Carmat®, une communication (presque) maîtrisée autour du coeur artificiel
Les informations relatives à l'essai clinique du premier cœur artificiel autonome sont transmises au compte-goutte à la presse par la société Carmat®. Le 16 mars 2014, le Journal du Dimanche a publié des interviews du cardiologue Alain Carpentier et de la famille du patient greffé, présentant des informations non validées par l'entreprise. Le professeur Carpentier y fait état d'un "court-circuit" responsable de l'arrêt "brusque" de l'appareil - informations démenties par les représentants de la société.
"Le cœur s'est arrêté brusquement. Il y a eu un court-circuit. Cela a entraîné un arrêt cardiaque identique à celui que peut présenter un cœur naturel pathologique", détaille à l'hebdomadaire le professeur Alain Carpentier, qui a participé à la conception la prothèse. "Nous cherchons à comprendre d'où vient ce problème électronique et pourquoi."
"On ne connaît pas encore les causes exactes du décès", poursuit le cardiologue. "Mais certaines ont déjà été écartées et c'est le plus important à mes yeux : la mort n'est pas liée à une complication du malade, ni au principe fondamental de cette prothèse qu'est l'emploi de matériaux biocompatibles pour limiter la formation de caillots et le risque de thrombose".
Les premières semaines, le patient "récupérait très bien", raconte le Pr Carpentier. "Et puis il a présenté quelques complications. [...] Le corps a ses limites. Avec son passé pathologique (voir encadré), [son] organisme était comme un vêtement trop usé. Vous le réparez d'un côté, il lâche de l'autre".
Une simple hypothèse, affirme Carmat®
Dans la journée du 16 mars 2014, la chaîne d’information iTélé s’était rapprochée de la société Carmat®, qui expliquait aux journalistes ne pas suspendre le programme d’essai clinique.
Carmat® qualifiait "d'hypothèse" à ce stade les explications du Pr Carpentier, une "hypothèse qui est en train d'être étudiée. C'est pour cela qu'on ne parle pas encore de suspension de l'essai".
L'entreprise déclarait toutefois qu'il n'y aurait pas de nouvelle implantation de cœur artificiel tant que les causes du décès du premier patient ne seraient pas établies. Au lendemain du décès du premier patient, le 2 mars 2014, 75 jours après l'implantation d'un cœur artificiel, Carmat® avait annoncé maintenir son programme d'essais qui comprenait quatre patients "au pronostic vital engagé à brève échéance".
Le programme d'essai "n'est pas du tout remis en cause puisque le concept général est validé", précisait alors le Pr Latrémouille qui avait pratiqué l'intervention.
A 8h10, le 17 mars 2014, sur Europe 1, le cofondateur de Carmat® Philippe Pouletty déclarait également que la cause de la mort du patient n’était pas connue. "La prothèse est un outil complexe, en relation avec le système vasculaire du patient et l'unité d'alimentation, toute simplification excessive est fausse", a-t-il insisté.
M. Pouletty a également annoncé qu'une fois terminée l'analyse du premier cœur artificiel implanté, une nouvelle greffe serait tentée. Ce deuxième essai aura lieu "probablement dans quelques semaines", a-t-il affirmé, précisant qu'il dépendrait de "la conjonction de la disponibilité d'un malade qui répond aux critères et la fin de l'analyse par les ingénieurs de Carmat et les cliniciens."
Après une clôture à la Bourse à 89,80 euros vendredi 14 mars 2014, l'action Carmat® se négociait lundi à l’ouverture à 80,15 euros (9h00). A 9h45, l'action était remontée à 87,30 euros. A onze heure, elle s’était stabilisée autour de 85,40 euros.
EN SAVOIR PLUS :
- L'insuffisance cardiaque : une maladie irréversible, article du 23 décembre 2013
- Coeur artificiel : ''un espoir formidable'' pour les patients ? article du 23 décembre 2013
- La chirurgie cardiaque, toute une histoire, document interactif du 28 février 2014
Souffrant d'insuffisance cardiaque terminale, Claude Dany avait été choisi pour recevoir le premier coeur artificiel autonome Carmat® pour pallier la pénurie de coeurs à greffer mais aussi apporter une solution aux contre-indications à la transplantation.
L'intervention, qui avait duré une dizaine d'heures, avait été réalisée le 18 décembre 2013 par les professeurs Latrémouille et Duveau dans le service du Pr Fabiani, sous la direction du Pr Carpentier.