LBD : des ophtalmologistes réclament un moratoire sur leur utilisation
Dans un courrier publié par le Journal du dimanche le 10 mars, 35 ophtalmologistes réclament à Emmanuel Macron un "moratoire" sur l’utilisation des lanceurs de balles de défense (LBD).
"Une telle épidémie de blessures oculaires gravissimes ne s’est jamais rencontrée", s’alarmaient plusieurs ophtalmologistes, dans une lettre adressée au président de la République, le 6 février. Faute de réponse, la lettre a été publiée par le JDD, le dimanche 10 mars. Ces professionnels de santé demandent "instamment un moratoire dans l'utilisation de ces armes invalidantes au cours des actions de maintien de l'ordre", notamment lors des manifestations des Gilets jaunes.
Interrogé par l’AFP, la réponse de Bahram Bodaghi, ophtalmologiste à la Pitié-Salpétrière, est sans équivoque : "Notre devoir de médecin est d’alerter. Il n'y a aucune coloration politique, c'est une démarche très humaniste".
13 000 tirs de LBD, 83 enquêtes
Selon les 35 ophtalmologistes signataires, "les blessures oculaires survenues ces dernières semaines ne sont pas dues au hasard ou à l'inexpérience". Depuis le début du mouvement des Gilets jaunes, en novembre 2018, plus de 13 000 tirs de LBD ont été enregistrés. Près de 80 enquêtes concernant des tirs LBD sont en cours. Les chiffres ont été livrés, ce jeudi, devant le Sénat, par le secrétaire d'État à l'Intérieur, Laurent Nuñez.
Malgré les blessures et les polémiques, le ministère de l’Intérieur défend l'usage de cette arme dite "intermédiaire" dans les opérations de maintien de l'ordre. En cas de retrait des LBD, les forces de l'ordre n'auraient plus que le corps à corps ou leur arme de service pour gérer une situation qui dégénère, assure le ministère. Plus de 2 000 manifestants ont été blessés, à des degrés divers, depuis le début du mouvement. Côté forces de l'ordre, le chiffre est de 1 500.
Un arrêté municipal anti-LBD
Les ophtalmologistes ne sont pas les seuls à aleter sur l'usage de ces LBD. En février, le Conseil de l'Europe avait appelé la France à "suspendre l'usage du LBD dans le cadre des opérations de maintien de l'ordre" afin de "mieux respecter les droits de l'homme". Le Défenseur des droits réclame lui l'interdiction de cette arme, depuis début 2018. Une pétition contre l'usage des LBD a également été lancée, en janvier 2019, par un neurochirurgien de Besançon. Elle totalisait dimanche presque 170 000 signatures.
Lors de l'acte 17 des Gilets jaunes, ce samedi, le maire de Phalsbourg (Moselle) a pris un arrêté municipal "symbolique" pour interdire l'usage du LBD sur sa commune.