Lévothyrox : un changement de formule critiqué mais sans danger selon les médecins
Utilisé pour remplacer la thyroxine, une hormone naturellement produite par la thyroïde, le Lévothyrox® a changé de formule en mars 2017. Une modification que dénoncent certains usagers, mais qui ne présente pas de danger selon les spécialistes.
"Contre le nouveau Lévothyrox®, dangereux pour les patients !" Le titre de la pétition est clair : les près de 50.000 signataires souhaitent que leur médicament revienne à son ancienne formule. Celle-ci a en effet été modifiée en mars 2017 à la demande de l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM).
"Le médicament actif et la posologie n’ont pas changé", affirme le Dr Fabrice Ménégaux, chirurgien à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière. L'emballage a toutefois été modifié, ainsi que l’excipient : le mannitol a remplacé le lactose. Une substance qui entraînait des cas, rares, d'intolérance et d'allergie.
Certains patients, interrogés par Le Parisien et La Croix, se sont plaints d’effets secondaires liés à ce changement. "Je perds mes cheveux, je me sens fatiguée alors que pendant six ans j’ai été stable", explique un témoin.
La stabilité de la TSH (thyréostimuline) est justement censée être assurée par le Lévothyrox®. Ce médicament remplace une hormone, la thyroxine, lorsque celle-ci n'est plus secrétée en quantité suffisante, essentiellement en cas d'hypothyroïdie ou d'ablation de la thyroïde suite à un cancer. Il est prescrit à vie et "s’est toujours montré très efficace" selon le Dr Ménégaux. Les seuls problèmes "avaient été constatés avec les génériques", poursuit le médecin, ce qui avait conduit les professionnels de santé à diriger leur patientèle uniquement vers le Lévothyrox®. L’ANSM reconnaissait d’ailleurs en 2013, lors d’une pénurie du médicament, que la substitution pouvait entraîner un "déséquilibre transitoire" des taux d’hormones thyroïdiennes.
La perte de cheveux est une "coïncidence"
Trois millions de patients prennent quotidiennement du Lévothyrox® en France. La pétition, si importante soit-elle, ne rassemble donc qu’une infime minorité des usagers de ce médicament. "Ce n’est pas une épidémie", tempère le Dr Hervé Monpeyssen, spécialiste de la thyroïde à l’Hôpital Américain à Paris, qui n’a "pas observé de variations significatives du taux de TSH dans les six derniers mois".
Le thyroïdologue relève seulement un cas de déséquilibre hormonal patent où une allergie au mannitol, le nouvel excipient du Lévothyrox®, peut faire partie des causes possibles. Hormis cette exception, il n’a "rien noté de tangible". Le mannitol, qui se retrouve dans certains chewing-gums, peut provoquer de désagréables ballonnements. En revanche, selon le Dr Monpeyssen, que des patients se plaignent d’une perte de cheveux "relève d’une coïncidence". "Une fois qu’il est mort, un cheveu met plusieurs mois à tomber", explique-t-il, remettant ainsi en question le lien de causalité supposé que certains témoins avaient établi.
Le délai écoulé depuis le changement de formule est encore trop court pour savoir si une modification de la prescription du Lévothyrox® va s’imposer (en tenant compte des variations individuelles des besoins). "A échéance de deux ou trois ans nous pourrons avoir un avis plus éclairé", juge le Dr Monpeyssen.