Plan hôpital : les cinq chantiers du "Ségur de la Santé"
Le gouvernement ouvre ce 25 mai plusieurs chantiers pour réorganiser l’hôpital public. L’objectif de ce nouveau plan : améliorer les conditions de travail des soignants et la prise en charge des malades.
Salaires, temps de travail, effectifs… Sous pression après la crise du coronavirus, le gouvernement a promis de travailler sur un nouveau plan pour l’hôpital, baptisé Ségur de la Santé. Lancé ce 25 mai, ce plan comporte plusieurs chantiers dont l’objectif est d’améliorer la prise en charge des malades et les conditions de travail des soignants. Cinq principaux sujets sont à partir d'aujourd’hui sur la table du "Ségur de la santé".
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Rehausser les salaires du personnel soignant
Premier point à l’ordre du jour : la hausse des salaires du personnel soignant. Interpellé lors d'une visite à l'hôpital, Emmanuel Macron a promis de "mettre fin" à la "paupérisation" des personnels soignants, en engageant une hausse des rémunérations, parallèlement aux primes annoncées face à la crise du Covid-19.
Ce geste est attendu depuis des années par les syndicats, qui pointent la faiblesse des salaires hospitaliers, notamment pour les infirmiers : ces derniers touchent 1.500 euros net en début de carrière, soit l'un des niveaux les plus faibles des pays de l'OCDE.
S'agissant des infirmiers, l'objectif est d'atteindre un "niveau de rémunération" équivalent "à la moyenne européenne", a assuré le ministre de la Santé, Olivier Véran, en précisant que les augmentations toucheraient à la fois les hôpitaux et les Ehpad. Selon les syndicats, ce différentiel est d'environ 300 euros par mois. Ces derniers mettent toutefois en garde contre une mesure limitée aux seuls infirmiers. "Il faut un geste rapide pour l'ensemble des personnels hospitaliers", a prévenu Julie Ferrua, de SUD Santé.
Remettre en cause les 35 heures
Deuxième chantier du Ségur de la santé : le temps de travail. Olivier Véran a dit vouloir "revoir le cadre d'organisation du temps de travail à l'hôpital", estimant nécessaire de remettre en cause les "carcans qui empêchent ceux qui le souhaitent de travailler davantage".
Cette annonce a fait bondir plusieurs syndicats, attachés aux 35 heures, qui rappellent que de nombreux salariés n'ont jamais pu accéder à la réduction du temps de travail, faute d'embauches suffisantes dans les hôpitaux.
La question n'est pas de "déréglementer le temps de travail", a toutefois précisé le ministre de la Santé, disant vouloir simplement permettre "aux salariés qui le souhaitent" d'organiser "leur temps de travail différemment". Cette réforme correspond à une demande de longue date de la Fédération hospitalière de France (FHF), qui préconise un "dispositif d'autonomie avancée" pour les hôpitaux, désorganisé selon elle par la réforme des 35 heures.
Valoriser les carrières pour mieux recruter
Le troisième point concerne les carrières et les effectifs. L’exécutif a ainsi promis de mettre sur la table des discussions la "question des montées en compétences", pour "mieux valoriser toutes les carrières, tous les métiers et développer de nouveaux parcours professionnels". L'objectif : renforcer l'attractivité des hôpitaux, qui peinent pour beaucoup à recruter et à fidéliser leurs salariés en raison des conditions de travail mais aussi, selon les syndicats, d'une gestion inadaptée des ressources humaines.
Chez les infirmiers, "30% des nouveaux diplômés abandonnent la profession dans les cinq ans", souligne ainsi Thierry Amouroux, porte-parole du SNPI. Dans les hôpitaux, des milliers de postes restent par ailleurs vacants. Cette situation oblige les hôpitaux à fermer des lits ou bien à embaucher des intérimaires. Un choix souvent coûteux, les intérimaires profitant souvent de la pénurie pour exiger des rémunérations supérieures aux grilles salariales.
Centrer le système de santé sur le patient
Ensuite, le Ségur de la Santé doit débattre de l’organisation des soins. "Notre système de santé n'est pas encore assez centré sur le patient, sur son parcours. Il n'est pas assez performant non plus dans son pilotage", a jugé Olivier Véran, disant vouloir améliorer sa gouvernance.
A ce stade, le gouvernement n'a pas précisé les réformes concrètes qu'il entendait mettre en œuvre. Mais il a promis de combattre la "suradministration", en donnant plus de poids aux "médecins".
L'exécutif pourrait ainsi réformer un peu plus la tarification à l'activité (T2A), instaurée en 2003. Ce système, qui fixe les ressources des hôpitaux en fonction des actes effectués, est souvent accusé de pousser à la "course au volume".
Il pourrait aussi mettre un coup d'arrêt aux fermetures de lits, très critiquées par les hospitaliers : en l'espace de 20 ans, près de 100.000 lits ont en effet été supprimés dans les cliniques et hôpitaux.
Investir massivement et renflouer la dette
Enfin, le dernier gros chantier de ce nouveau plan de l’hôpital est celui de la dette et de l’investissement. Fin mars, Emmanuel Macron avait promis "un plan massif d'investissement" à l'issue de la crise. Ce plan, destiné notamment à renouveler le matériel, concernera à la fois les hôpitaux et les Ehpad, a précisé Olivier Véran, sans indiquer le montant de l'enveloppe allouée.
La question de la dette des hôpitaux, aujourd'hui proche de 30 milliards d'euros, et au cœur de multiples discussions entre l'exécutif et les fédérations hospitalières, pourrait également revenir sur la table.
Dans le cadre du "plan hôpital" décidé à l'automne 2019, le gouvernement avait annoncé une reprise de dettes "massive" de 10 milliards d'euros sur trois ans. Plus récemment, lors du Conseil des ministres du 20 mai, Olivier Véran a évoqué un "effort de 13 milliards d'euros".