Mutilation des personnes intersexes : le Sénat préconise une indemnisation
Un rapport sénatorial rendu public mardi recommande l'indemnisation des personnes intersexes, qui souffrent des conséquences d'opérations réalisées durant leur plus jeune âge pour corriger des malformations de leurs organes génitaux.
Maryvonne Blondin et Corinne Bouchoux, respectivement sénatrices du Finistère et du Maine-et-Loire, ont publié un rapport consacré aux personnes intersexes et intitulé "Variations du développement sexuel : lever un tabou, lutter contre la stigmatisation et les exclusions". Elles y préconisent une "indemnisation du préjudice" subi par ces enfants lors des nombreuses opérations destinées à leur attribuer un sexe féminin ou masculin.
Bien qu’"aucune statistique complète et fiable" ne permette de déterminer le nombre total de personnes intersexes en France, on estime que 200 des 800.000 bébés naissant chaque année sont intersexes, c’est-à-dire qu’ils présentent une malformation génétique du développement sexuel. "Avant on disait qu'il fallait intervenir car on ne savait pas si ces bébés étaient des filles ou des garçons. Mais plus on fait ces opérations des organes génitaux jeune, plus il faut les refaire quand on grandit", ce qui génère beaucoup de "souffrances", a expliqué à l'AFP Maryvonne Blondin.
De lourdes conséquences pour les patients
Le quotidien des personnes intersexes, massivement opérées durant la deuxième moitié du XXe siècle, est encore "très dur" aujourd'hui, insiste Maryvonne Blondin. "Pour certains, les traitements chirurgicaux et/ou hormonaux ont été vécus comme des tortures", ajoute Corinne Bouchoux. Citées dans le rapport, des personnes intersexes ont raconté les "traumatismes" et les "douleurs" après des interventions à répétition, alors qu'elles étaient enfants, et des conséquences physiques lourdes plusieurs dizaines d'années plus tard.
La France condamnée à trois reprises
Selon la Dilcrah, la Délégation interministérielle à la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la haine anti-LGBT, la France a été condamnée à trois reprises en 2016 par l'ONU pour ces opérations : en janvier par le Comité des droits de l’enfant, en mai par le Comité contre la torture et en juillet par le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes.
"Lorsqu'elles ne sont pas impératives pour des raisons médicales, ces opérations sont des mutilations et elles doivent cesser", a indiqué la Dilcrah en janvier.