Agnès Buzyn : "Contre la théorie du complot, il n’existe malheureusement aucun vaccin"
La ministre de la Santé souhaite étendre la couverture vaccinale et lutter contre la désinformation.
"Le 1er janvier 2018 est une étape majeure dans le renforcement de la prévention", a annoncé Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé lors d’une conférence donnée conjointement le 5 janvier avec le Dr Daniel Lévy-Bruhl. Après un point sur les changements de politique vaccinale qui prennent effet en ce début d'année, la ministre a rappelé l’importance de la lutte contre la diffusion de fausses informations, qui nuisent à l’efficacité de la couverture vaccinale. "Contre la théorie du complot, il n’existe malheureusement aucun vaccin", a-t-elle déploré.
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20 personnes mortes de la rougeole à la fin des années 2000
Pour Agnès Buzyn et le dr Lévy-Bruhl, cette campagne de désinformation est loin d’être inoffensive. Ils ont rappelé l'enjeu de la vaccination : l’immunité de groupe. Certains individus – au premier rang desquels les bébés de moins d’un an et les personnes immunodéprimées – ne peuvent être vaccinées contre certaines maladies. Et sont de ce fait extrêmement vulnérables. A partir du moment où ces individus entrent en collectivité, il est impératif que les personnes autour d’eux soient vaccinées. Néanmoins, une défiance accrue envers les vaccins pourrait affaiblir cette immunité de groupe, et mettre en péril ces personnes vulnérables. En effet, plus un enfant est jeune quand il contracte une maladie pour laquelle il existe un vaccin, plus il a de risques de développer une complication, qui pourrait s’avérer mortelle.
"C’est ce qui s’est passé avec la rougeole à la fin des années 2000, où la France a connu épidémie de grande ampleur", rappelle le Dr Lévy-Bruhl. A cette époque, on a compté 20 décès liés à cette maladie, dont 95 % de nourrissons et de personnes immunodéprimées. "Des décès qui auraient normalement dus être évités grâce à l’immunité de groupe", explique le Daniel Lévy-Bruhl. Mais aujourd’hui, la rougeole, qui nécessite deux vaccinations, a un taux de couverture peu satisfaisant (91 % pour la première dose et 79 % pour la seconde).
200 personnes mortes de la méningocoque C depuis 2011
Ce qui inquiète également de nombreux professionnels de santé, c’est la virulence de la méningite à méningocoque C, qui a touché 800 personnes et en a tué 200 en France depuis 2011. A l’heure actuelle, la couverture vaccinale pour ce virus est de seulement 71 %. D’où l’importance de rendre la vaccination obligatoire. Et le Dr Lévy-Bruhl de rappeler : "Aux Pays-Bas, la couverture vaccinale contre la méningocoque C a atteint 94 %, et la maladie a aujourd’hui disparu." En France pourtant, la semaine dernière encore, un jeune homme de 23 ans est décédé d’une méningite, rappelle Agnès Buzyn.
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Car la France a pris beaucoup de retard en termes de couverture vaccinale, affirment la ministre de la Santé et le Dr Daniel Bruhl-Lévy. Aussi l’obligation est-elle désormais le moyen le plus efficace et le plus rapide de le rattraper selon eux. Le but ici, rappellent les deux spécialistes, est d’éradiquer la maladie : certains vaccins pourraient donc, à terme, ne plus être nécessaires. Quant aux effets indésirables, ils sont formels : il en existe, mais ils pèsent peu par rapport aux bénéfices de la vaccination.
"Les pouvoirs publics doivent prendre leurs responsabilités"
Des arguments qui n’ont pas semblé atteindre Serge Rader, pharmacien et correspondant d'un journal italien. Celui-ci a en effet pris à parti la ministre, lui affirmant qu’on dénombre aujourd’hui plus de 8000 effets collatéraux dus aux vaccins, et que 30 % d’entre eux sont graves. "De fausses informations", pour Agnès Buzyn, qui "assume parfaitement la responsabilité de sauver la vie de dizaines d’enfants et de gens par an". Et de conclure : "Quand on prend la décision de désinformer l'opinion publique, qu'on fait circuler de fausses informations et que des familles hésitent et ne font pas vacciner des enfants, et que ces familles perdent un enfant de méningite, aujourd'hui elles ne peuvent pas se retourner contre ces « distilleurs » de mauvaises informations. Et donc les pouvoirs publics prennent leurs responsabilités."
Avant le 1er janvier, trois vaccins étaient obligatoires : contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite, regroupés dans le DTP. Celui-ci est injecté au nourrisson à trois reprises à deux, quatre et onze mois. Désormais, huit vaccins supplémentaires seront obligatoires : les oreillons, la coqueluche, la rougeole, l’hépatite B, le méningocoque C, la rubéole, la bactérie Haemophius influenzae et le pneumocoque. Ce passage à 11 vaccins obligatoires a entraîné la défiance d’une partie de l’opinion publique, très présente sur les réseaux sociaux. Pourtant, à l’heure actuelle, plus de 70 % des enfants français sont déjà vaccinés contre ces 11 maladies.