La rébellion s’organise contre les ordres des professionnels de santé
Invoquant leur "inutilité" et leur "nocivité", le Mouvement d’Insoumission aux Ordres Professionnels (MIOP) demande la dissolution des ordres de santé. Pour lancer l’alerte, il appelle au refus de payement des cotisations annuelles.
"Résistance" et "désobéissance collective". Ce sont les maîtres-mots du manifeste que publie le Mouvement d’Insoumission aux Ordres Professionnels (MIOP) le 29 janvier 2020. Leur revendication est catégorique : dissoudre tous les ordres de santé (médecins, chirurgiens-dentistes, vétérinaires, pharmaciens, sages-femmes, masseurs-kinésithérapeutes, pédicures-podologues et infirmiers).
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"Inutilité et nocivité"
Pourquoi un tel mouvement de rébellion de la part des soignants ? "Les professionnels de santé se rendent compte de l’inutilité et de la nocivité des ordres professionnels dans le domaine de la santé" résume Didier Lantz, cadre de santé issu de la kinésithérapie et président du MIOP.
Une prise de conscience grandissante, qui se répand même parmi les jeunes médecins depuis la publication en décembre 2019 du rapport de la Cour des comptes qui étrillait le Conseil National de l’Ordre des Médecins (CNOM) et émettait de graves accusations : défaut de protection des victimes d'abus sexuels, sanctions disciplinaires trop tardives, conflits d'intérêts avec les laboratoires pharmaceutiques, comptes incomplets et insincères, indemnités indûment perçues...
Les exemples où les ordres de santé "bafouent l’éthique professionnelle et les valeurs qu’ils devraient défendre se multiplient", selon le MIOP. "Jusqu’à présent, l’Ordre n’a jamais montré quelque chose de pertinent vis-à-vis des patients ou des professions dont ils sont censés être garants de l’honneur ou de la probité" complète Didier Lantz.
"Complaisance" envers les agresseurs et les harceleurs
Derniers cas en date : celui de la "complaisance de l’Ordre des médecins envers les praticiens agresseurs sexuels", notamment à l’égard de Joël Le Scouarnec, chirurgien pédocriminel multi-récidiviste. Dans cette affaire, "(la responsabilité) de l’Ordre des médecins, alerté dès 2005 mais qui n’a rien fait par la suite, n’est pas la moindre" accuse le MIOP. L’exemple des médecins du travail "condamnés par le CNOM pour avoir mis en avant des situations de harcèlement et d’abus sexuels par les employeurs" figure également parmi les actions "nocives" que le MIOP reproche aux ordres.
Refus de payer les cotisations annuelles
Mais comment interpeler les responsables politiques et porter le débat d’une dissolution des ordres sur le devant de la scène ? En refusant simplement de payer les cotisations annuelles aux ordres, propose le MIOP. Le montant de cette cotisation, variable selon les corps de métier, s’élève à environ 300 euros par an pour les professionnels libéraux. "Le refus de payer est un choix personnel qui n’entraîne pour le professionnel ni sanction, ni interdiction d’exercer mais une simple situation juridique de dette" précise Didier Lantz.
Initialement signé par 123 professionnels de santé, le manifeste rassemble aujourd’hui plus de 400 signataires. Et ce chiffre pourrait encore grimper, explique le président du MIOP : "une grande majorité des professionnels sont contre les ordres mais comme dans beaucoup de situations françaises, ils forment une majorité silencieuse qui paye et adhère par habitude ou par tranquillité, mais qui n’en pense pas moins."
Prochaine étape pour le MIOP : continuer "à suivre et à rapporter les exactions des ordres des professionnels de santé" et se concentrer sur l’actualité à venir avec, en première ligne, le procès de Joël Le Scouarnec devant les assises de Saintes en mars prochain.
Contacté et interrogé sur ce mouvement de protestation par la rédaction d’Allodocteurs.fr, le Conseil national de l’Ordre des médecins a déclaré qu’il ne ferait pas de commentaires.