Mal-logement : quelles conséquences sur la santé ?
Quatre millions de Français sont sans-abri, mal logés, ou sans logement personnel. C'est le triste constat de la Fondation Abbé Pierre. Le Magazine de la Santé a reçu, mardi 31 janvier, Frédérique Kaba de la Fondation Abbé Pierre.
Les conclusions du 22è rapport annuel de la Fondation Abbé Pierre sont sans appel. La crise du mal-logement toucherait près de quinze millions de personnes, si l’on inclut celles qui s'entassent dans des habitations surpeuplées, qui dépensent la majeure partie de leur revenu dans leur loyer, ou qui se retrouvent en situation de précarité énergétique. Les Français en effet sont 44% de plus qu'en 2006 à se priver de chauffage. Et ce n'est pas sans conséquence sur leur santé.
- Le nombre de personnes sans domicile a augmenté de 50% en onze ans. Une situation alarmante, car vivre dans la rue impacte fortement l'état de santé de ces personnes…
Frédérique KABA, directrice des missions sociales de la Fondation Abbé Pierre : "Il s’agit de 143.000 personnes exactement. Ces personnes qui vivent dans la rue, dont 30.000 enfants il faut le rappeler, sont très exposées. Elles se dégradent, sont confrontées au froid, à la chaleur aussi, à la déshydratation, à des carences alimentaires, et puis la solitude qui a des effets psychiques importants et durables."
- Les sans-abri ne sont pas les seuls dans cette situation… Des millions de Français vivent également dans des logements insalubres. Dans quelles conditions exactement ?
Frédérique Kaba : "Les personnes qui vivent dans des logements insalubres, sont des personnes qui vivent sur la terre battue, dans le froid, sans sanitaires, avec un système d’électricité dangereux. Il s’agit de situations extrêmement préoccupantes pour les adultes et les enfants. Et c’est aussi, bien sûr, un facteur de désocialisation très important."
- Quels problèmes de santé engendrent de telles conditions de vie ?
Frédérique Kaba : "Elles ont bien sûr des conséquences importantes sur la santé physique. L'asthme par exemple. Sans oublier les facteurs psychologiques."
- Vous insistez cette année sur le nombre croissant de personnes en situation de précarité énergétique. Beaucoup ne se chauffent pas… A quel prix ?
Frédérique Kaba : "Douze millions de logements sont en précarité énergétique. Un million en très forte précarité énergétique. Concrètement, cela signifie que les personnes qui vivent dans ces logements se retrouvent avec des pathologies sanitaires importantes et un loyer souvent très cher. Ils doivent choisir entre un suivi médical, avec des frais supplémentaires à débourser, et continuer à payer leur loyer et conserver leur logement. C’est le type d’arbitrage que rencontrent les ménages les plus pauvres. Il préfèrent parfois garder un toit sur la tête, même si c’est une passoire thermique, qui leur coûte du point de vue de la santé et à cause de laquelle ils développent pathologies respiratoires ou des problèmes de développement."
- Comment obliger un propriétaire à rendre salubre un logement insalubre ?
Frédérique Kaba : "On légifère, on propose des lois et surtout on les applique. Le problème c’est qu’aujourd’hui, la loi n’est pas appliquée. On se retrouve avec des marchands de sommeil, mais aussi des propriétaires qui ne savent pas se saisir des outils proposés pour résoudre leurs problèmes de précarité énergétique et d’insalubrité. Il existe un programme souvent régi par le parc social pour les propriétaires occupants. Aujourd’hui il y a trois millions de logements vacants dans le parc privé. C’est 44% de plus qu’il y a dix ans et c’est trois millions de propriétaires à qui il faut s’adresser pour faire évoluer leurs conditions de vie dans ces logements."