À quand des meetings politiques accessibles pour les malentendants ?
Les associations de sourds et malentendants réclament une campagne électorale plus accessible. Richard Darbera, président de Bucodes-Surdifrance, était l'invité du Magazine de la Santé, le 15 février 2017.
Meetings, débats politiques, interventions télévisées… À quelques mois de l'élection présidentielle, les candidats de tous bords font entendre leur voix. Pas assez distinctement pour les associations de sourds et de malentendants, qui dénoncent une campagne peu accessible. D'après elles, le manque de sous-titrages et d'interprètes en langue des signes entrave injustement la citoyenneté de ceux qui souffrent d'un handicap auditif.
Richard Darbera, président de Bucodes-Surdifrance, le bureau de coordination des associations de sourds et malentendants, répond à nos questions.
- À la télévision, la télé-transcription pour sourds et malentendants existe déjà. Est-ce suffisant ?
Richard Darbera, président de Bucodes-Surdifrance : " En France, il y a six millions de malentendants, soit un Français sur dix. J’ai regardé ce matin les sites des candidats et il n’y en a qu’un seul qui dispose de sous-titres systématiques qui permettent de comprendre ce qu’il dit. Les autres font confiance à You Tube pour le sous-titrage. Je vous conseille d'aller regarder, c’est très amusant…. Nous, ce que nous voulons c’est que les vidéos soient sous-titrées systématiquement."
- Mais comment faire pour le direct ?
Richard Darbera : "Le direct est un autre problème. Le sous-titrage est obligé d’aller aussi vite que les gens qui parlent. Alors quand il y a des candidats qui sont posés, qui ménagent des silences, ça fonctionne à peu près. Mais quand d’autres essaient d’exposer tout leur programme en deux minutes, le sous-titreur a beaucoup de mal à suivre. Le pire, c’est quand les journalistes interrompent le candidat ou parlent en même temps que lui. Là, la personne chargée du sous-titrage est perdue et les gens comme moi qui regardent l’écran également. Même en passant la vidéo au ralenti, on a du mal."
- Certains candidats font pourtant des efforts. Pendant les meetings notamment, il y a parfois des interprètes qui signent…
Richard Darbera : "C’est très important d’avoir un interprète en langue de signes, mais ça ne touche que 60.000 personnes, seulement une personne sur 1.000. Cela ne correspond pas aux six millions de malentendants qui ne comprennent pas forcément la langue des signes. Il faut savoir aussi que c’est dans l’intérêt des candidats, car la surdité touche les tranches d’âge qui votent le plus. Entre 50 et 77 ans. Donc pour nous, ce qu’il faut c’est du sous-titrage plus systématique. Généralement, quand le candidat parle, il y a un écran vidéo à côté. Il en faudrait un deuxième avec un sous-titreur."
- Vous demandez également à ce que soient mis en place des systèmes de boucles magnétiques. De quoi s’agit-il exactement ?
Richard Darbera : "Comme moi, deux millions de personnes sont équipées d’appareils auditifs en France. Quand on est dans une salle de conférence et qu’il y a des hauts-parleurs, on n'entend rien à cause de l’écho. Mais s’il y a une boucle magnétique, on peut mettre nos appareils en mode boucle magnétique, et on entend comme si la personne nous parlait à l’oreille. Cela supprime l’écho, ça supprime les bruits environnants. Et techniquement, ce n’est pas très compliqué à mettre en place. Normalement c’est obligatoire dans les établissements recevant du public mais très souvent, l’installation a été mal faite et ça marche mal ou pas du tout."