Violences sexuelles en RDC : le patron de l'OMS s'excuse
Entre 2018 et 2020, des violences sexuelles ont été commises par des employés de l'OMS qui luttaient contre l’épidémie d’Ebola en République Démocratique du Congo
L'affaire est grave. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) est mise en cause pour des faits de violences sexuelles commis par des équipes missionnées en République Démocratique du Congo pour lutter contre l'épidémie d'Ebola entre 2018 et 2020. Dévoilées le mardi 28 septembre, les conclusions de la commission d'enquête indépendante dénoncent des "défaillances structurelles" et des "négligences individuelles".
Ces abus sexuels ont été commis par des membres du personnel, aussi bien embauchés localement que par des membres internationaux. Les enquêteurs ont interrogé des dizaines de femmes qui se sont vues proposer du travail en échange de rapports sexuels et des victimes de viol. La commission a identifié 83 auteurs présumés, dont 21 étaient des employés de l’OMS.
La commission d'enquête indépendante - lancée en octobre 2020 par le directeur général de l'Organisation mondiale de la santé Tedros Adhanom Ghebreyesus - dresse un tableau très sombre de la situation sur place. Elle constate "l’ampleur des incidents d’exploitation et d’abus sexuels lors de la riposte à la 10ème flambée d’Ebola, toute chose ayant contribué à accroître la vulnérabilité des "victimes présumées, lesquelles n’ont pas bénéficié de l’aide et de l’assistance nécessaires qu’exigeaient de telles expériences dégradantes".
"Je suis désolé"
"La première chose que je tiens à dire aux victimes et aux survivants, c'est que je suis désolé. Je suis désolé de ce qui vous a été imposé par des personnes qui étaient employées par l'OMS pour vous servir et vous protéger", a déclaré le Dr Tedros. S'il promet des "conséquences sévères" aux responsables de ces violences sexuelles, celui qui est soutenu par de nombreux pays européens mais aussi par le Kenya pour briguer un nouveau mandat à la tête de l'agence onusienne, reconnait un "jour sombre pour l'OMS". Quand une journaliste lui a demandé s’il avait l’intention de démissionner, le Dr Tedros répond de manière détournée. "Je suis allé sur place quatorze fois et ce problème n’a pas été soulevé. Peut-être que j’aurais dû poser des questions", a-t-il toutefois reconnu.
L'organisation a mis fin, dès la publication du rapport, au contrat de quatre personnes qu'elle employait encore. Les autres, qui avaient des contrats de courte durée, a expliqué le docteur Tedros, ne travailleront plus pour l'organisation. En outre, l'OMS transmettra les allégations de viol aux autorités nationales en RDC pour qu'elles enquêtent, ainsi que dans les pays d'origine des auteurs présumés. Deux hauts responsables ont été placés en congés administratifs "et nous prenons des mesures pour nous assurer que d'autres personnes susceptibles d'être impliquées soient temporairement déchargées de tout rôle décisionnel" dans cette affaire, a-t-il détaillé.
Le scandale a éclaté grâce au travail d’enquête de l’agence de presse spécialisée à but non lucratif The New Humanitarian et de la Reuters Foundation. La commission d'enquête relève que face à la dizaine de victimes qui s'est présentée, il y a eu "une absence totale de signalement de cas" au niveau institutionnel.