Surirradiés d'Epinal : jugement reporté
La cour d'appel de Paris devait se prononcer ce 2 avril en début d’après-midi sur le scandale sanitaire des surirradiations à l'hôpital d'Épinal – le plus grave accident de ce type jamais enregistré en France. Le rendu du jugement a été reporté et une nouvelle audience est prévue fin juin. L'accusation a requis de la prison ferme contre deux médecins et un radiophysicien.
Les deux médecins, Jean-François Sztermer, 66 ans, et Michel Aubertel, 64 ans, avaient été condamnés fin janvier 2013 à quatre ans de prison, dont dix-huit mois ferme (ainsi qu’à 20.000 euros d'amende et à la radiation à vie). Pour sa part, le radiophysicien Joshua Anah, 57 ans, avait été condamné à trois ans, dont 18 mois ferme (plus 10.000 euros d'amende et cinq ans d'interdiction d'exercer).
Les trois hommes avaient fait appel et au nouveau procès, en novembre 2014, l'accusation avait demandé la confirmation de ces peines, jugeant qu'ils s'étaient bien rendus coupables "d'homicides et blessures involontaires" et dénonçant leurs "négligences", "nonchalance" et "dissimulation".
Près de 450 patients, principalement traités pour cancer de la prostate, avaient été victimes de surirradiations dans l'établissement entre 2001 et 2006, lors de deux incidents distincts.
Douze en sont morts, et beaucoup souffrent de séquelles très graves.
Pour l'accusation, les deux médecins ont "prescrit au-delà des doses recommandées sans prévenir les patients et sans disposer des moyens humains et techniques nécessaires" dans le service. Et une fois l'accident découvert, ils se seraient par ailleurs rendus coupables de non-assistance à personne en danger en n'alertant pas les malades ou leurs médecins traitants, alors même qu'ils étaient "conscients des complications possibles". Leurs avocats se sont attachés à démontrer "la difficulté à prouver la responsabilité directe" de leurs clients, appelant les juges à ne pas condamner pour le principe.
Quant au radiophysicien, l'avocat général avait dénoncé ses "négligences" de "dilettante" ayant conduit à des erreurs de manipulation lors de l'administration des soins et la non prise en compte dans la dosimétrie totale de doses de rayons reçues lors de clichés de contrôle. Ses avocats avaient alors souligné qu'il était le seul radiophysicien à l’hôpital. Selon eux, c’est le contexte de "sous-effectif" qui a conduit à une "erreur" qu'il "a reconnue" et pour laquelle il a "demandé pardon" mais qu'il n'avait sans doute "pas les moyens d'éviter".
En première instance, les juges avaient déclaré les deux médecins coupables d'homicides involontaires, alors même que le procureur n'avait retenu contre eux que les infractions de non-assistance à personne en danger et destruction de preuves.
"Ça fait quasiment huit ans que l'on se bat et que l'on attend, on aimerait bien que ça s'arrête", a déclaré à l'AFP Philippe Stabler, président de l'association des victimes, rappelant que celles-ci n'avaient pas été "preneuses" de ce deuxième procès. Une quinzaine de victimes devraient être présentes pour entendre l'arrêt de la cour d'appel. Contrairement aux cinq semaines d'audiences, cette lecture ne sera pas retransmise en direct au palais de justice d'Epinal.
Ce procès en appel ne concernait pas quatre autres prévenus relaxés en première instance de non-assistance à personne en danger: l'ex-directrice de la Ddass des Vosges, l'ancien directeur de l'agence régionale d'hospitalisation de Lorraine, la directrice de l'hôpital et l'établissement lui-même comme personne morale. Le parquet n'avait pas fait appel de ces relaxes.