Ebola présent dans le sperme d'anciens malades neuf mois après leur guérison
D'après les conclusions d'une étude publiée en 2014, la plus longue durée de vie du virus Ebola observée dans le sperme était de 82 jours après guérison. Une nouvelle étude indique que le sperme pourrait continuer de transmettre le virus jusqu'à neuf mois après le rétablissement du patient, impliquant, de fait, un suivi médical plus long et des recommandations aux conjoints.
Le virus Ebola pourrait persister dans le sperme de certains survivants à l'infection au moins neuf mois, soit plus longtemps que ne le pensaient les virologues, selon une recherche publiée mercredi 14 octobre 2015, dans la revue médicale américaine New England Journal of Medicine.
Cette étude, menée sur 93 hommes volontaires en Sierra Leone âgés de plus de 18 ans, est la première de ce type effectuée sur le long terme. Elle montre que des fragments du virus peuvent rester durablement dans l'organisme de personnes guéries, présentant un danger pour leurs conjoints qu'ils peuvent contaminer.
Les chiffres de l'étude
Les 93 participants ont fourni des échantillons de leur sperme pendant deux à dix mois après le début de leur infection. Le sperme de neuf de ces hommes, testé durant les trois premiers mois, était positif pour le virus Ebola, soit 100% du groupe.
Plus de la moitié des sujets (26 sur 40), dont le sperme a été testé entre quatre et six mois après leur maladie, se sont révélés positifs pour Ebola tandis que 26% (11 sur 43), dont le sperme a été testé entre sept et neuf mois après l'infection, étaient encore positifs, d'après cette recherche menée par le ministère de la Santé de Sierra Leone, l'OMS et les Centres américains de contrôle et de prévention des maladies (CDC).
Des conséquences pour l'entourage
"Cette étude (...) nous rappelle que malgré le fait que le nombre de cas d'Ebola continue à diminuer, les survivants et leurs familles sont toujours confrontés aux effets de la maladie", a souligné dans un communiqué Bruce Aylward, responsable de la réponse à Ebola à l'Organisation mondiale de la Santé (OMS).
"Cette recherche apporte davantage d'indices montrant que les malades ayant survécu à Ebola ont besoin d'aide pendant les six à douze mois suivant leur guérison pour s'assurer que leurs partenaires ne sont pas exposés au virus", souligne-t-il.
Des cas via transmission sexuelle ?
Ebola a dévasté trois pays d'Afrique de l'Ouest (Sierra Leone, Liberia et Guinée) depuis la fin 2013, infectant près de 25.000 personnes et faisant plus de 11.000 morts. Pour la deuxième semaine consécutive il n'y a eu aucun nouveau cas d'infection signalé à l'OMS, laissant espérer que cette flambée est désormais sur le point de s'éteindre. Mais les résultats de cette étude sur le sperme, entreprise après plusieurs cas de transmission sexuelle du virus par des hommes survivants à l'infection, suscitent de nouvelles inquiétudes.
Recommandations aux survivants
Les CDC effectuent davantage d'analyses de ces échantillons de sperme pour déterminer si le virus est vivant et potentiellement infectieux.
"Cette étude (...) nous aide à faire des recommandations aux survivants et à leurs proches pour qu'ils restent en bonne santé", souligne le directeur des CDC, le Dr Tom Frieden. Plus de 8.000 hommes ayant guéri d'Ebola dans les trois pays d'Afrique les plus touchés ont ensuite rechuté, selon l'étude.
À ce stade, les survivants devraient avoir leur sperme testé deux fois négatif pour Ebola avant d'avoir des relations sexuelles ou sinon utiliser un préservatif, recommandent ces autorités sanitaires.
Jusqu'à présent une personne est considérée guérie si elle n'a plus de trace du virus dans son sang. Daniel Bausch, un virologue de l'OMS à Genève a expliqué à l'AFP que le virus pouvait subsister dans certaines parties de l'organisme après la guérison car "il faut plus de temps au système immunitaire pour nettoyer ces endroits". Il a cité les testicules, le cerveau, la moelle épinière et le globe oculaire.
Source : Ebola RNA Persistence in Semen of Ebola Virus Disease Survivors — Preliminary Report, October 14, 2015, DOI: 10.1056/NEJMoa1511410