"Thérapie des gifles" : un rebouteux reconnu coupable de la mort de deux personnes
Ses deux victimes diabétiques ont été incitées à se priver de soin pour suivre la thérapie médicale alternative à base de gifles de leur gourou.
Une médecine alternative ancestrale, longtemps oubliée, et apprise auprès de maîtres d'arts martiaux, d'ermites, d'agriculteurs et de vieux pêcheurs chinois. Telle est la présentation du "paida lajin", une soi-disant méthode de guérison auto-réparatrice, focalisée autour d'une thérapie par les claques et vantée par son créateur, un certain Hongchi Xiao. Improbable, n'est-ce pas ? Des centaines de milliers, voire possiblement des millions de disciples, suivent les préceptes de ce gourou depuis maintenant plusieurs années, comme le révèle The Guardian.
"Art thérapeutique"
Le quotidien britannique retrace le parcours de cet ancien banquier d'affaires reconverti dans la promotion de sa médecine alternative, qui l'a récemment conduit devant les tribunaux anglais, après le décès de plusieurs de ses adeptes. Hongchi Xiao est né en Chine, avant d'étudier la finance à Pékin et aux États-Unis, et de travailler dans le monde bancaire à New York et Hong Kong. Selon ses dires, il aurait aidé à concevoir les cérémonies d'ouverture et de clôture des Jeux olympiques de Pékin en 2008.
Après avoir atteint la quarantaine, il affirme avoir mené une "quête spirituelle" de sept ans dans les recoins les plus reculés de son pays natal, pendant sept longues années, où il apprendra et perfectionnera sa pratique du "paida lajin". En 2010, il anime un premier atelier pour diffuser son "art thérapeutique" à d'autres adeptes. Une idée qui fera des émules : en s'associant à diverses organisations religieuses et paramédicales, Hongchi Xiao diffuse rapidement ses ateliers à travers le monde, jusqu'à cumuler des "dizaines de millions d'adeptes", dans 50 pays, affirme-t-il en 2016.
À lire aussi : Qu'est-ce que le délit de "provocation à l'abandon de soins" contre les dérives sectaires ?
Un garçon de six ans privé de soins
Alliant gifles et étirements, le "paida lajin" est vantée par son maître à penser et ses adeptes comme une médecine alternative censée guérir les personnes atteintes de cancer, de paralysie ou encore de diabète, en améliorant la circulation sanguine et l'effort musculaire. Le tout en se substituant à la médecine traditionnelle. Des promesses qui s'avéreront funestes pour certains de ses adeptes.
En avril 2015, un garçon de six ans atteint d’un diabète de type 1 décède lors d'un des ateliers organisés à Sydney, en Australie. Sur les conseils du gourou, ses parents avaient cessé de lui administrer son insuline.
Malgré ce drame, il continue de prodiguer ses sermons à travers le monde. Un an plus tard, en octobre 2016, lors d'un nouvel atelier organisé dans le sud-ouest de l'Angleterre, une nouvelle adepte, Danielle Carr-Gomm, 71 ans, trouve la mort. Également atteinte de diabète de type 1, elle avait cessé de prendre de l'insuline depuis sa rencontre avec Hongchi Xiao en Bulgarie quelques mois plus tôt.
Condamné en Australie et au Royaume-Uni
Arrêté au Royaume-Uni, le gourou a été extradé en Australie, où il a été reconnu coupable de l'homicide involontaire du jeune garçon et condamné à neuf ans et demi de prison. Il a ensuite été transféré au Royaume-Uni en novembre 2023 pour que la justice détermine son rôle dans la mort de Danielle Carr-Gomm.
Lors du procès, qui s'est tenu devant le tribunal de Winchester, le procureur Duncan Atkinson a fait valoir que le prévenu savait que la victime risquait de mourir "et il savait qu'il avait une influence sur sa décision".
"Il a choisi de féliciter une diabétique qui a cessé ses injections", plutôt que de la dissuader de "prendre un grave risque pour sa vie".
Ce vendredi 26 juillet 2024, le jury de la Cour royale de Winchester l'a finalement condamné pour homicide involontaire par grave négligence. Sa peine exacte sera connue le 1er octobre prochain.