n’ont pas vu l’attaque mais qui ont entendu les coups de feu de loin ?
Dr Gaëlle Abgrall, psychiatre : « Tout le monde peut venir nous voir. Après, c’est à nous, au niveau de ce poste d’urgence médico-psychologique de trier l’urgence des victimes à voir en priorité. »
- Pourquoi certains témoins souffrent-ils de stress post-traumatique et d’autres non ? Pourquoi, dans une même situation, deux personnes ne réagissent-elles pas de la même façon ?
Dr Gaëlle Abgrall, psychiatre : « Ça dépend de plusieurs facteurs et, en particulier, si on a déjà vécu un événement traumatique dans son enfance ou au cours de sa vie. Ça dépend aussi de la qualité de son entourage. Si on est très bien entouré, on sait que c’est un facteur protecteur très important. Lors de cette prise en charge immédiate de déchocage, on va aussi rechercher ces facteurs prédictifs de troubles de stress post-traumatique à long terme. »
- Comment cela se passe pour les enfants ?
Dr Gaëlle Abgrall, psychiatre : « On peut utiliser plusieurs types de médiation. Ça peut-être le dessin, les jeux… Et puis c’est aussi par l’intermédiaire des parents. Puisque bien souvent ce sont les parents qui nous amènent les enfants et ça nous permet de voir l’ensemble de la famille. »
Pourquoi cette attaque peut-elle raviver des traumatismes vécus auparavant ? Est-ce lié à la peur de la mort ?
Dr Gaëlle Abgrall, psychiatre : « Ça peut être effectivement la peur de la mort. L’hypothèse qu’on émet c’est celle de la mémoire traumatique qui va resurgir, qui va faire place aux symptômes traumatiques : l’hyper vigilance, les cauchemars, les conduites d’évitement où on ne peut absolument pas se rendre sur le lieu de l’attentat. »