Un déséquilibre de la flore intestinale et c'est le diabète qui guette
Une alimentation riche en graisse modifierait la composition de la flore intestinale. Et celle-ci conditionnerait alors le développement de certaines pathologies métaboliques comme le diabète. C'est ce que révèle une étude menée par des chercheurs français spécialistes des maladies métaboliques.
La flore intestinale : un sac de bactéries dans le ventre
Responsables des ballonnements, des flatulences et autres gargouillements, ces bactéries qui grouillent dans notre système digestif, jouent aussi un rôle fondamental dans la santé humaine.
Chacun de nous en abrite quelques milliards dans son intestin : on estime que notre corps contient dix fois plus de bactéries que de cellules humaines ! C'est la flore intestinale. Au total, cela représente une masse d'environ 1 kilo et demi. Alors bien sûr, nous ne venons pas au monde avec un sac de bactéries dans le ventre, le tube digestif du nouveau-né est stérile : il n'en contient aucune. Mais il est très rapidement colonisé au contact de l'environnement, et petit à petit, différents types de micro-organismes élisent domicile dans l'intestin et le côlon du bébé.
Le mécanisme précis de ce phénomène est encore mal connu, mais une chose est sûre : au bout de deux ans, la flore intestinale de l'enfant a acquis sa composition quasi définitive. Ensuite, elle restera pratiquement stable pendant toute la vie de l'individu.
A l'âge adulte, chaque individu possède sa propre collection de bactéries, qui est différente de celle de son voisin. Mais bien que l'on soit tous différents, nos bactéries assurent les mêmes fonctions. Globalement, notre flore intestinale est composée de près d'un millier d'espèces différentes. Certaines ont besoin d'oxygène, d'autres non. Certaines sont "rondes", ce sont les coccidés, d'autres prennent la forme de "bâtonnets", ce sont les bacilles, d'autres encore sont en "tire-bouchon", les spirochètes, etc.
Toutes ces bactéries sont dites "commensales", du latin "qui mangent avec nous". Elles se nourrissent de nos cellules mortes, de nos muqueuses, et des résidus des aliments que nous consommons.
La flore intestinale : cause ou conséquence du diabète ?
Une équipe de recherche de Toulouse vient d'étudier l'action d'une alimentation grasse sur la flore intestinale, pendant trois mois, chez des souris de même âge ayant toutes le même fond génétique. Résultat : la plupart d'entre elles sont devenues diabétiques. L'équipe de Remy Burcelin, l'un des chercheurs, a observé de plus près leur flore microbienne selon qu'elles étaient diabétiques ou non. L'analyse a montré que les souris diabétiques avaient une flore majoritairement composée de Bacteroidetes, à la différence des non-diabétiques où l'on retrouve majoritairement des bactéries de type Firmicutes.
L'équipe toulousaine a tenté ensuite de comprendre si la flore intestinale pouvait être la cause ou la conséquence d'une maladie métabolique, et en l'occurrence du diabète chez ces souris. Les chercheurs ont donc modifié la flore d'un groupe de souris en ajoutant à leur régime riche en graisses des fibres alimentaires.
"La plupart des caractéristiques physiologiques ont été modulées par l'ajout de ces fibres. Le métabolisme des souris qui en ont mangé est proche de celui des souris non diabétiques. Pourtant, la flore intestinale des souris traitées par les fibres est devenue très différente des autres profils observés", précise Matteo Serino, l'un des auteurs de l'étude.
Conclusion : pour Rémy Burcelin, "la flore intestinale pourrait orienter le métabolisme vers un état diabétique ou non suivant son profil. Si on ne peut pas comparer la flore bactérienne d'une souris à celle de l'homme, certains mécanismes inflammatoires liés à certaines bactéries, comme la Faecalibacterium prausnitzii, semblent être les mêmes".
Les chercheurs vont plus loin en affirmant que l'analyse de la flore intestinale pourrait permettre de prédire la survenue d'un diabète. "Il est possible qu'une supplémentation en fibres, ciblant la flore intestinale, empêche l'apparition de maladies métaboliques comme le diabète, même en cas de régime riche en graisse", ajoute Matteo Serino.
Source : "Metabolic adaptation to a high-fat diet is associated with a change in the gut microbiota", Gut 2012;61:543-553 doi:10.1136/gutjnl-2011-301012
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