Cancer du sein : une enquête pour améliorer les modalités de dépistage
Chaque année, les autorités sanitaires françaises organisent une mobilisation en faveur du dépistage du cancer du sein, "Octobre Rose". Constatant une stagnation du taux de participation, mais aussi les préoccupations croissantes autour du problème du sur-diagnostic, l’Institut National du Cancer (INCa) lance une enquête auprès des différents acteurs (citoyens, professionnels de santé…) pour faire progresser le dispositif.
A l’occasion d’une conférence de presse, ce 29 septembre, l'INCa a réalisé un bilan de dix années de dépistage organisé du cancer du sein à l’échelle nationale.
"Le taux de participation au dépistage s’est stabilisé depuis 2008 autour de 52% de la population invitée et connait d’importantes disparités selon les territoires, signalant des inégalités d’accès et de recours au dispositif", explique l’INCa. De plus, "si ce dépistage permet de diagnostiquer des cancers du sein à un stade précoce […], il conduit également à diagnostiquer des cancers qui n'auraient pas, ou auraient très peu évolué."
"Ce surdiagnostic (estimé entre 10 et 20% des cancers dépistés selon les études) et le surtraitement qu’il induit ont donné lieu à des débats dans les sphères scientifiques, médicales [et] auprès du grand public."
Parallèlement, l’accent est encore peu mis sur le dépistage des femmes à risque aggravé de cancer du sein [1].
Arguant d’une "double exigence de modernisation de l’action publique et de démocratie sanitaire", l’InCA appelle à une concertation citoyenne et scientifique, impliquant "les premières concernées" - les femmes - et l'ensemble des acteurs du dépistage.
Un site de contribution en ligne, Concertation-depistage.fr, a été aujourd’hui ouvert aux citoyens et professionnels. Il recueillera les avis de chacun jusqu’au 15 mars 2016. L’InCA note qu’il est également possible d’adresser sa contribution par courrier postal à l’Institut national du cancer.
Trois grands thèmes
Premiers sujets de débat : les questions liées à l’intérêt et aux limites du dépistage du cancer du sein. "C’est en comprenant ces bénéfices et ces limites qu’une femme peut décider, en toute connaissance de cause, de participer ou non au dépistage", explique l'InCA. "Il est également important que chaque femme qui décide de ne pas participer au dépistage ait conscience des risques liés à ce choix."
La plateforme participative interrogera donc les femmes et les professionnels sur la façon d’améliorer l’accès à l’information, mais aussi sur la qualité et le type d’information auxquels les uns et les autres ont accès. Les contributions pourront également porté sur les moyens de garantir que le choix individuel soit respecté. Les spécialistes pourront par ailleurs proposer des stratégies pour diminuer le risque de surtraitement.
Deuxième thématique : les questions liées à l’organisation du dépistage. L'INCa observe que si certaines femmes ne souhaitent pas se faire dépister, "d’autres y renoncent par peur de l’examen ou des résultats, parce qu’elles ont eu une mauvaise expérience, pour des raisons pratiques ou encore parce qu’elles connaissent d’autres difficultés (financières ou linguistiques, par exemple)". Les contributrices du site Concertation-depistage.fr sont invitées à "partager leurs expériences, leurs attentes" et à suggérer des points d’amélioration. Toutes les idées concernant les moyens permettant de favoriser l’accès du dépistage aux femmes à risque élevés et très élevés sont également les bienvenues.
Troisième axe de débat : les questions liées aux objectifs de santé du programme de dépistage. Celles-ci portent sur les moyens d’améliorer l’offre de dépistage pour les femmes issues de milieux socio-économiques défavorisés, celles atteintes de handicap ou encore celles isolées géographiquement.
Un comité d’orientation composé de chercheurs en sciences sociales, de médecins [2], de juristes et d’économistes aura la charge d’analyser l’ensemble des contributions. "Ce comité rédigera le rapport final de recommandations pour l’évolution de la politique de dépistage du cancer du sein, qui sera remis à la ministre des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des femmes. Le ministère des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des Femmes et l’Institut national du cancer se saisiront ensuite des conclusions de ce rapport pour concevoir un plan d’actions."
[1] Risque élevé (antécédent personnel de cancer du sein ou d’autres affections du sein, antécédent de radiothérapie au niveau du thorax) ou très élevé (antécédents familiaux).
[2] Parmi lesquels Marina Carrère d'Encausse, médecin, co-productrice et co-présentatrice du Magazine de la santé et Allô docteurs (France 5)
Le risque de cancer du sein augmentant avec l’âge, depuis 2014, son dépistage est proposé de façon systématique en France à toutes les femmes de plus de 50 ans, quels que soient leurs antécédents médicaux ou familiaux.
En 2012, le cancer du sein a été responsable de 11.886 décès de femmes en France - soit la première cause de cancer sur le territoire.
Environ 48.800 nouveaux cas de cancers du sein sont identifiés chaque année. L'INCa estime que 17.000 de ces cancers sont identifiés dans le cadre du dépistage organisé.
Selon l'institut, grâce au dépistage, 100 à 300 décès par cancer du sein seraient évités pour 100.000 femmes y participant de manière régulière pendant 10 ans.