Nobel de médecine 2012 : trois questions au Pr. Marc Peschanski
Le prix Nobel 2012 à été attribué conjointement à deux chercheurs, le Britannique John B. Gurdon et le Japonais Shinya Yamanaka, pour leurs travaux sur les cellules souches. Nous avons posé trois questions au Pr. Marc Peschanski, directeur scientifique de l'I-Stem (Institut des cellules souches pour le traitement et l'étude des maladies monogéniques, unité Inserm 861), pour qui cette découverte constitue également un pas de géant dans la recherche sur les cellules souches.
- En quoi ces travaux sur la reprogrammation cellulaire sont "révolutionnaires" pour reprendre le terme employé par le comité Nobel ?
Pr. Marc Peschanski : "Jusqu’à la découverte de John B. Gurdon en 1962, on considérait l'ADN (découvert en 1953) comme étant une structure stable et rigide. Les travaux du chercheur britannique ont permis de distinguer la structure de l'ADN de sa fonction."
En d'autres termes, John B. Gurdon a mis en évidence que l'ADN d'une cellule adulte contient toutes les informations génétiques nécessaires pour la transformer en toutes sortes de cellules.
"Grâce à John B. Gurdon, on a compris que la spécialisation des cellules n'est pas un processus irréversible.
"Shinya Yamanaka a lui réussi à reprogrammer génétiquement des cellules de souris en cellules souches pluripotentes. Ces travaux ont permis de recréer un organisme entier à partir d'une seule cellule adulte.
"En reprogrammant ces cellules humaines, les deux chercheurs ont permis d'ouvrir de nouveaux horizons comme celles d'étudier les maladies et de développer des méthodes pour établir un diagnostic et une thérapie.
- Concrètement qu’ont permis ces découvertes ?
Pr. Marc Peschanski : "Cinq ans après les travaux de Shinya Yamanaka, il y a eu 1 000 brevets déposés sur ces cellules souches. Une centaine de laboratoires de biologie cellulaire se sont mis à travailler sur ces cellules.
"Avant, quand on travaillait sur une maladie génétique comme la maladie de Huntington (NDLR : maladie héréditaire et orpheline qui se traduit par une dégénérescence neurologique), il était difficile de prélever des cellules nerveuses, en cause dans le processus de la maladie.
"Grâce à cette technique de reprogrammation des cellules souches, il est désormais possible, à partir de cellules de la peau qu'on redifférencie en neurones, de travailler sur les cellules défectueuses sans avoir à les prélever. Ces découvertes ont révolutionné la thérapie cellulaire.
- Quelles sont les limites de ces travaux ?
Pr. Marc Peschanski : "Ces cellules sont des OGM cellulaires, elles ont été génétiquement modifiées. A ce jour, on ne connaît pas l'impact et les désordres qu'elles peuvent provoquer. L'un des risques est celui d'une prolifération cellulaire anarchique" et donc d'un développement tumoral.
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