Meilleur ami de l'homme ? Quand la salive des chiens provoque la mort
Une bactérie présente dans la bouche des animaux de compagnie peut, si elle est transmise à l’homme, entraîner de graves infections. Une étude publiée par des chercheurs brestois revient sur un cas récent, qui a débouché sur une amputation.
Capnocytophaga canimorsus est une bactérie découverte à la fin des années 1970. On la retrouve dans la salive d’un chien sur quatre, et dans celle de près d’un chat sur six. Sans effet sur la santé buccale de nos animaux de compagnie, elle n’est en revanche pas sans danger pour l’humain. En effet, elle est susceptible d’entrer dans notre organisme en cas de morsure (environ deux tiers des cas cliniques recensés) ou si l’animal hôte lèche des plaies (environ un quart des cas).
Des traitements antibiotiques très efficaces existent mais, s’ils ne sont pas administrés à temps, les conséquences peuvent être très graves.
La littérature médicale internationale recense un peu plus de 500 cas graves d’infections à cette bactérie depuis une quarantaine d’années. Les publications relatent, dans environ un tiers des cas, des cas de choc septique mortel. Parmi les autres conséquences identifiées, on peut citer des gangrènes nécessitant une amputation, des méningites (moins d’une quarantaine de cas catalogués), des infections oculaires, différentes atteintes inflammatoires des vertèbres, ou des développements d’arthrose [1].
Voir également : Morsures, griffures d'animaux : les gestes d'urgence
Un récent cas d'amputation
Des médecins et chercheurs basés à Brest ont récemment rapporté un nouveau cas dans la revue Médecine et maladies infectieuses. Un patient de 56 ans a été admis au CHU de Brest avec des lésions sombres sur les membres et sur le ventre. Les analyses ont révélé que l’infection à C. canimorsus avait engendré une méningite bactérienne, doublée d’une nécrose de l’extrémité de plusieurs membres. Ses doigts de pieds, mais également plusieurs doigts de sa main, ont dû être amputés.
"Le patient [n’a pas relaté] de morsure d’animaux, mais [nous avons constaté] l’existence de petites plaies au niveau des membres supérieurs, possiblement léchées par ses chiens", commentent les auteurs, qui rappellent que cette voie d’infection n’est pas à négliger par les cliniciens lorsque ceux-ci doivent décider du type d’antibiotiques à administrer à un patient.
En août dernier, un cas similaire avait été rapporté dans les médias.
Tout le monde n’est pas égal face au risque d’infection. Selon la littérature scientifique, une ablation de la rate ou des antécédents d’alcoolisme semblent créer un terrain favorable à la prolifération de C. canimorsus. Les hommes sont deux fois plus touchés que les femmes.
la rédaction d’Allodocteurs.fr
[1] Voir notamment :
- C. Cleuziou et al."Beware man's best friend". Spine, 2010. vol 35(25), pp. 1520-1. doi:10.1097/BRS.0b013e3181ecc080.
- T. Butler. "Capnocytophaga canimorsus: an emerging cause of sepsis, meningitis, and post-splenectomy infection after dog bites". European Journal of Clinical Microbiology & Infectious Diseases, 2015. vol. 34(7), pp 1271-1280. doi:10.1007%2Fs10096-015-2360-7
- B. Cadre et al., "« My Dog Deafened Me! » : Case Report of Capnocytophaga canimorsus Infection and Literature Review." Laryngoscope, 2018. doi:10.1002/lary.27477
- M. Amara et al. "Capnocytophaga canimorsus as a cause of spontaneous Gram-negative bacilli community-acquired meningitis". CMI, 2018. doi:10.1016/j.cmi.2018.07.021
En France, trois cas d'infections similaires ont été rapportés ces dernières années. En février 2017, une morsure de chien avait entraîné la mort d'un varois de 47 ans. En septembre 2017, des médecins du CHU de Caen ont rapporté une infection fatale chez un homme de 48 ans, décédé deux jours après avoir été mordu. En avril 2018 dans La Revue de Médecine Interne, des bactériologistes de Charente-Maritime (Royan) ont également rapporté le décès d'un homme de 54 ans.