Sperme, latex, des allergies sexuelles gênantes !
Les allergies sexuelles ne sont pas un mythe, même si elles restent rares. Parfois difficiles à diagnostiquer, elles comprennent l'allergie au sperme, en réalité au liquide séminal, et l'allergie au préservatif, plus précisément au latex qu'il contient.
Ça gratte, ça brûle, c’est rouge au niveau des "parties intimes" ? Il s'agit peut-être d'une allergie sexuelle, pouvant se manifester par des démangeaisons, des brûlures et une rougeur des organes génitaux, ainsi qu'une sécheresse vaginale ou un gonflement des lèvres. Mais pas seulement... une rhinite, des éternuements, un asthme ou même un choc anaphylactique trouvent parfois leur origine dans une allergie au latex du préservatif ou au liquide séminal, composant le sperme.
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Un diagnostic souvent difficile
Un ou plusieurs contacts avec l'allergène sont nécessaires pour que les défenses immunitaires du corps s'organisent et défendent l'organisme contre l'intrus. "Les symptômes apparaissent plutôt rapidement, mais tout est possible en matière d'allergie, explique le Dr Pierrick Hordé, allergologue. Ils sont immédiats ou plus tardifs et apparaissent parfois le lendemain de l'exposition, ce qui complique le diagnostic".
Autre difficulté, les symptômes de l'allergie au préservatif ou au sperme sont parfois similaires à ceux d'une infection, ce qui peut entraîner des erreurs de diagnostic et des traitements inadaptés.
L'allergie au sperme : une personne sur 5000
En réalité, il s'agit d'une allergie au liquide séminal, le liquide composant le sperme . C'est une allergie rare : "on l'estime à un cas pour 5 000 personnes, peut-être pour 10 000, évalue le Dr Habib Chabane. Mais comme elle est sous-diagnostiquée, il est possible que ce soit plus fréquent."
Les symptômes décrits plus hauts se manifestent parfois immédiatement et de façon impressionnante par un choc anaphylactique, parfois le lendemain du contact du sperme avec la muqueuse (vaginale, buccale ou anale). Et quand l'allergie prend la forme des symptômes de mycose, elle complique la prise en charge : "Beaucoup de femmes allergiques au liquide séminal sont traités à tort pour une mycose génitale de façon répétée, met en garde le médecin. Le traitement ne guérit rien puisque le problème n'est pas là..." En revanche, lorsqu’un préservatif est utilisé, aucun symptôme ne se manifeste et c'est un indice très intéressant à donner au médecin. Car les examens gynécologiques et les prélèvements sont normaux, le diagnostic tarde bien souvent...
Le responsable se nomme la "kallicréine", une glycoprotéine contenue dans le liquide séminal." C'est l'allergène majeur du liquide séminal, que l'on a identifié aujourd'hui mais il y en a peut-être d'autres", précise toutefois le Dr Chabane. Mais l’allergie est parfois toute autre et elle est en lien avec des substances ou aliments consommés par le partenaire ! "Mais il ne s'agit pas d'une allergie au liquide séminal dans ce cas et c'est exceptionnel, estime l'allergologue. Il y a eu un cas documenté d'allergie aux noix de cajou, consommées peu avant le rapport par le partenaire, et un autre à de l'amoxicilline pris par le partenaire, les substances se retrouvant dans son sperme !"
Quels sont les traitements possibles ?
D'après le Dr Chabane, les trois tests intéressants pour faire le diagnostic sont le prick-test, la mesure des immunoglobulines E, et le patch-test. En sachant que les trois peuvent être négatifs, il faut alors faire confiance à la clinique : les symptômes de mycose disparaissent, dès lors que la patiente utilise un préservatif.
Inutile de changer de partenaire pour autant : "on est allergique à tous les liquides séminaux quel que soit le partenaire !", reprend le médecin.
Le préservatif reste le seul recours efficace en prévention, qu’il s’agisse de pénétration vaginale, anale, ou de fellation. Les anti-histaminiques peuvent être utilisés si les symptômes sont légers, d'après le Dr Hordé. Quant à la désensibilisation, cette technique qui passe par l'exposition progressive à la protéine allergisante, "elle est en pratique très peu pratiquée, confirme le Dr Chabane, puisque les laboratoires ne préparent plus les extraits utilisés pour désensibiliser. Il s'agit en effet d'une préparation individuelle, utilisable par une seule personne."
Enfin, en cas de désir d'enfant, les techniques de procréation médicale assistée se révèlent parfois nécessaires. "Certaines patientes ont des grossesses spontanées car elles ont des rapports en dépit des symptômes allergiques, souvent peu graves, constate-t-il. Mais quand les symptômes sont graves avec un choc par exemple, le préservatif est obligatoire et on suggère alors une fécondation in vitro, avec implantation de l'œuf fécondé."
L'allergie au préservatif : 3% de la population
C'est en réalité une allergie au latex des préservatifs. Le latex provient de la sève d’un arbre, l'arbre à caoutchouc et est utilisé pour la majorité des préservatifs, certains sextoys, les gants ménagers, les tétines des biberons, les bonnets de bain, etc. Les protéines allergisantes de l’arbre à caoutchouc restent présentes dans la sève et le produit fini de latex naturel.
"L’allergie concernait en moyenne 3% de la population, estime le Dr Hordé, c'est la plus fréquente des allergies sexuelles." Mais d'après le Dr Chabane, les chiffres ont vraiment diminué aujourd'hui. "L'allergie au latex était en pleine expansion dans les années 90, du fait des mesures de prévention du SIDA et de l'hépatite. Les gants non poudrés, qui étaient le premier contact et qui sensibilisaient les personnes allergiques au latex, sont devenus nettement moins allergisants. Comme la quantité relarguée par le préservatif est très faible, elle n'est pas suffisante pour déclecnher l'allergie et explique que l'allergie au préservatif soit en nette diminution." Toutefois, attention aux autres produits à base de latex... l'allergologue recommande donc d'éviter le latex et de bien connaître tous les produits qui en contiennent et sont susceptibles de déclencher l'allergie.
Hors de question de faire l'impasse sur le préservatif pour cette raison : il existe des préservatifs sans latex, à base de polyuréthane ou de néoprène.