Pour une stratégie plus ambitieuse contre les hépatites
La France devrait adopter une politique plus ambitieuse contre les hépatites B et C qui font chaque année 4.000 morts, en mettant l'accent sur la vaccination et le dépistage par tests rapides, selon des experts.
La mobilisation en France ne semble plus à la hauteur face à ces deux maladies virales reconnues "grande cause sanitaire" qui affectent un demi-million de personnes, selon un rapport remis lundi 19 mai 2014 à la ministre de la Santé.
Ce travail, demandé par Marisol Touraine, a été réalisé sous l'égide de l'Agence française de recherche sur le sida et les hépatites (ANRS) et de l'Association française pour l'étude du foie (AFEF) par 22 groupes d'experts et un comité indépendant.
"Il est important que des mesures permettant un renforcement de la prévention, du dépistage et de la prise en charge des personnes infectées soient rapidement mises en oeuvre", soulignent l'ANRS et l'AFEF dans un communiqué commun.
Les populations les plus exposées en première ligne
Cet effort doit viser en premier lieu les populations les plus exposées. Il s'agit des usagers de drogues injectables qui s'infectent en utilisant des seringues usagées ou en les partageant, en particulier dans les prisons où drogue et seringues circulent sous le manteau.
Il s'agit aussi de migrants venus de régions comme l'Afrique où l'hépatite B est très présente mais aussi les populations homosexuelles et celles de certaines régions d'Outre-Mer.
Le dépistage est un point crucial puisque la moitié des 300.000 personnes atteintes d'hépatite B et un tiers des 200.000 personnes atteintes d'hépatite C ignorent qu'elles sont contaminées.
Cette part élevée de personnes ignorant leur infection justifie une intensification des dépistages ciblés, en s'aidant des nouveaux outils de diagnostics rapides, les Trod, souligne le rapport. Ces Trod, déjà utilisés pour le dépistage du sida, permettent de donner une réponse sur une infection en moins de 30 minutes contre plusieurs jours pour un test classique.
Les Trod pour les hépatites B et C existent déjà, mais en France leur usage n'a pas encore été "encadré" par la Haute autorité de santé (HAS), relève le rapport. Ils permettraient de "favoriser le dépistage des populations qui ne fréquentent pas les structures médicales classiques".
Elargir le dépistage des hépatites
Le rapport propose aussi d'élargir le dépistage aux hommes âgés de 18 à 60 ans et aux "femmes enceintes dès la première consultation prénatale".
Autre grand point d'action : la vaccination contre l'hépatite B. La vaccination est aujourd'hui proposée aux personnes à risques (usagers de drogues, personnel soignant, migrants, etc.), aux nourrissons et adolescents.
Mais "les taux de couverture vaccinale parmi ces populations sont insuffisants". La situation est la plus préoccupante pour les adolescents pour lesquels le niveau de vaccination est "gravement insuffisant en raison de polémiques sur un lien supposé avec la survenue de sclérose en plaques".
"La suspicion" de lien entre la vaccination et cette maladie "n'a pas été confirmée" et le vaccin "a montré sa grande efficacité", souligne le rapport. "Il faut profiter de tout contact avec un médecin (...) pour proposer une vaccination aux enfants, adolescents et personnes exposées".
L'arrivée de nouveaux traitements très efficaces, avec moins d'effets secondaires mais à des coûts exorbitants, les antiviraux à action directe (comme le sofosbuvir), sont en train de "bouleverser" la prise en charge des hépatites C. Il convient de "préciser la place" de ces nouveaux médicaments et de "mettre en place des études coût-efficacité", selon le rapport. Mme Touraine a indiqué de son côté qu'il faudra "maîtriser" l'impact financier des nouveaux traitements. Un comprimé de sofosbuvir est facturé 1.000 dollars aux Etats-Unis, soit 84.000 dollars (environ 60.000 euros) pour les 12 semaines de traitement préconisées.
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