Grands prématurés : où commence l'acharnement thérapeutique ?
Les parents d'un grand prématuré, souffrant d'une hémorragie cérébrale sévère, réclament aujourd'hui l'arrêt des soins prodigués à leur enfant. L'équipe de néonatologie du CHU de Poitiers, où l'enfant est soigné, a sollicité la décision d'un groupe d'éthique. Quand commence l'acharnement thérapeutique sur un nourrisson prématuré ? Comment et selon quels critères peut être prise la décision d'arrêter les soins ?
Les 10.000 grands prématurés qui naissent chaque année en France ont cinq fois plus de risques d'avoir des séquelles motrices ou intellectuelles que les enfants nés à terme. Des perfusions, une assistance respiratoire, des capteurs reliés à des écrans de surveillance continue... dans des couveuses qui tentent de les protéger. Pour les très grands prématurés, chaque minute est une lutte pour une vie qu'ils n'étaient pas prêts à affronter.
Toutefois, les équipes soignantes ont à cœur de vérifier que les moyens mis en œuvre restent dans les limites du raisonnable, sans acharnement thérapeutique.
"Continuer à faire vivre artificiellement un enfant dont le cerveau est extrêmement abîmé, et dont le pronostic neurologique et de développement est compromis [constitue] une obstination déraisonnable", propose comme exemple le professeur Pierre-Henri Jarreau, chef du service de médecine et réanimation néonatales à l'hôpital Cochin/Port-Royal.
De même, si la prise en charge globale de l'enfant est extrêmement lourde est engendre beaucoup de souffrance, même lorsque les lésions ne sont pas majeures, les équipes médicales peuvent être amenées à s'interroger sur la légitimité de la poursuite des soins.
Un arbitrage collégial
L'arbitrage est d'autant plus complexe qu'il est parfois difficile de prédire les capacités du cerveau à compenser, en grandissant, les lésions subies lors des premières semaines de vie.
Les décisions d'arrêt ou de poursuite de soins sont donc toujours collégiales. Tous les membres de l'équipe soignante sont impliqués, une aide extérieure étant parfois sollicitée.
Toutes les expertises nécessaires doivent ainsi être réunies pour donner à chaque prématuré les soins les plus adaptés, même s'il faut se résoudre aux soins palliatifs.