Cinq questions sur la circoncision
Qu'est-ce qu'une circoncision ? Protège-t-elle des infections sexuellement transmissibles ? A-t-elle un retentissement sexuel ? Les explications d'un urologue pour tout comprendre sur cette pratique.
S'il est un sujet sensible pour les hommes, c'est bien la circoncision... Assimilée par certains à une mutilation sexuelle, considérée par d'autres comme un rituel religieux ancestral et incontournable, la circoncision est appelée par les chirurgiens une posthectomie, réalisée pour des raisons médicales bien précises.
Qu'est-ce que la circoncision ?
Le geste chirurgical correspond anatomiquement à l'ablation du prépuce, la partie du fourreau de la verge qui recouvre le gland au repos et qui au moment de l'érection se rétracte pour permettre que le gland se décallote. Le prépuce est constitué de deux faces, l'une extérieure cutanée et l'autre interne muqueuse.
L'origine de la circoncision remonte à l'Egypte pharaonique, soit 2000 ans avant Jésus-Christ. Il s'agissait alors d'un rituel de purification, à visée hygiénique : lorsque le gland n'est pas décalotté et lavé, il se produit une accumulation de smegma, cette matière blanchâtre qui contient des cellules mortes et des sécrétions, présente au niveau du sillon à la base du gland. Sa macération peut être l'origine de lésions infectées.
La circoncision a ensuite été reprise par les religions juive, où elle a lieu le huitième jour, en symbole d'attachement à la religion, et musulmane, où elle n'est pas spécifiquement écrite dans le Coran mais dans les écrits ultérieurs, ou Hadiths, du prophète Mahomet, par une sunna (source de droit islamique). Elle est réalisée généralement plus tard, une fois la propreté acquise, et reste très fortement ancrée dans la population de culture musulmane.
Dans certains cas extrêmes et prolongés chez les hommes à l'hygiène douteuse, qui ne se décalottent pas et ne nettoient pas bien le smegma, un risque de cancérisation existe. La circoncision a alors un intérêt en terme d'hygiène.
D'après le Dr Faix, urologue et responsable du Comité d'Andrologie et de Médecine sexuelle de l'Association française d'Urologie, ce n'est pas une raison pour la recommander, à l'instar des Etats-Unis, car c'est une tumeur rare, liée essentiellement au manque chronique d'hygiène. La circoncision ne doit pas être faite de façon préventive, mais uniquement en cas de nécessité médicale.
Circoncision ou posthectomie, quelle différence ?
Le but de ces deux opérations est le même puisqu'il consiste à retirer le prépuce mais la raison est différente : la posthectomie est le geste que les chirurgiens exécutent, pour des raisons médicales (difficultés ou impossibilités de décalottage, comme avec le phimosis, inflammation chronique avec douleurs, lésions cutanées chroniques).
La circoncision rituelle est réalisée classiquement sans anesthésie et par un mohel au huitième jour dans la religion juive, et par un médecin ou un préposé en général dans la petite enfance dans l'islam. Il ne s'agit pas d'une intervention chirurgicale, les points de sutures ne sont pas effectués, la cicatrisation est donc plus longue et la qualité du geste chirurgical n'est bien sûr pas la même qu'avec un chirurgien, aboutissant à l'obligation d'une prise en charge médicale dans certains pays.
En effet, il y a davantage de complications, telles que les adhérences, les fistules, les hémorragies, les infections et même le décès, lorsque les conditions d'hygiène ne sont pas remplies. En Algérie, par exemple, le geste doit désormais être réalisé en milieu médical.
La société de chirurgie pédiatrique recommande de ne pas effectuer de circoncision chez les enfants de moins de sept ans sans raison médicale, d'avoir l'accord des deux parents, auxquels les risques et les complications de l’intervention doivent être expliqués. De plus, l'intervention et l'hospitalisation ne sont pas remboursées en cas de demande personnelle.
Quels sont les retentissements sexuels de la circoncision ?
Quand la circoncision a lieu durant l'enfance, la question ne se pose pas : dès le début de vie sexuelle, ces hommes sont habitués à un gland décalotté et kératinisé (de texture se rapprochant de la peau).
Quand la circoncision a lieu à l'âge adulte, la texture change après une posthectomie. Les sensations sont différentes, avec des complications de l'ordre de l'exceptionnel et il n'y a pas de retentissement sexuel même si les études sont contradictoires. Il y a même une amélioration chez certains hommes, compte tenu des problèmes avant le geste, sans augmentation de la durée du rapport sexuel.
La circoncision protège-t-elle réellement des IST et du VIH ? Par quel biais ?
Sur un plan strictement anatomique, elle protégerait partiellement du risque d'infection sexuellement transmissible, VIH compris, parce que la barrière muqueuse est plus épaisse (la transmission des infections est favorisée par les micro-fissures et les traumatismes de la muqueuse, rendant le passage sanguin plus facile). Certaines études chiffrent même la diminution du risque de 50 à 60%, estimant que la circoncision en Afrique serait un moyen de prévention intéressant dans les pays où le VIH est endémique et où les autres moyens de prévention sont insuffisants.
Dans l'étude du Pr Bertran Auvert, publiée en 2013, la réduction du taux des nouvelles infections chez les hommes circoncis se chiffrerait de 57 à 61% par rapport aux non circoncis. Mais l'auteur rappelle que le sperme gardant son pouvoir infectieux, les femmes et les hommes homosexuels passifs ne sont pas protégés.
Il n'en reste pas moins illogique de penser que ce geste est la solution à la pandémie du VIH, la situation n’étant pas superposable en dehors de l'Afrique, la persistance du message du port du préservatif reste donc la seule barrière réaliste contre le VIH !
La circoncision est-elle une mutilation sexuelle ?
Non, il ne s'agit pas d'une mutilation sexuelle. L'équivalent anatomique de l'excision chez la femme serait de couper le gland de l'homme ! Anatomiquement, il est complètement erroné de faire le parallèle entre les deux... Mais il est justifié de poser la question des droits de l'enfant, qui n'a pas son mot à dire lorsque la circoncision est faite, lorsqu'il est bébé ou petit garçon. L'Assemblée du Conseil de l'Europe(1), dans sa résolution du premier octobre 2013, assimile la circoncision à une violation des droits des enfants.
En France, la circoncision rituelle sans être clairement autorisée n’est pas interdite et le Conseil d'Etat a estimé, en 2004, "que la circoncision rituelle constitue une pratique religieuse, dépourvue de tout fondement légal, mais néanmoins admise", elle n'est alors pas prise en charge par la sécurité sociale. Il reste donc un débat vif sur ce geste ancestral qui anime autant les médecins que les autorités politiques ou religieuses et qui n'est pas prêt d'être résolu.
* Le Dr Faix n'a pas de conflits d'intérêts avec cet article.
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