Deux fois plus de mélanomes chez les pilotes, stewards et hôtesses de l'air
Les pilotes de ligne et le personnel navigant des compagnies aériennes auraient deux fois plus de risques de développer un mélanome que le reste de la population, selon une synthèse d'études publiée ce 3 septembre 2014, dans le Journal of the American Medical Association (JAMA).
Selon cette synthèse de 19 études, le risque de mélanome (le cancer de la peau le plus redouté) apparaît deux fois plus important pour les pilotes, hôtesses et stewards que pour le reste de la population.
Cette incidence nettement plus élevée est surtout attribuée à une plus grande exposition aux rayons ultraviolets du soleil à travers le pare-brise et les hublots en verre des avions à haute altitude, expliquent les auteurs de cette recherche.
A 9.000 mètres d'altitude, où volent la plupart des avions commerciaux, l'intensité des rayons ultraviolets est deux fois plus forte(1). En outre, ces niveaux sont même plus élevés quand les avions volent au-dessus d'épaisses couches de nuages qui peuvent, tel des miroirs, renvoyer jusqu'à 85% des rayons ultraviolets.
Les rayons UV-A ne sont pas filtrés par le verre des hublots
Une vitre de verre, pour peu qu'elle soit épaisse, ne laisse passer qu'une très faible proportion de rayons UVB (qui déclenchent la production de mélanine et font bronzer) et ne filtre que très peu de rayons UVA. Ces rayons, qui pénètrent plus profondément dans la peau, sont notamment responsables de son vieillissement, et sont cancérigènes.
Dans une étude datée de 2007, commandée par la Federal Aviation Administration (FAA) des Etats-Unis, des experts ont évalué la capacité de filtrage UV des deux types de matériaux constituant les pare-brises des avions : le verre feuilleté (ou verre laminé, qui se fend, mais ne se brise pas en cas d'impact) et le polycarbonate. Selon leur conclusion, le verre feuilleté ne bloque pas la plupart des rayons UVA, tandis que le polycarbonate a des propriétés filtrantes beaucoup plus importantes(1). Mais les propriétés anti-casse du verre feuilleté (ainsi que d'autres propriétés physiques, telles que l'écoulement de l'air sur sa surface) font que ce matériau est très majoritairement utilisé pour les avions de ligne rapides.
D'autres facteurs ?
Le dermatologue James M. Spencer, évoquant en 2012 dans le New York Times la plus forte prévalence de ces cancers chez le personnel naviguant, observait que d'autres facteurs pouvaient théoriquement s'ajouter à l'exposition aux rayons UVA. Le fait que ces grands voyageurs aient l'opportunité de profiter du soleil dans les pays où ils font escale est ainsi évoqué comme un facteur contributif. La perturbation du rythme biologique (décalage horaire) et la fatigue de l'organisme pourraient également jouer un rôle dans ce phénomène.
Alors que les risques pour les pilotes et personnels navigants d'une exposition aux radiations ionisantes (rayons X, gamma...) venant de l'espace sont surveillés régulièrement, les dangers des rayons ultraviolets pour ce groupe professionnel ne sont pas reconnus, en dépit d'un nombre croissant d'études démontrant les risques.
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(1) À chaque fois que l'avion s'élève de 1.000 pieds (305 mètres), l'intensité du rayonnement UV augmente de 4%.
(2) La longueur d'onde des UV-A est comprise entre 315 et 400 nm. Seules les radiations UV de longueurs d'ondes inférieures à 340 nm sont filtrées par les pare-brises de verre des avions. Les pare-brises en polycarbonate filtrent, eux, l'ensemble du rayonnement d'une longueur d'ondes inférieure à 380 nm. Les rayonnements de plus faible longueur d'ondes sont plus dangereux.
Source : The Risk of Melanoma in Airline Pilots and Cabin Crew, a meta-analysis. Martina Sanlorenzo et coll. JAMA Dermatol. 3 sept. 2014. doi:10.1001/jamadermatol.2014.1077
VOIR AUSSI :
- Pilotes d'avion et conducteurs de train manqueraient de sommeil, article du 7 mars 2012.
- Y a-t-il un médecin dans l'avion ?, article du 6 juillet 2010.