Êtes-vous apte à gravir les montagnes ?
En altitude, l'oxygène se raréfie. Mal des montagnes, œdème pulmonaire ou cérébral, guettent les alpinistes et les randonneurs de haute volée. Mieux vaut donc passer un test d'effort à l'hypoxie pour connaître la capacité de son organisme à s'adapter à ce nouvel environnement. Et ainsi éviter les accidents d'ascension.
Qu'est-ce que le mal des montagnes ?
En altitude, la pression de l'air et sa densité diminuent tout comme l'oxygène présent dans l'air. À 2.000 mètres d'altitude, il baisse d'un quart, à 5.000 mètres d'altitude, de moitié, et au sommet de l'Everest (8.848 mètres), il ne représente plus que le tiers de ce qu'il est au niveau de la mer. Cela signifie qu'au fur et à mesure que l'on monte, il y a moins d'oxygène qui arrive aux organes. Le risque en termes scientifiques, c'est l'hypoxie.
Confronté à cet environnement hostile, l'organisme parvient généralement à s'adapter en quelques heures. Des capteurs chimiques situés dans les vaisseaux du cou donnent l'alerte. Du coup, la respiration et le rythme cardiaque s'accélèrent. Le débit sanguin augmente et même le nombre de globules rouges se multiplie, afin d'accroître la capacité de transport de l'oxygène vers les organes. Quand cette adaptation ne se fait pas assez rapidement et que l'on reste plusieurs jours en altitude, l'hypoxie peut provoquer ce qu'on appelle le MAM, le mal aigu des montagnes. Une personne sur deux ressent des nausées, une migraine, de l'insomnie, des vertiges. C'est la forme bénigne !
Il existe en effet, des complications beaucoup plus graves : une personne sur cent peut développer un œdème pulmonaire. Tout au bout de l'arbre bronchique il y a les alvéoles : ces petites grappes entourées d'un réseau de petits vaisseaux sanguins, les capillaires. Cette proximité assure les échanges gazeux entre l'air inspiré et le sang. Habituellement, la pression dans ces petits vaisseaux est basse et ils s'adaptent assez mal aux augmentations de pression. Or, quand on est en altitude, c'est justement ce qui se produit, la pression augmente. Dès lors, la barrière entre alvéoles et petits vaisseaux est rompue. Les capillaires des poumons se mettent en quelque sorte à fuir. Du liquide traverse la paroi des petits vaisseaux sanguins et inonde les alvéoles. Le poumon se noie progressivement. Quand l'œdème est important, le sang ne peut plus s'oxygéner et l'issue peut être fatale.
Le test d'effort à l'hypoxie
Avant toute ascension, mieux vaut connaître sa résistance à l'hypoxie. La solution : passer un test à l'hypoxie. C'est ce qu'a décidé de faire Guillaume Prébois, un cycliste un peu hors norme, qui a prévu de se lancer à la conquête des cinq plus hautes routes des cinq continents.
Le mal des montagnes ne dépend ni de l'âge, ni de l'entraînement physique de la personne. Et l'œdème pulmonaire n'est pas le seul risque, une autre complication peut survenir lorsqu'on monte trop haut et trop vite, c'est l'œdème cérébral.
Quand l'ascension vire au cauchemar...
Le mécanisme de l'oedème cérébral n'est pas totalement élucidé. En altitude, le cerveau souffre du manque d'oxygène et la circulation sanguine tend à compenser en envoyant plus de sang vers le cerveau. Du coup, la pression sanguine augmente dans les vaisseaux sanguins qui irriguent le cerveau. Un vaisseau sanguin dans le tissu cérébral est entouré de différentes cellules nerveuses. Quand la pression augmente à l'intérieur de ces vaisseaux, la paroi du vaisseau a du mal à résister et du liquide passe à travers la paroi vers le tissu cérébral. Un œdème peut alors se former dans la boîte crânienne et comprimer le cerveau.
Pour éviter le mal des montagnes, il y a quelques consignes à respecter : ne pas monter trop vite trop haut, et laisser son corps s'acclimater à l'altitude en restant quelques jours au camp de base par exemple. Il existe un médicament dont la molécule s'appelle l'acétazolamide. Pris une journée avant toute ascension, il prévient le mal des montagnes en stimulant la respiration. Mais attention il ne protège pas contre les œdèmes.
Prévenir le mal des montagnes
Avant une randonnée ou un trekking, mieux vaut connaître les risques liés à la montagne. Chaque année, la montagne fait des morts, pas seulement au sommet de l'Everest ou du Kilimandjaro mais aussi lors de l'ascension de sommets moins élevés.
Gravir le Mont-Blanc comme le fit Jacques Balmat en 1786 pour la première fois, c'est l'objectif de nombreux randonneurs à Chamonix. Pour que le rêve ne vire pas au cauchemar, l'Institut de formation et de recherche en médecine de montagne a lancé un service de téléconsultation. L'objectif est de sensibiliser les futurs randonneurs aux dangers de la montagne et de les préparer à l'altitude.
S'acclimater, c'est le maître-mot car en altitude, l'organisme souffre du manque d'oxygène. Au sommet du Mont-Blanc, à 4.809 mètres, il y en a deux fois moins. Il faut donc y aller progressivement mais le corps s'est aussi s'adapter comme le confirme le Dr Emmanuel Cauchy, urgentiste directeur de l'Ifremmont : "L'organisme, dès la troisième heure en altitude, va sécréter une hormone, l'EPO, que prennent les cyclistes pour se doper. Mais en fait, on la fabrique très bien par le corps et l'EPO stimule la sécrétion de globules rouges. Le problème, c'est que ces globules rouges ne vont être opérationnels qu'au bout de six ou sept jours. C'est la raison pour laquelle pendant une petite semaine, il va falloir être très prudent et très calme pour laisser les globules rouges devenir matures et pouvoir augmenter la capacité de capter de l'oxygène par les poumons".
Lorsqu'on monte trop vite ou en l'absence d'acclimatation, on risque le mal aigu des montagnes. Maux de tête, nausées, vomissements, vertiges, difficultés pour se nourrir et dormir… Si ces symptômes perdurent au-delà de trois jours, il ne s'agit pas d'un simple mal des montagnes : "On considère que 3 à 5% de la population est génétiquement inadaptée à l'altitude. C'est-à-dire que ces personnes vont systématiquement quoi qu'elles fassent, même si elles s'acclimatent correctement, avoir des ennuis", prévient le Dr Cauchy. Et les complications peuvent être très graves : "Ce sont d'abord l'œdème pulmonaire, il y a un engorgement des poumons par du liquide plasmatique donc on se noie littéralement. Cela se traduit par une asphyxie et un décès qui peut survenir en quelques heures. Ensuite, l'autre risque c'est l'œdème cérébral. On a une augmentation du volume intracrânien et de la pression et cela entraîne d'abord des troubles neurologiques qui peuvent être au début très curieux, il peut s'agir d'irritations, un trouble du comportement, des hallucinations… Et ensuite, ça se transforme en coma".
Pour savoir si on est intolérant à l'altitude, un bon indice est de passer une nuit à 3.000 mètres. Si tout se passe bien, pas d'inquiétude à avoir. L'autre moyen est de réaliser un test en hypoxie. Une machine reproduit les effets de l'altitude. En quelques minutes, le patient se retrouve au sommet du Mont-Blanc et il doit pédaler. L'objectif du test en hypoxie est de mesurer grâce à un capteur placé sur l'oreille ou le doigt la saturation en oxygène dans le sang, la ventilation et le rythme cardiaque pendant l'effort.