Pourquoi arrêter l'hydratation et l'alimentation du patient en fin de vie ?
Trouvez-vous normal qu'il soit nécessaire de priver la personne de nourriture et de boisson ? Les soins d'alimentation et d'hydratation sont-ils considérés dans ce cas comme une "obstination déraisonnable" ? Où est la limite ? Arrêter l'hydratation et l'alimentation, n'est-ce pas infliger une fin cruelle ? Une hypocrisie finalement ? Les réponses avec le Dr Bernard Devalois, chef de l'unité des soins palliatifs du centre hospitalier René Dubos (Cergy-Pontoise).
"Nous sommes confrontés quasi quotidiennement à ces questions avec des patients en fin de vie, pour qui la poursuite non pas de la boisson, non pas de l'alimentation mais d'une technique de réanimation qui s'appelle la nutrition et l'hydratation médicalement assistées, artificielles se pose. Il s'agit de techniques de réanimation et pas simplement de faire boire car le patient n'est pas du tout capable de boire. Il existe un consensus international sur ce sujet et cela a été reconnu par le législateur au moment de la loi. Des amendements ont cherché à expliquer qu'il fallait exclure la nutrition et l'hydratation artificielles de ce qui pouvait être suspendu, et ces amendements ont largement été repoussés.
"On ne prive donc pas de manger et de boire, le patient est incapable de manger et de boire. L'arrêt de soins de réanimation, l'arrêt de soins de maintien artificiel en vie qui consiste en l'arrêt de la nutrition et de l'hydratation artificielles n'est absolument pas inconfortable. Nous sommes face à un fantasme qui est soigneusement entretenu à la fois par ceux qui voudraient que l'on s'acharne à tout prix mais ce fantasme est défendu de la même manière par les personnes qui souhaiteraient que l'on mette en place des injections létales. Ce fantasme est faux. Le patient en fin de vie ne meurt pas de faim car il n'a pas faim, il ne meurt pas de soif car il n'a pas soif. Et ce qui permet de combattre la sécheresse de bouche sont des soins techniques que savent réaliser les infirmières et les soignants. On parle de soins de bouche et il n'y a donc aucun inconfort dans l'arrêt de cette nutrition et de cette hydratation.
"De plus, la loi nous impose par un décret de 2010 que dans le doute, si nous ne sommes pas capables d'apprécier la douleur, la souffrance qui pourrait être liée à un arrêt de traitement, de mettre en place des traitements à visée antalgique et à visée sédative. Nous avons le droit et surtout le devoir de provoquer une altération de la conscience si on n'est pas certain qu'il n'y a pas une petite étincelle quelque part. Il s'agit d'un accompagnement qui fait que l'on peut garantir aux proches qu'il n'y aura aucune souffrance, aucune douleur, ils ne mourront pas de faim car ils n'ont pas faim et ils ne mourront pas de soif car ils n'ont pas soif."
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