Morphine sans pavot : une découverte inquiétante ?
Fabriquer de la morphine sans cultiver le pavot pourrait devenir possible grâce à une équipe de chercheurs américains. Même si cette découverte est prometteuse, les scientifiques n’en restent pas moins inquiets pour le risque de mésusage lié au trafic de drogue.
Il suffirait d'un peu de levure génétiquement modifiée et d'un soupçon de sucre pour fabriquer de la morphine, sans avoir recours à la culture du pavot. C'est en tout cas ce qu'affirme une équipe de chercheurs américains de l'université de Californie à Berkeley. En d'autres termes, toute personne ayant quelques connaissances en biologie pourrait confectionner de la morphine dans sa cuisine !
Une levure génétiquement modifiée pour produire la morphine
Pour produire la morphine, les scientifiques ont introduit un gène issu de la betterave dans la levure. Ce gène permet à la levure de transformer de la tyrosine, un acide aminé dérivé du sucre, en réticuline, point de départ de la confection de la morphine, de la codéine et d'autres substances utilisées en médecine comme antalgiques.
La transformation de réticuline en morphine par la levure était déjà connue. Mais il manquait l'étape de modification de la tyrosine en réticuline pour maîtriser cette fabrication, sans avoir recours à la culture du pavot. Les chercheurs n'ont pas produit de la morphine, mais pensent qu'une souche modifiée de levure, capable de le faire, pourrait être disponible d'ici deux ans. Le but de cette recherche est d'ouvrir la voie à des analgésiques moins chers et entraînant moins de dépendance par rapport aux médicaments dérivés du pavot.
Une aubaine pour les narcotrafiquants ?
Mais les chercheurs reconnaissent que ce procédé pourrait être une aubaine pour les narcotrafiquants et réclament des lois plus sévères. D’autres scientifiques parlent même de renforcer la sécurité des laboratoires et la limitation de la production des souches de levure pour empêcher les narcotrafiquants de s'en procurer. Les souches pourraient également être conçues de telle sorte qu'elles nécessitent des ajouts particuliers ou des conditions de laboratoires spécifiques, compliquant la tâche des gangs.
Une addiction physique et psychologique
La morphine est un puissant analgésique de "palier III", utilisée en cas de douleurs très intenses. En se fixant sur des récepteurs au niveau du système nerveux central, elle contrôle la perception de la douleur. Outre l’addiction physique et psychologique qu’il provoque, cet opiacé peut être responsable d’effets indésirables importants tels qu'une constipation, une rétention d’urines, des nausées, une somnolence et une dépression respiratoire. Non dénuée de risques, sa prescription est sécurisée et ne peut être administrée que dans des indications précises.
Le saviez-vous ?
Le terme morphine provient du nom du dieu grec du sommeil et des songes, Morphée. Cette détermination lui a été attribuée pour son effet sédatif puissant.